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[Cinéma] Tonie Marshall veut briser le plafond de verre avec « Numéro Une »


(Photo : AFP)

« Petite actrice » devenue réalisatrice, seule femme à avoir remporté le César du meilleur réalisateur, Tonie Marshall raconte  dans son film « Numéro Une », dans les salles mercredi, la bataille d’une ingénieure pour prendre la tête d’une entreprise du CAC 40.

Emmanuelle Blachet, sous les traits d’Emmanuelle Devos, est une ingénieure qui a gravi les échelons de son entreprise et siège à son comité exécutif. Jusqu’au jour où un réseau de femmes la contacte pour lui proposer de l’aider à devenir la première femme à occuper le fauteuil de PDG d’une des plus grandes entreprises françaises.

« Tout ce qui est dans le film est très réaliste », assure la cinéaste, qui a rencontré de nombreuses dirigeantes pour ce long-métrage. « Je ne voulais pas montrer des hommes caricaturaux mais en revanche montrer à quel point ces sphères sont occupées ».  « Les femmes ont dû mal a s’y projeter », poursuit Tonie Marshall, qui dénonce « une organisation frontale » et « une misogynie bienveillante, paternaliste »,  pour empêcher les femmes d’accéder aux plus hauts postes.

Dans le monde du cinéma, où on compte en France une femme réalisatrice pour quatre hommes, Tonie Marshall assure en revanche ne pas avoir souffert de sexisme.

« Je n’ai jamais entendu dire qu’un film ne se montait pas parce qu’il était fait par une femme », dit-elle. La France « est le pays où il y a le plus de femmes en réalisation », se réjouit la réalisatrice et scénariste, svelte, cheveux blonds coupés courts et ton décidé. A 65 ans, elle a vu le métier évoluer.

Elle-même, quand elle s’est lancée dans la réalisation en 1989 avec « Pentimento » a « eu un peu peur de ne pas y arriver, parce que j’étais une petite actrice, que je n’avais pas fait d’école, que je n’avais pas de technique », se souvient-elle. « Mais j’ai trouvé un réalisateur qui m’a fait confiance et j’ai appris. »

Emmanuelle Devos, qui avait déjà tourné avec elle dans « Au plus près du paradis » et « Tontaine et Tonton », la décrit comme étant « attentive aux moindres détails ». « Elle connaît parfaitement son sujet, ce qui est extrêmement rassurant pour un acteur », ajoute-t-elle.

Une enfance cinéphile

Avant de passer derrière la caméra, la fille de l’actrice française Micheline Presle et du réalisateur américain William Marshall connaissait déjà bien les plateaux de tournage pour avoir enchaîné une myriade de petits rôles dans les années 1970 et 1980, après être passée par le théâtre. « J’étais actrice car c’était ce qui me paraissait le plus naturel, mais je m’intéressais beaucoup à l’écriture, à la production », dit-elle.

Le virus du cinéma lui a été transmis par sa mère, qui trouve souvent un petit rôle dans ses films. « Elle m’a communiqué le goût de voir des films, même toute seule, à 2h de l’après-midi », racontait-elle lors d’une rencontre à l’Ecole de cinéma Esra.

Enfant, Tonie Marshall a grandi à côté du cinéma d’art et d’essai le studio des Ursulines à Paris. « Ma chambre donnait sur la cabine du projectionniste et j’apprenais des films par coeur », « je voyais même des films que je ne comprenais pas, des Bergman », se souvient-elle.

Au fil de sa filmographie, elle a dressé une galerie de portraits attachants, souvent féminins, comme celui d’Anémone, sa meilleure amie d’adolescence, dans « Pas très catholique », ou Angèle (Nathalie Baye) dans « Vénus beauté (institut) ».

Avec cette comédie dramatique, qui a rencontré un vif succès, elle a décroché en 2000 les César du meilleur film, meilleure réalisation, meilleur scénario original et meilleur espoir féminin pour Audrey Tautou.

« Je parle sûrement mieux de tout ça en travaillant avec le corps des actrices, mais ce n’est pas une volonté de faire des portraits de femmes », dit Tonie Marshall, qui se dit plutôt animée par le désir d’inventer des personnages plein « de singularité et de fantaisie ».

Le Quotidien / AFP