The Rescue ramène à l’opération menée en 2018 pour sauver de jeunes footballeurs prisonniers d’une grotte thaïlandaise. Un documentaire raconté par un trio de plongeurs britanniques dont le rôle fut essentiel dans ce sauvetage ultramédiatisé.
Avec les réalisateurs Elizabeth Chai Vasarhelyi et Jimmy Chin, il faut souvent s’attendre à en prendre plein les yeux. Ce couple aux productions régulièrement primées dans le monde entier célèbre l’exploit sportif, l’audace et le courage de ses contemporains.
Deux œuvres témoignent particulièrement de leurs obsessions : Meru (2015) et Free Solo (2018), étourdissant documentaire récompensé d’un Oscar et suivant Alex Honnold, as de l’escalade à main nue, dans son ascension d’El Capitan, paroi lisse et verticale de 975 mètres de hauteur…
Pour The Rescue, le tandem, de nouveau allié à la chaîne National Geographic (aux images sublimes), quitte les sommets et la haute altitude pour un plongeon suffocant dans les eaux troubles de la grotte thaïlandaise de Tham Luang, où durant 18 jours sont restés prisonniers douze jeunes footballeurs et leur entraîneur.
Une nouvelle histoire sensationnelle qui, en 2018, avait attiré les médias internationaux, relayant auprès de millions de spectateurs cette opération de sauvetage (épique et, contre toute attente, réussie) aux airs de contre-la-montre face à la montée des eaux, la privation d’oxygène et les dédales labyrinthiques de cette cavité longue de plusieurs kilomètres.
Des antihéros à l’allure de préretraités
Bref, le type d’histoire «bigger than life» dont s’empare vite le cinéma. Ainsi, une première fiction, vite faite (et bâclée), est déjà sortie (The Cave, 2019), en attendant une version hollywoodienne, toujours en cours de fabrication par Ron Howard et attendue pour 2023 (Thirteen Lives). Une belle aventure qui n’a pas non plus échappé à Netflix, qui prévoit cette année d’en faire une série, le tout en s’assurant l’exclusivité des commentaires des principaux intéressés, entassés durant deux semaines sur un morceau de pierre au-dessus d’une rivière souterraine.
Elizabeth Chai Vasarhelyi et Jimmy Chin ont alors dû trouver un autre angle d’attaque pour construire leur récit, certes alimenté par 87 heures d’images fournies par les forces spéciales thaïlandaises après deux années de négociations.
Pour ce faire, ils tournent leur caméra vers un trio de plongeurs britanniques – Richard Stanton, Jason Mallinson et Jim Warney, dixit les «meilleurs plongeurs souterrains de la planète» – dont le rôle fut essentiel dans l’opération. Des antihéros, à l’allure de préretraités et pratiquant la plongée par «plaisir», jurant dans un décor animé par les militaires et les commandos de la marine (les Navy Seals thaïlandais), aux muscles tatoués.
C’est d’ailleurs tout le sel de ce documentaire : voir ces amateurs plus tout jeunes trouver des solutions pour atteindre des sections de la grotte qui tenaient jusqu’alors en échec des plongeurs de combat surentraînés.
Mieux, alors qu’ils se reconnaissent un peu en marge de la société, trouvant dans la plongée un moyen de s’évader d’un monde trop grand pour eux, ils se retrouvent là au milieu d’un tumulte rare, gravitant parmi des milliers de bénévoles et sous le regard intrusif des caméras. Sans oublier les risques qu’ils prennent, comme finir en prison si un des enfants mourait.
«Sauter dans un trou boueux»
The Rescue, qui s’appuie aussi sur des reconstitutions faites en studio en Angleterre, ne se contente pas d’interviewer ces sauveteurs et de tenir le crachoir aux officiels en uniforme. Il revient sur les moments clés de l’opération qui, selon les termes courants de la plongée souterraine, s’apparente à «sauter dans un trou boueux» : l’imposant dispositif pour détourner les eaux tumultueuses ou le bricolage pour extirper les gamins (sous sédatif) de la grotte, tout en poulies et cordes. Dehors, sous une pluie tenace, on s’agite et s’agglutine, entre espoir, larmes et prières.
Comme toute bonne histoire qui se tient, les moments forts ne manquent pas : la découverte de quatre employés du service des eaux piégés, eux aussi, et oubliés, l’explosion de joie qui accompagne l’annonce de la localisation des enfants, l’angoissante errance d’un plongeur qui s’est mis à nager à contresens, l’intervention d’un bonze insistant pour que l’on ajoute des bracelets bénis aux paquets de vivres apportés aux prisonniers…
Mais le plus fort reste la maîtrise qu’affichent Elizabeth Chai Vasarhelyi et Jimmy Chin, qui arrivent à tisser un récit captivant avec un matériau aussi incomplet. Et pour connaître l’autre histoire de l’intérieur, celle des enfants, il faudra s’en remettre à Netflix. Une fois de plus.
The Rescue, d’Elizabeth Chai Vasarhelyi et Jimmy Chin. Disney+.