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[Cinéma] « Personal Shopper » : une ode fantomatique


La star américaine Kristen Stewart interprète le rôle principal de "Personal Shopper". (capture vidéo)

Avec Personal Shopper, en salles mercredi, l’histoire d’une jeune femme qui espère entrer en contact avec son frère disparu, le réalisateur Olivier Assayas a voulu signer un film «sur le deuil et la solitude contemporaine», qui avait déconcerté au dernier festival de Cannes.

Tourné en anglais, le film marque les retrouvailles du réalisateur de 61 ans avec la star américaine Kristen Stewart, 26 ans, qu’il avait mise en scène dans Sils Maria, un rôle qui lui avait valu le César de la meilleure actrice dans un second rôle en 2015.

«C’est un film, au départ, que j’imaginais presque comme un film un peu expérimental. Et puis, après, il a pris une forme un peu plus cadrée», dit Olivier Assayas, qui avait d’abord envisagé de faire un film «entièrement sur une communication via des textos». Personal Shopper, récompensé par le prix de la mise en scène à Cannes, commence de façon classique. Maureen (Kristen Stewart) est une Américaine qui travaille à Paris pour une actrice célèbre dont elle est la «personal shopper», ce nouveau métier qui consiste à écumer les boutiques de luxe pour habiller une clientèle VIP. Elle se rend dans une grande maison où rôde, selon elle, le fantôme de son frère jumeau, Lewis, mort il y a peu des suites d’une malformation cardiaque dont elle est elle-même atteinte.

Car Maureen et Lewis, qui se disent médiums, avaient passé un pacte : le premier des deux qui mourrait devrait entrer en contact avec l’autre. Le film prend ensuite une tournure fantastique dans laquelle Maureen entre dans une sorte de divagation entre rêve et réalité, entrecoupée de mystérieux échanges de textos avec un inconnu qui l’interroge : «Qu’est-ce qui te fait peur ?», «Qu’est-ce qui te met mal à l’aise ?».

Un film sur la mafia ?

Pourtant, Olivier Assayas dit ne pas avoir voulu faire un film de genre. «C’est un film qui parle plutôt du deuil et de la façon dont une jeune femme se reconstruit après avoir perdu quelqu’un qui était son frère jumeau, c’est-à-dire littéralement une partie d’elle-même», explique-t-il. «Ce qu’on appelle des fantômes, c’est quelquefois tout simplement la projection en dehors de soi de choses qui nous sont mystérieuses ou douloureuses», ajoute encore le cinéaste. «J’ai toujours fait des films qui, d’une manière ou d’une autre, prenaient en compte la dimension de l’inconscient et dans lesquels j’ai souvent utilisé des éléments de genre.» Cinéaste éclectique, Olivier Assayas dit avoir «toujours eu du goût pour le cinéma de genre», qui «l’a beaucoup marqué, influencé parce qu’il touche à une dimension de l’humain qu’un cinéma plus psychologique n’atteint pas». La transgression des interdits, la gémellité, l’existence d’une vie après la mort, sont autant de sujets abordés dans le film qui parle aussi d’une «forme d’exploration intérieure», dit-il. «Le film a à voir avec la solitude» et avec «la façon dont la solitude contemporaine est très peuplée, où on est beaucoup plus facilement happé par les moyens de communication», souligne-t-il.

Entre suspense et surnaturel, le réalisateur fait aussi flotter un parfum ambigu et sensuel grâce à Kristen Stewart, presque seule à l’écran de bout en bout, qui, dit-il, «lui a permis de faire ce film, car c’est quelqu’un qui a une capacité à donner une vérité aux choses les plus abstraites». Après ce film, Olivier Assayas planche sur un projet complètement différent : Idol’s Eye avec Robert Pattinson, Rachel Weisz et Sylvester Stallone, un long métrage «cher et ambitieux», sur lequel il avait déjà travaillé avant Personal Shopper, mais qui n’avait pas pu se faire à l’époque. Basé sur un fait divers, ce film, qui doit se tourner au Canada, raconte un «affrontement entre la mafia de Chicago et une bande de cambrioleurs» à la fin des années 1970. Un tournage en attente, toutefois, d’un «feu vert» des financeurs.