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[Cinéma] «Hard Truths», les raisons de la colère


Trois décennies après sa Palme d’or pour Secrets and Lies, le Britannique Mike Leigh retrouve l’actrice Marianne Jean-Baptiste dans un nouveau film, Hard Truths, qui est à son image, oscillant entre gratitude et désespoir.

«C’est un privilège de pouvoir faire des films, et c’est un privilège qui devient de plus en plus difficile à obtenir», a déclaré Mike Leigh, cinéaste britannique de 82 ans et auteur d’une quinzaine de films, dont Naked (1993), prix de la mise en scène à Cannes, Vera Drake (2004), qui lui a valu le Lion d’or à Venise, ou Secrets and Lies, Palme d’or 1996.

Atteint d’une maladie musculaire génétique, Mike Leigh, auteur d’un cinéma réaliste qui ausculte la société britannique et ses classes modestes, travaille déjà sur un prochain film. Et sort aujourd’hui dans les salles luxembourgeoises Hard Truths, salué par la critique internationale comme l’un de ses films récents les plus forts.

Cette histoire, poignante et drôle, autour de deux sœurs que tout oppose, met en scène deux actrices britanniques noires qui étaient déjà il y a trente ans au casting de Secrets and Lies. L’une d’elles, Marianne Jean-Baptiste, 57 ans, avait à l’époque été nommée à l’Oscar du meilleur second rôle. Elle joue cette fois le personnage principal, celui de Pansy, une mère, mariée, dépressive, anxieuse et, surtout, très agressive. Sa sœur Chantelle (Michele Austin) est tout le contraire.

 

Comme toujours, il n’y a pas de leçon facile à tirer du cinéma de Mike Leigh. Son film, ou lui-même, ont-ils des leçons à donner pour bien vivre? «Vous me demandez quel est le secret de la vie ? Je ne suis pas assez prétentieux ou suffisant pour pontifier sur la manière de vivre», répond-il. «J’ai travaillé très dur. J’ai utilisé mon imagination. J’étais engagé. Pour moi, il s’agit de s’engager avec les gens», résume-t-il.

Pour la première fois, Mike Leigh travaille presque uniquement avec des acteurs noirs, représentants de la communauté d’origine caribéenne de Londres. «Cela semblait naturel. Ce n’est pas un changement radical. J’ai élevé mes enfants dans le nord de Londres, et ils étaient à l’école là-bas et des enfants noirs couraient toujours dans et hors de notre maison», a-t-il expliqué. «Mais d’un autre côté, il va sans dire que je ne pourrais pas m’asseoir dans une pièce et écrire un scénario conventionnel pour un tel film.»

Les principaux problèmes du film sont, bien sûr, universels

Fidèle à son approche collaborative et son travail en amont, Mike Leigh a choisi à nouveau de commencer par une idée, puis d’organiser des ateliers avec les acteurs pour développer les personnages, les dialogues et l’intrigue. «En décidant de se concentrer sur des personnages noirs, l’une des choses que j’ai faites très consciemment est de me dire que ce ne serait pas un film sur les clichés, les stéréotypes, la délinquance, la drogue et les gangs», a poursuivi Leigh.

«Les principaux problèmes du film sont, bien sûr, universels et ne sont pas spécifiques aux personnes noires», souligne encore celui qui, avec son compatriote Ken Loach, est considéré comme l’autre référence du cinéma social britannique. Avec ce nouveau film, il signe un retour à son genre de prédilection, après avoir travaillé sur deux fresques historiques de grande envergure : Mr. Turner (2014), vie du peintre romantique J. M. W. Turner, et Peterloo (2018), récit d’un massacre survenu lors d’une manifestation pacifique à Manchester au XIXe siècle.

Hard Truths ne signe pas l’au revoir au cinéma de Mike Leigh. Bien que trouver un financement devienne de plus en plus difficile, à l’époque du streaming roi, selon lui : «Je parle aux financeurs potentiels, et ils disent : « Nous respectons ce que vous faites, nous aimons ce que vous faites, mais ce n’est pas pour nous. »» « »Pas pour nous » est un code pour « nous n’allons pas nous impliquer dans un projet où nous ne pouvons pas interférer, insister pour engager des stars hollywoodiennes, nous ne pouvons pas gâcher la fin, nous ne pouvons pas vous embêter pendant que vous essayez de filmer »», regrette-t-il.

 

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