Avec « Mon garçon », le réalisateur français Christian Carion signe un thriller intense et sous haute tension. Avec un Guillaume Canet qui joue sans filet et… sans scénario !
Confidences d’acteurs : «Je n’ai jamais vécu une expérience pareille, jamais connu une telle intensité. C’est une sensation monumentale que je souhaite à n’importe quel acteur» (Guillaume Canet) et aussi : «J’ai eu l’impression de vivre un baptême du feu très violent (Mélanie Laurent).» Tous deux interprètent les personnages principaux de Mon garçon, nouveau film de Christian Carion.
«Je sortais de trois films historiques, Joyeux Noël (2005), L’Affaire Farewell (2009) et En mai fais ce qu’il te plaît (2015), je voulais que le suivant soit plus contemporain», rappelle-t-il. Là, en effet, changement radical de genre. Du bon thriller, efficace, avec un homme, Julien, qui vit avant tout pour son métier. Il voyage beaucoup, sans cesse à l’étranger – ce qui, quelques années auparavant, a fait exploser son couple.
Il fait escale en France, écoute son répondeur téléphonique, entend son ex-femme en pleurs lui dire que leur fils, âgé de sept ans, a disparu lors d’un bivouac en montagne avec sa classe. Julien se précipite à sa recherche, rien ne pourra l’arrêter. En soi, on a là un scénario, une histoire déjà lue dans les livres, vue et revue au cinéma. Sauf que…
Sauf que, là, pour Mon garçon, le réalisateur pensait au sujet – la disparition d’un enfant, depuis 2002. Il repoussait sans cesse le moment de se lancer dans l’histoire, la peur le saisissant à chaque fois qu’il y songeait. Puis, lors du tournage d’En mai fais ce qu’il te plaît, il annonce à son producteur que, «quoi qu’il arrive, je sais que pour le prochain, j’aurai envie de faire un film contemporain, avec peu d’acteurs, en français, plus resserré, plus simple»…
«Je n’ai pas joué une histoire, je l’ai vécue»
Et peu après, Carion évoque son projet à Guillaume Canet, qu’il avait dirigé déjà dans deux films précédents. Encore le réalisateur : «Entretemps, Guillaume est devenu père. En discutant du film avec lui, c’est allé très vite. Je lui ai dit : ‘J’ai envie d’aller au bout d’une idée qui est toute simple. Ton personnage est un homme absent, toujours à l’étranger. Il revient et apprend des choses qu’il ignorait. Est-ce qu’on peut imaginer une situation où toi, acteur, tu découvres tout au fur et à mesure ? Que je ne te donne pas de scénario? Serais-tu prêt à prendre ce risque ?’ J’ai tout de suite vu qu’il était très excité à l’idée de vivre une telle expérience !»
Dans la foulée, le réalisateur glisse au comédien que «le film se fera sans scénario, mais aussi sera tourné en temps réel, ou presque. Pour tout miser sur l’instant.» Deux semaines de répétitions pour les acteurs, mais toutefois sans Guillaume Canet…
«Ça leur a permis de voir l’espace de jeu, commente-t-il, mais sans savoir ce que Guillaume allait faire. On a fait semblant de tourner le film et quand il est arrivé, on a tout remis en jeu.» Tournage en temps réel, en six jours… Le réalisateur dit aussi avoir songé aux films de Michael Mann, et plus précisément The Insider (2000, avec Al Pacino et Russell Crowe) pour son côté emporté et rapide. Et c’est ainsi que Mon garçon est un film follement intense, sous haute tension avec un acteur, Guillaume Canet, qui a joué avec ses mots et sa violence. Avec un acteur qui confie : «Je n’ai pas joué une histoire, je l’ai vécue.»
De notre correspondant à Paris, Serge Bressan