François Civil joue un professeur de français accusé d’avoir voulu séduire une collégienne et menacé de mort dans Pas de vagues.
Sorti mercredi, le film Pas de vagues est d’une actualité brûlante : il résonne à la fois avec les assassinats des professeurs Samuel Paty en 2020 et Dominique Bernard trois ans plus tard, et avec la question de la place accordée à la parole des personnes dénonçant des violences sexuelles, comme à celle des mis en cause. Ce long métrage s’inspire de l’histoire, moins tragique, vécue par son réalisateur, Teddy Lussi-Modeste. Professeur de français en banlieue parisienne, il a été accusé par l’une de ses jeunes élèves et a eu l’impression d’être lâché par l’institution scolaire. Plus largement, son titre renvoie au slogan utilisé par des enseignants pour dénoncer la façon dont cette institution préfèrerait, selon eux, enterrer les affaires plutôt que de défendre les professeurs menacés.
François Civil incarne un jeune prof de collège passionné par son métier et habité par la volonté de faire aimer les lettres à ses élèves. Son quotidien bascule lorsqu’une élève discrète de sa classe, qu’il a voulu prendre sous son aile, l’accuse d’avoir tenté de la séduire. L’élève est convoquée. Sans même qu’on ne l’écoute vraiment, la chose s’ébruite, la rumeur s’emballe. Un par un, les collègues lui tournent le dos, le principal se retranche derrière le principe de précaution. Dans une école qui n’a plus rien d’un sanctuaire, les menaces de mort arrivent.
«Sables mouvants»
À l’heure de #MeToo et de la libération de la parole des victimes de violences sexuelles, le film fait le pari risqué d’opter pour le point de vue d’un homme mis en cause alors qu’il est innocent. Le réalisateur et sa coscénariste, Audrey Diwan (L’Événement), marchent sur des œufs. «Il y a en fait deux victimes, le professeur et la jeune fille», insiste Teddy Lussi-Modeste-t-il. «Ils sont victimes tous deux du fait qu’on ne leur laisse pas la possibilité de parler.» «La jeune fille ne ment pas, abonde pour sa part François Civil. Le film interroge le recueil de la parole au sein de l’école. On voit tous les dysfonctionnements, des tas de petits grains de sable, qui font qu’à la fin, on s’enfonce dans des sables mouvants.»
Anticipant d’éventuelles polémiques, il estime que l’on «est dans un endroit où tout est bouillant, se polarise, alors que le cinéma, c’est l’art du temps long». «J’espère qu’il y a encore de la place pour la complexité», explique l’acteur, lui-même fils de profs. «L’école, c’est une société en miniature, où on a laissé entrer les problèmes. En filmant l’école, on filme la société», remarque-t-il.
Pas de vagues, de Teddy Lussi-Modeste.