Chiara Mastroianni s’habille comme son père chez Fellini et se fait appeler Marcello : voilà Marcello mio, folle comédie signée Christophe Honoré, doublée d’une ode au travail d’acteur.
Dans leur propre rôle, Catherine Deneuve, Fabrice Luchini, Nicole Garcia, Benjamin Biolay ou encore Melvil Poupaud (ces derniers ont partagé la vie de l’actrice principale) complètent le casting du nouveau film de Christophe Honoré, 54 ans, qui suit la joyeuse embardée d’une Chiara Mastroianni de fiction entre Paris et l’Italie. «Avec Christophe, j’ai l’habitude des choses étranges, mais j’ai été surprise, oui. Je me suis dit : « C’est culotté, intrigant, ça donne envie », c’est rare de se lancer dans des trucs aussi audacieux», expliquait la comédienne à Cannes en mai, où le film était en compétition officielle pour la Palme d’or.
Christophe Honoré se souvient de lui avoir présenté le projet «sur la pointe des pieds». «On a mangé dans une pizzeria, je lui ai parlé d’un film assez classique et je lui ai dit : “Mais j’ai une autre idée (…), je voudrais faire une comédie de ta vie, avec cette généalogie qui est la tienne. »»
Le réalisateur sait que la famille de l’actrice est «très vigilante sur sa vie privée». «Mais Chiara m’a dit : « Ça peut être drôle »», s’est-il souvenu. Christophe Honoré a aussi fait comprendre à son actrice fétiche, fille de Marcello Mastroianni et Catherine Deneuve, qu’il s’agissait d’un film qui transpire de son «amour des acteurs».
«La vérité est ailleurs»
«J’ai une confiance telle en Christophe que je lui confierais mes enfants», assure la comédienne de 52 ans. C’est une fidèle du cinéaste depuis Les Chansons d’amour (2007); elle a tourné dans sept de ses films, et, parallèlement, le duo s’est aussi aventuré au théâtre. «Et puis ma mère m’a tellement dit : « Tu ressembles à ton père »!»
«Mon père est mort quand j’avais 24 ans, c’est une frustration énorme. Tous les jours je pourrais parler de lui – « Tu as vu comme il est beau sur cette photo! », mais je ne peux pas envahir les gens avec ma nostalgie», explique Chiara Mastroianni. Pendant ce tournage, elle a donc pu «harceler» le réalisateur en lui envoyant tous les documents possibles sur son père. Mais elle n’a pas participé au scénario. «Christophe écrit tout, il n’a besoin de personne.»
Chiara Mastroianni insiste aussi sur le fait qu’il ne faut pas prendre pour argent comptant tout ce que disent les acteurs qui jouent leur propre rôle dans le film : «La vérité est ailleurs, comme on dit dans la série X-Files. La vérité n’est pas dans ce qu’on raconte mais dans la sincérité qu’on met à l’incarner.» Dans le film, sa mère, Catherine Deneuve, lui donne des tuyaux avant un casting. «Elle ne le fait pas dans la vie, non, si elle m’avait conseillé pour les castings j’aurais beaucoup plus travaillé d’ailleurs», s’amuse sa fille.
Style iconique
Le film est gorgé «d’autodérision», comme elle le glisse. «On ne voulait pas faire dans le sentencieux, le distant, le froid, le glacial, alors que mon père était si proche des gens.» Un souvenir encore très vivant dans le cœur et la mémoire collective des Italiens, dont l’actrice a pu être témoin pendant le tournage. «Quand je me baladais dans les rues de Rome, entre ma loge et le plateau, en petit bonhomme, les Italiens me criaient : « Ciao Marcello! » sans savoir ce qu’on tournait.» Dans le film, elle est habillée comme son père dans La dolce vita (1960) ou 8 ½ (1963), classiques de Federico Fellini dans lesquels Marcello Mastroianni, double à l’écran du «Maestro», a rendu éternel son style vestimentaire, à la fois élégant et négligé, avec deux accessoires iconiques : les lunettes Persol à l’épaisse monture rectangulaire et un Borsalino vissé sur le crâne.