Le duo Barbie et Oppenheimer, qui a surfé cet été en tête du box-office, a dominé lundi soir les nominations des Golden Globes, récompenses cinématographiques et télévisuelles en quête de renouveau.
Véritable phénomène culturel et commercial, le film Barbie de Greta Gerwig est nommé à neuf reprises aux Golden Globes, notamment dans les catégories «meilleur film de comédie», «meilleure réalisation» et «meilleure chanson» (avec trois titres). Oppenheimer, portrait tortueux du concepteur de la bombe atomique réalisé par Christopher Nolan, compte huit nominations, notamment pour «meilleur film dramatique» et «meilleure réalisation». Leurs acteurs respectifs, Margot Robbie et Cillian Murphy, sont aussi nommés. Surnommés «Barbenheimer» sur les réseaux sociaux, les deux blockbusters de l’été, sortis le même jour, s’apprêtent à dominer la saison des récompenses hollywoodiennes, qui commencera le 7 janvier avec les Golden Globes. «C’est incroyable qu’ils aient réussi à prolonger cet élan», a salué lundi le vice-président exécutif de l’évènement, Tim Gray.
Suivent Killers of the Flower Moon de Martin Scorsese et Poor Things de Yorgos Lanthimos, chacun sept fois nommés. Vainqueur de la Palme d’or 2023, le drame français Anatomie d’une chute, de Justine Triet, s’illustre avec quatre nominations. L’actrice allemande Sandra Hüller, qui y incarne une écrivaine accusée d’avoir tué son mari, postule dans la catégorie «meilleure actrice dramatique». C’est elle aussi qui est à l’affiche de The Zone of Interest, drame glaçant sur les camps de concentration réalisé par le Britannique Jonathan Glazer, nommé pour trois Golden Globes.
Deux nouvelles catégories
La cérémonie mettra aussi à l’honneur les séries de télévision Succession et The Last of Us, qui cumulent respectivement neuf et trois nominations. Elle se tiendra à Beverly Hills et sera diffusée par le réseau national CBS, propriété de la «major» Paramount, qui a remplacé son concurrent, NBC. Avec ce changement de diffuseur, deux nouvelles catégories («meilleure performance au box-office» et «meilleur comédien de stand-up à la télévision»), un jury remanié et de nouveaux propriétaires, les Golden Globes tentent de faire remonter leurs audiences et de mettre de côté les polémiques du passé.
Suivis par 18 millions de téléspectateurs début 2020, juste avant la pandémie, les Golden Globes n’ont pas réussi à en réunir la moitié cette année, avec 6,3 millions de téléspectateurs – leur pire score d’audience. La cérémonie a perdu de son lustre en raison d’accusations de racisme et de corruption, et certaines critiques à Hollywood jugent que les réformes engagées posent de nouvelles questions éthiques.
Pendant des décennies, les Golden Globes ont été détenus, gérés et attribués par l’Association de la presse étrangère d’Hollywood (HFPA). Ce groupe éclectique d’une centaine de journalistes internationaux était souvent critiqué pour son amateurisme et son opacité. Des piques en coulisses qui ont éclaté au grand jour en 2021, lorsque le Los Angeles Times a révélé que l’organisation ne comptait aucune personne noire et que ses membres acceptaient des cadeaux mirobolants. L’année suivante, la cérémonie a été boycottée par Hollywood. Elle reste aujourd’hui en quête de rédemption.
Conflits d’intérêts
Les Golden Globes ont été rachetés en juin par des investisseurs, dont le milliardaire américain Todd Boehly. La HFPA a été dissoute et un nouveau plan adopté pour tenter de rétablir le prestige d’antan. Ses ex-membres sont désormais des employés de la nouvelle société des Golden Globes, rémunérés pour regarder des films, voter et rédiger des articles pour le site web de l’organisation.
Une situation potentiellement porteuse de conflits d’intérêts, d’autant que certains des nouveaux propriétaires sont des acteurs essentiels de l’industrie. Comme la société de production Penske Media, à laquelle appartiennent les magazines Variety et The Hollywood Reporter, ou l’entreprise Eldridge, qui détient une participation dans le studio de cinéma A24, régulièrement en lice pour les récompenses hollywoodiennes.
En finir avec un système vicié
«Il y a quelque chose d’inconvenant à ce qu’un électeur des Globes soit payé pour écrire sur le site web des Globes à propos d’un acteur qu’il pourrait nommer pour un Golden Globe qui sera remis sur la scène d’une cérémonie à la société pour laquelle il travaille», pointait récemment le Los Angeles Times dans un éditorial. Pour le journal, «le nouveau modèle semble être une gigantesque machine de relations publiques». Mais les nouveaux Golden Globes se défendent.
Selon l’organisation, verser un salaire de 75 000 dollars aux votants à Hollywood permet d’en finir avec un système vicié, où des journalistes précaires, souvent indépendants, acceptaient des cadeaux somptueux et de luxueux voyages de presse tous frais payés de la part des studios. Plus de 200 votants non membres, et donc non rémunérés, ont aussi été désignés pour plus d’impartialité. Et le nouveau conseil d’administration comprend des anciens respectés de l’industrie, comme l’ex-rédacteur en chef de Variety Tim Gray.
Les principales nominations
MEILLEUR FILM DRAMATIQUE
Anatomie d’une chute
Killers of the Flower Moon
Maestro
Oppenheimer
Past Lives
The Zone of Interest
MEILLEUR FILM MUSICAL OU DE COMÉDIE
Air
American Fiction
Barbie
The Holdovers
May December
Poor Things
MEILLEURE RÉALISATION
Bradley Cooper pour Maestro
Greta Gerwig pour Barbie
Yorgos Lanthimos pour Poor Things
Christopher Nolan pour Oppenheimer
Martin Scorsese pour Killers of the Flower Moon
Celine Song pour Past Lives
MEILLEURE SÉRIE DRAMATIQUE
1923
The Crown
The Diplomat
The Last of Us
The Morning Show
Succession
MEILLEURE SÉRIE MUSICALE OU DE COMÉDIE
Abbott Elementary
Barry
The Bear
Jury Duty
Only Murders in the Building
Ted Lasso
MEILLEURE MINISÉRIE OU TÉLÉFILM
All the Light We Cannot See
Beef
Daisy Jones & the Six
Fargo
Fellow Travelers
Lessons in Chemistry