Le réalisateur James Mangold s’intéresse aux débuts du musicien, sans pour autant éclaircir le mystère qui l’entoure. Dans la peau de la future icône du rock, Timothée Chalamet livre une partition à la hauteur de la légende.
Le prodige d’Hollywood dans la peau de l’icône de la folk et du rock : Timothée Chalamet enfile la guitare de Bob Dylan dans A Complete Unknown, le biopic qui revient sur les premiers pas du chanteur, en salles mercredi. «J’avais un peu peur que ça devienne encore un biopic hollywoodien de plus!», a confié l’acteur à propos de ce rôle, dans lequel il entonne lui-même les plus grands tubes du musicien, de Blowin’ in the Wind à The Times They Are A-Changin’. Le film, qui s’étale sur plus de deux heures et empile huit nominations pour les prochains Oscars, est signé James Mangold. Le cinéaste avait déjà raconté l’histoire d’une autre légende musicale, Johnny Cash (Walk the Line, 2005), avec Joaquin Phoenix, mais aussi le dernier Indiana Jones (2023) ou Ford v. Ferrari (2019).
Loin de la folie douce de I’m Not There de Todd Haynes, sorti en 2007, dans lequel six acteurs différents incarnaient Bob Dylan, ce «parfait inconnu» coche les cases plus classiques du film de fan, bien documenté d’ailleurs. James Mangold a choisi de se concentrer sur le début des années 1960, les toutes premières années de carrière de l’artiste, depuis son arrivée à New York guitare sur le dos jusqu’à ses premiers pas auprès des grands noms de la folk dont Pete Seeger (joué par Edward Norton) et aux côtés de Joan Baez (Monica Barbaro). «On s’est mis vraiment à fond dans les années 1960. On a complètement ignoré nos façons de vivre, résolument modernes, avec les téléphones et les trucs comme ça… Tout ce qui pouvait nous distraire», a raconté Timothée Chalamet.
J’avais un peu peur que ça devienne un biopic hollywoodien de plus!
Sur les tout débuts de Bob Dylan, «il y a très peu d’archives vidéo disponibles, il n’y a que quelques démos. Donc il y a une certaine liberté» pour interpréter le personnage, a-t-il retracé. Le film marque une nouvelle étape dans l’ascension de l’acteur de 29 ans aux 20 millions d’abonnés sur Instagram. Révélé dans Call Me by Your Name de Luca Guadagnino, il est aussi Paul Atréides, tête d’affiche de la saga de science-fiction Dune de Denis Villeneuve. Avant l’harmonica et la six-cordes de Dylan, Timothée Chalamet avait déjà fait la preuve de ses talents vocaux dans la comédie musicale familiale Wonka.
Génie artistique, plutôt propre sur lui dans cette production d’une filiale Disney, son Dylan ne cache pas totalement sa part sombre. Celle d’un jeune créateur tourmenté et d’une graine de star qui ne se fera jamais à la gloire, sans pitié avec les femmes qu’il fréquente, dont sa première petite amie, jouée par Elle Fanning. C’est cette part de mystère de Bob Dylan, aujourd’hui âgé de 83 ans, qui a attiré le réalisateur. «Bob Dylan aime la musique et aime la partager, mais il n’aime pas avoir à répondre à des questions à son sujet. Sa musique est son cadeau», a-t-il expliqué. «Il a écrit 55 albums remplis de musique personnelle. Mais on continue de dire qu’il est mystérieux.» La charge politique des «protest songs» de l’époque est aussi présente à l’écran, sur fond de lutte pour les droits civiques.
A Complete Unknown, de James Mangold. Ce mercredi sur les écrans.
Pour Timothée Chalamet, le monde a besoin d'un nouveau Bob Dylan
Le monde a besoin d’un nouveau Bob Dylan, a déclaré Timothée Chalamet, en marge de la sortie du film A Complete Unknown. Interrogé au moment où Donald Trump a pris le pouvoir aux États-Unis pour savoir s’il avait plongé avec nostalgie dans les années 1960, où de nombreux artistes comme Dylan ou Joan Baez s’engageaient pour les droits civiques, la star franco-américaine a filé la comparaison avec sa propre génération. «Je pense que s’il y a une nostalgie, c’est que dans les années 1960, ce genre de musique et d’artistes n’avaient pas de précédent», a-t-il répondu.
Ceux-ci pensaient «que les choses pouvaient changer et que l’art pouvait changer un aspect politique ou une attitude culturelle», a-t-il poursuivi. «Aujourd’hui, il y a un cynisme plus fort. Et pour la jeune génération, les obstacles sont peut-être plus intenses que dans les années 1960, qu’ils soient politiques ou environnementaux.» «Il serait bien qu’une figure comme Dylan surgisse, mais, là aussi, il y aurait sûrement du cynisme… Si quelqu’un lance une chanson éthique, optimiste, on pensera qu’il y a un côté « corporate », qu’il le fait dans son propre intérêt.»