La comédie sur les Roms actuellement en salles ne fait pas rire tout le monde…
À bras ouverts, la comédie sur une famille rom avec Christian Clavier, a été conspuée à sa sortie par la critique et par des associations de défense des Roms, même si l’acteur et le réalisateur Philippe de Chauveron (Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu?) se défendent de tout racisme.
Jouant de nouveau du choc des cultures, il imagine cette fois la cohabitation entre un intellectuel «gauche caviar» et une famille rom. «Racisme à haute dose», estime Le Monde, tandis que Le Soir en Belgique évoque «un film pas drôle, voire dangereux». Seul Le Figaro y voit «une vraie comédie de mœurs, sur notre société multiculturelle» et un film qui «fait valser les préjugés et les clichés».
«Nous aimerions bien pouvoir rire, mais la situation ne s’y prête absolument pas», a réagi le Collectif national droits de l’homme Romeurope, dans un communiqué. Et de rappeler que les Roms restent «en tête du box-office des personnes les plus rejetées en France», avec «des incendies de leur habitat précaire» et «des expulsions à répétition sans solution de relogement»…
«Nous avons vu le film ce matin (…) et ça a été une épreuve», indique de son côté l’association La Voix des Roms, évoquant «une représentation fausse», «humiliante» et «traumatisante», sans toutefois envisager de porter plainte. «Les acteurs campent des personnages abjects qui inspirent la haine et le dégoût (…) : ils mangent des taupes, ils boivent du kérosène, ils vivent avec des poules et un cochon», souligne Anina Ciuciu, une des porte-parole.
«Plus c’est gros, plus ça passe !»
Bien avant sa sortie, le film avait suscité la polémique en raison du titre envisagé («Sivouplééé»), jouant de l’image de Roms faisant la manche. Cherchant à déminer le terrain, Christian Clavier a ainsi affirmé sur Twitter que le film est «une comédie drôle, corrosive et bienveillante». «On rit avec et pas contre !», a encore insisté le comédien.
Le réalisateur a lui plutôt insisté sur la collaboration avec un membre important de la communauté rom en Roumanie. «Il avait pour mission de nous dire si ce que nous faisions ou montrions était juste ou pas, tout en sachant évidemment qu’il ne s’agissait pas d’un documentaire, mais d’une comédie !», se défend-il.
À bras ouverts fait le portrait d’un intellectuel de gauche, Jean-Étienne Fougerole, aux faux airs de BHL, qui propose d’accueillir des Roms chez lui, lors d’un débat télévisé où il est pris à partie par un polémiste d’extrême droite.
Vivant coupé des réalités, dans une luxueuse maison en banlieue parisienne (avec domestique), il voit débarquer chez lui Babik (Ary Abittan) et sa famille qui vont poser leur caravane dans le jardin. La cohabitation entre les deux familles va donner lieu à un choc des cultures et à une accumulation de clichés, tant sur les Roms que sur la «gauche caviar».
«Plus c’est gros, plus ça passe !», répète l’éditrice de Fougerole dans le film. Une assertion qui se traduit à l’écran par des personnages avec des dents en or, des scènes de manche musicale dans le métro et des repas à base de taupes. En face : l’univers feutré des Fougerole, avec champagne, mets raffinés, vêtements de marque et idéaux de gauche enterrés. Exploitant le même filon que Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?, le réalisateur égrène, pendant 1h30, les clichés communautaires, avant de céder à un «happy end» autour d’une fête arrosée. «Après une certaine province bourgeoise de droite, ça nous plaisait bien de rire d’un bourgeois parisien de gauche», souligne Philippe de Chauveron, qui s’apprête à écrire une suite au Bon Dieu. Tournage prévu en 2018.
Le Quotidien/AFP