Sur la scène du théâtre à ciel ouvert de Sète, Catherine Ringer fait sien l’hymne à l’amour et à la sensualité d’une poétesse de 98 ans à l’éternelle jeunesse, Alice Mendelson, qu’elle a contribué à faire découvrir.
«Pour bien vieillir, il est bon d’avoir le vice de la joie», a écrit en 2018 Alice Mendelson, ancienne professeure de français née en 1925, qui fut l’amie du père de Catherine Ringer, le peintre Sam Ringer. Cette leçon de vie tout en espièglerie fait partie des poèmes qu’a choisi de mettre en scène la chanteuse en congés des Rita Mitsouko, qui faisait escale la semaine dernière au festival de poésie Voix vives de Méditerranée en Méditerranée.
En longue robe rouge et talons hauts, Catherine Ringer y présentait au Théâtre de la Mer L’Érotisme de vivre, spectacle qu’elle avait créé en 2021 pour soutenir le Théâtre de La Huchette, à Paris, en mauvaise posture après la crise du covid. «Ils avaient des problèmes financiers et ont demandé à des personnalités de faire des cartes blanches. J’ai pensé aux poèmes d’Alice», a raconté la musicienne, venue rencontrer son public dans un parc ombragé de Sète, dans l’Hérault, au lendemain de sa représentation.
Les deux femmes s’étaient croisées il y a plus de 30 ans. «À la mort de mon père, en 1986, j’ai voulu rencontrer les gens qui le connaissaient hors du contexte familial», se souvient-elle, en évoquant une «toute petite dame», un «être de lumière» qui «irradie». Mais la poésie d’Alice Mendelson, composée dès son plus jeune âge, n’avait jamais été publiée et Catherine Ringer, pas plus que quiconque, n’en avait alors connaissance. C’est le conteur Pascal Quéré qui lui a fait découvrir les textes de l’ex-professeure de français, devenue conteuse et animatrice d’ateliers d’écriture à l’âge de la retraite.
Éveil à la sensualité
Les plus anciens poèmes, que Catherine Ringer récite et parfois chante sur scène, remontent aux années 1940. Ils accompagnent l’éveil à la sensualité d’une toute jeune femme, tandis que ceux de la force de l’âge chantent sans détour la chaleur des corps, du sien et de ceux des hommes. Les plus récents, teintés d’humour et de malice, datent d’il y a à peine deux ans. «Cela fait du bien d’avoir un peu de paroles fraîches et chaudes à la fois», dans une «époque où l’on s’interdit parfois des choses», estime Catherine Ringer, accompagnée sur scène par le pianiste Grégoire Hetzel.
«C’est une poésie simple d’accès, tout en étant élaborée, et avec quand même une bonne dose d’érotisme», souligne l’auteure des tubes Andy et C’est comme ça, où la sexualité est bien présente. «J’ai toujours aimé le rythme des mots, j’aime bien improviser en rimes, même en plein concert.» «Je pense que la poésie a de tout temps fait partie des activités humaines. Il n’y a pas forcément besoin de l’écrire, il suffit d’avoir une bouche qui la dit et une oreille qui l’écoute, ou même d’être seul», poursuit Catherine Ringer.
Nouvelles chansons
De là à écrire ses propres poèmes ? «De la poésie toute seule, à lire comme ça ? Non, je n’en n’écris pas», souligne-t-elle. «Certaines chansons sont des poèmes, d’autres pas», ajoute celle qui termine sa représentation par quelques reprises, d’une voix profonde et maîtrisée, de Mouloudji, Brassens et, bien sûr, des Rita Mitsouko.
«En même temps que je tourne avec ce spectacle, je fais de nouvelles chansons qui, j’espère, sortiront bientôt», souffle l’artiste, sans préciser si ces nouvelles compositions relèveront du rock, du jazz, de la chanson ou de la musique classique, influences qu’elle cite pêle-mêle. «J’ai toujours fait des choses assez variées. Pour moi, c’est indispensable de faire des choses différentes», se contente-t-elle de dire.
Catherine Ringer interprètera la poésie d’Alice Mendelson au Québec en septembre, puis en tournée à travers la Belgique et la France cet hiver.