Le dépistage organisé du cancer du sein en France n’a pas permis de diminuer la fréquence des interventions les plus lourdes, telles que les ablations totales du sein, conclut une étude publiée jeudi, qui va à l’encontre des arguments des promoteurs de ce programme.
« Nous avons (…) constaté qu’aucune diminution des mastectomies, totales ou partielles, ne pouvait être mise en évidence après la généralisation du dépistage organisé », expliquent les auteurs de l’article, à paraître dans la revue Médecine à la fin du mois et mis en ligne jeudi. « Au contraire, le nombre de mastectomies totales et le nombre de mastectomies partielles continuent tous deux à augmenter », ajoutent les cinq auteurs, membres du collectif Cancer Rose, pour qui le dépistage organisé pourrait contribuer à cette augmentation par le biais des surdiagnostics.
On parle de surdiagnostic en cas de détection, puis généralement de traitement, de tumeurs qui n’auraient jamais évolué en cancer déclaré durant la vie de la patiente.
Depuis 2004, toutes les femmes de 50 ans à 74 ans se voient proposer de réaliser tous les deux ans des mammographies de dépistage, prises en charge à 100%. L’un des arguments avancé par les autorités sanitaires est que ce dépistage organisé permet un diagnostic plus précoce et détecte des tumeurs plus petites, aboutissant à des traitements moins agressifs.
Pour évaluer cette affirmation, les auteurs ont analysé la base de données de l’Assurance maladie qui compile depuis 2000 tous les actes chirurgicaux réalisés dans les établissements de santé français.
Le nombre de cancer a augmenté
Il en ressort qu’au cours de ces quatre dernières années, on a réalisé en moyenne 19.966 mastectomies totales par an, contre 18.351 annuelles au cours des quatre années ayant précédé la généralisation du dépistage organisé (2000-2003), soit une hausse de 8,8%.
Certes, dans le même temps, le nombre de cancers du sein diagnostiqués chaque année a augmenté. Mais, même rapporté à ce chiffre, le compte n’y est pas, a expliqué à l’AFP l’un des auteurs, Vincent Robert, chef du département d’information médicale des Hôpitaux Robert Schuman, au Luxembourg.
En 2000 comme en 2012, pour 100 cancers du sein invasifs diagnostiqués, on réalise toujours 40 mastecomies totales, ajoute le spécialiste du codage statistique des actes médicaux et chirurgicaux.
Il faut donner ces informations aux femmes « en amont, avant qu’elles ne fassent le dépistage », a estimé Cécile Bour, présidente de Cancer Rose. Et si l’on est en bonne santé, sans aucun facteur de risque, « il n’est pas déraisonnable de ne pas se faire dépister », a ajouté la radiologue, interrogée par l’AFP.
Le Quotidien / AFP