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Camille Cottin : «On est tout entier sur scène !»


Pour Camille Cottin, «le théâtre, c'est le plaisir de partager un moment unique et instantané avec le public», qui en appelle à «l'engagement du corps». (Photo : aloïs aurelle)

Figure du cinéma hexagonal, et même international, la comédienne étonne et détonne pour son retour sur les planches, à travers un texte coup-de-poing qui manie l’humour noir et la poésie. Entretien.

Elle confie : «Au théâtre, j’aime partager un moment unique et instantané avec le public». L’actrice Camille Cottin revient sur les planches, six ans après sa dernière apparition, dans un seule en scène racontant l’histoire peu banale d’une jeune Allemande souhaitant se faire greffer un pénis circoncis. Le Rendez-vous, adaptation du roman à succès The Jewish Cock (2021) de l’Allemande Katharina Volckmer, traduit dans une quinzaine de pays, se joue actuellement au théâtre des Bouffes du Nord à Paris jusqu’au 25 janvier, puis sera en tournée dans une vingtaine de villes jusqu’en avril.

Connue pour son personnage de «Connasse» ou encore pour son rôle d’agent artistique dans la série au succès international Dix pour cent, la comédienne chemine, ici, sur un petit monticule de tissus violet et autour d’un rideau de même couleur. Des partenaires de jeu dans lesquels elle se cache, se coule, se drape, se réfugie. Vêtue d’un bermuda treillis et d’un bomber par-dessus une combinaison de latex rouge, elle adresse tout haut ses confidences à son gynécologue juif, le Dr Seligman, dont on entend seulement la voix. Elle lui raconte son mal-être d’être un «garçon coincé dans un corps de fille», sa relation à l’amour, à Dieu, ses rêves hitlériens absurdes, ou encore la culpabilité éprouvée pour le passé nazi des générations antérieures.

Pourquoi avoir voulu adapter ce roman au théâtre?

Camille Cottin : J’ai eu envie de partager ce texte, très singulier. J’ai été très sensible à l’énergie, au style littéraire parfois cru, à la poésie qu’il dégage… Mais aussi à toutes les questions qu’il soulève, les injonctions, le cadre, le désir d’émancipation, sa dimension féministe également. La façon dont l’auteure, Katharina Volckmer, explore ce corps, en transformation perpétuelle, sous toutes ses dimensions, m’a aussi beaucoup touchée : le corps de l’enfant, le corps de l’adolescente, le corps sexuel, le corps comme objet politique, le corps féminin, le corps comme nation… Elle utilise l’humour comme forme de résistance, qui jaillit pour briser les tabous, contrer le réel, dans une forme d’acceptation.

Au début, j’étais un peu inquiète d’être seule en scène

Un sujet pas si évident à jouer sur scène, non? 

Oui. Au début, je ne savais absolument pas comment interpréter ce personnage – j’étais même un peu inquiète d’être seule en scène – mais j’étais assez certaine que l’envie d’adapter ce roman au théâtre serait accompagnée d’une envie de recréer un univers, un corps en mouvement. Je suis alors allée chercher Jonathan Capdevielle (NDLR : metteur en scène de la pièce, artiste associé au théâtre de Gennevilliers) dont l’univers onirique porte toutes ces dimensions.

Dans ce texte, le poids du passé nazi de l’Allemagne est également omniprésent…

J’ai aimé à quel point nos sociétés contemporaines résonnent des sociétés passées et la difficulté qu’elles ont à s’en libérer. Et à quel point ça infuse, de manière permanente, tant dans l’intime que dans le collectif.

Cela fait six ans que vous n’avez pas joué au théâtre, vos premières amours de comédienne. Quelle sensation ressentez-vous?

Ça me fait très plaisir! J’adore les plateaux de cinéma. Mais le théâtre, c’est le plaisir de partager un moment unique et instantané avec le public, c’est immense et c’est une sensation exclusive. J’aime beaucoup l’engagement du corps qu’appelle le théâtre puisque, là, on n’est pas vu à travers le prisme d’une caméra, d’un angle, d’un regard, d’un cadre… On est tout entier sur scène et on partage une expérience collective entièrement, qui implique tout le corps.

Quels sont vos projets pour la suite? 

Il y a trois films dans lesquels je joue qui vont sortir cette année : Rembrandt (de Pierre Schoeller), un long métrage de la réalisatrice Tamara Stepanyan et Les Enfants vont bien de Nathan Ambrosioni. J’espère qu’il y aura d’autres aventures théâtrales. J’adore le cinéma et le théâtre. Si je peux avoir la chance de continuer à faire les deux, je le ferai avec beaucoup de joie.

Où en est le projet d’adapter la série Dix pour cent aux États-Unis, qui s’appellera Call my Agent?

C’est en voie d’élaboration. Ce n’est pas encore concrétisé!

«Le Rendez-vous»
Jusqu’au 25 janvier.
Théâtre des Bouffes du Nord – Paris.

Du 11 au 22 mars.
TNS – Strasbourg.