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Ben Affleck, par amour des gangsters movies


Ben Affleck le réalisateur n'a pas résisté au charme de Ben Affleck l'acteur, présent dans quasiment tous les plans du film. (photo DR)

Pour « Live by Night », sa quatrième réalisation, l’acteur Ben Affleck a voulu un film précis et élégant dans le monde des voyous des années 1920. Pas une réussite !

Une confidence : «J’ai essayé de voir grand…» Et Ben Affleck, acteur américain de 44 ans, quatre films en tant que réalisateur, de présenter Live by Night – sa quatrième réalisation en salles cette semaine : «Je suis attiré par le film de genre, j’ai voulu faire quelque chose de différent par rapport à mes trois précédents longs métrages. Live by Night, c’est d’abord ma lettre d’amour aux gangsters movies de la Warner, ces films avec des enjeux moraux très forts, mais qui n’hésitent jamais à être sexy, flashy, fun…»

Encore Affleck : «Live by Night est beaucoup plus formel, j’espère beaucoup plus élégant et plus designé que tout ce que j’ai pu réaliser jusqu’ici. Plus précis dans sa construction également. Là, j’ai fait un story-board, je voulais moins de coupes au montage pour impliquer plus le spectateur, j’ai utilisé des cadres plus larges, comme dans les vieux films. Aujourd’hui, on ne fait que des plans très serrés. Moi, j’aime les superproductions romanesques des années 70, Le Docteur Jivago ou Reds. Avec de l’ampleur…»

Vengeance et trahisons à gogo

Dans son premier passage à la réalisation, Gone Baby Gone, Ben Affleck plongeait dans l’univers de l’écrivain de Boston Dennis Lehanne et signait un polar moral. Cette fois avec Live by Night, il adapte encore Lehanne pour présenter une tragédie mafieuse dans l’Amérique de la prohibition, avec costumes et décors coûteux. Cette fois encore, Affleck s’offre le premier rôle : celui d’un vétéran désabusé de la Première Guerre mondiale et du fils d’un chef de la police, qui se tourne vers le crime. Il y a aussi deux femmes : une fatale (incarnée par Sienna Miller) et une dont il tombe amoureux (jouée par Zoe Saldana).

Ainsi, le réalisateur a suivi assez fidèlement le roman de Dennis Lehanne – on est donc à Boston dans les années 1920. Bien sûr, c’est le temps de la prohibition; qu’importe ! L’alcool, il y en a dans les bars clandestins tenus par la mafia…

Dans ce Boston, on peut avec un soupçon d’audace et d’ambition s’octroyer une belle place – ce que va faire Joe Coughlin, ce fils de flic qui va choisir le crime. Problème : la morale, il n’en a que faire et va donc bafouer le code d’honneur en vigueur chez les voyous. Il devient l’ennemi d’un gros caïd, il lui a volé son fric et… sa petite amie. Conséquence : vengeance, trahisons, ambitions contrariées… Joe n’a d’autre solution que quitter Boston. On le retrouve à Tampa, en Floride, là où il va devenir incontournable dans la mafia locale…

Un nouveau Once upon a Time in the West !

Commentant Live by Night, Ben Affleck a expliqué : «Mon film, c’est une nouvelle version d’Once upon a Time in the West !» Avec un budget de 65 millions de dollars (environ 52 millions d’euros), l’acteur-réalisateur a veillé aux décors, aux costumes et surtout, charme obligé des gangsters movies, aux voitures. Ainsi, il a décidé de casser la tradition du genre avec les voitures sombres, puisqu’il a opté pour des véhicules colorés.

Pour des véhicules qui symbolisent l’ascension de Joe Coughlin durant ses «années Tampa» – un coupé décapotable Franklin 1928, une Lincoln Model K 1931 (une voiture à quatre sièges, un «must» à l’époque), une Packard Twelve 1933 (la voiture de luxe de l’époque)… Mais, et c’est dommage, Live by Night a les allures d’une longue nuit blanche.

On sent bien que Ben Affleck sait tenir une caméra et monter un film, qu’il a aussi beaucoup regardé un maître du genre, Martin Scorsese. Toutefois, il est tombé dans deux pièges. Là où il aurait pu dérouler une belle série pour la télévision, il a enfermé son récit dans un film d’un peu plus de deux heures (quand même!). Ensuite, Ben Affleck le réalisateur n’a pas (ou pu ?) résister à Ben Affleck l’acteur quasiment de tous les plans, mais amputé de toute contradiction, de toute ambiguïté, de toute dimension…

De notre correspondant à Paris Serge Bressan