Avec Le Oki d’Odzala, A. Dan signe un docu-fiction de toute beauté, écolo et prenant autour des gorilles et des légendes du parc Odzala en République du Congo.
Manuel est auteur de BD. Pour une commande, il doit suivre Clémence, primatologue spécialiste des gorilles du Congo-Brazaville pour une mission de surveillance des gorilles du parc Odzala: naissances, mortalité, impact du virus Ebola, création de cartes d’identité génétique, etc.
Faute de financement, cette mission s’annonce comme la dernière, à moins que Clémence parvienne à démontrer l’existence d’un gorille blanc. Mais ce qui la préoccupe en premier lieu, c’est le braconnage massif qui s’intensifie dans le parc. Tandis que Manuel, lui, s’intéresse beaucoup aux différentes légendes locales.
« En faire plus »
Un scientifique et un conteur ne font pas nécessairement bon ménage. Deux mondes s’opposent. La rigueur analytique de l’un face à la tradition orale de récits (dont l’origine reste floue) de l’autre. Mais A. Dan (Pour un peu de bonheur, Thoreau, La Vie sublime, Jazz…) a réussi à les réunir avec succès dans cet Oki d’Odzala.
Un album né à la suite de Des gorilles et des hommes (2015), carnet de voyage publié chez La Boîte à bulles où il racontait son voyage de deux mois au Congo-Brazzaville en compagnie d’une équipe de primatologues bretons. «Mais je voulais en faire plus, explique l’auteur dans ses notes d’intention. Écrire et manier encore les pinceaux et l’aquarelle, développer une histoire plus personnelle avec des ingrédients plus seulement scientifiques, mais aussi ceux que j’ai découverts là-bas : le braconnage et les contes africains.»
Une réalité… enrichie
Chose promise, chose due. Et l’auteur, A. Dan, semble être un homme de parole. La rigueur scientifique autour de la surveillance des animaux du parc, principalement les gorilles, mais aussi les éléphants, en grande partie tirée du vécu de l’auteur pendant son voyage à Odzala, instruit le lecteur.
Les bandes armées vivant du braconnage et qui déciment sans vergogne éléphants comme grands singes choquent, tandis que les légendes liées aux grands animaux de la forêt africaine passionnent. Conteurs, sorciers, puissances vaudoues… tout est là pour enrichir finalement, sans jamais la détourner, la réalité.
L’album est d’une grande beauté, ses personnages sont attachants et le récit prenant. Du coup, ses 92 pages bien denses se lisent sans souci d’une traite et avec bonheur.
Pablo Chimienti