C’est une tradition. Tous les ans, un des grands rendez-vous du Lux Film Fest, c’est sa soirée dédiée aux courts métrages luxembourgeois.
C’est la foule des grands soirs, comme tous les ans, qui s’est rendue lundi soir à l’Utopolis pour découvrir la sélection de courts métrages grand-ducaux qui devraient représenter la crème de la production cinématographique des grands réalisateurs nationaux de demain.
Mais parfois, la crème peut se révéler épaisse et peu digeste. Et c’était un peu le cas cette fois-ci. Pendant près de deux heures, les spectateurs – souvent acquis à la cause, ayant pour beaucoup participé à l’un ou l’autre film présenté – ont eu droit à des films à la réalisation hésitante, avec des scénarios bâclés, à des situations rapidement stagnantes ou encore à des dialogues ou des personnages très premier degré et à des kilomètres de tout réalisme.
Certes, parmi les six courts métrages du soir, quatre sont des premiers films, voire des films de fin d’études, mais le problème demeure. Cela étant dit, tout n’est pas à jeter avec l’eau du bain!
La soirée a débuté avec Aus den Aen, de Nadia Masri (une production Amour Fou). Pol est un jeune homme qui parvient à maîtriser ses problèmes intérieurs en s’isolant dans sa belle voiture et en écoutant de la musique. On commence à comprendre pourquoi quand Jérôme, un demi-frère qu’il n’a jamais connu, prend contact avec lui. Des retrouvailles qui ne vont pas se faire sans difficulté. Techniquement, le film est maîtrisé, Luc Schiltz est très bien dans le rôle principal, mais la facilité avec laquelle le personnage de Jérôme s’ouvre à lui, raconte ses galères, ses problèmes, etc. sonne faux.
Dans Casting a Woman (Amour Fou), Caroline Cox jette un regard acerbe sur la manière dont fonctionnent les castings de cinéma. Elle met en scène un atelier de préparation à un casting, où 9 jeunes femmes s’entraînent pour obtenir, un jour peut-être, le rôle de leur vie, quitte à supporter vexations et humiliations de la part de l’animatrice du stage, qui de son côté ne cesse de leur répéter «Be strong», «Never give up». Le postulat de base est intéressant, mais très rapidement le film se fige et se répète. Dommage, le début – le pré-générique surtout – était drôle et intéressant.
Heureusement, il y a Quenottes
Dans Et wor alles wei ëmmer, Max Jacoby (Les Films Fauves), propose, lui, une nouvelle version du retour de l’enfant prodigue, avec Jérôme, étudiant en Autriche, qui revient au Luxembourg et à la ferme familiale à la suite de la disparition de Marie. Là, il retrouve son père taciturne et Céline, une jeune fille du village qui aide à la ferme de Jérôme par amour pour lui. Si les dialogues empreints de sénilité de la grand-mère de Jérôme peuvent faire sourire, le film ne va nulle part. Reste l’image, avec cette caméra qui bouge presque constamment et sans vraiment de raison et un grain à la longue désagréable.
Summer Leaves, produit par The London Film School, est signé Diana Nilles. On y suit la relation entre Henry, un vieux paysan qui doit vendre sa ferme qui n’est plus viable, et sa citadine de fille, autre enfant prodigue, qui vient lui donner un coup de main, dans l’espoir de connaître les projets futurs de son paternel. Si les images sont belles, le son laisse à désirer avec des bruits de fond qui couvrent bien souvent les dialogues, ce qui ne facilite pas la compréhension du spectateur.
Une compréhension pour le moins compliquée également dans le film de Marylène Andrin-Grotz, Tout est calme (Les Films Fauves). On y suit les péripéties estivales en Champagne de Juliette. Elle vit avec deux garçons, un frère et un autre dont on ne sait pas grand-chose, si ce n’est qu’il n’a plus toute sa tête. Elle en voit aussi régulièrement un troisième, dans un camping-car. Un jour, la police débarque chez elle et embarque son frère. Pour le reste, le scénario est obscur et alambiqué.
Bref, trop souvent ces films se résument à une situation initiale, un problème qui se présente, un tout petit développement et une fin pas toujours à la hauteur.
Reste Quenottes, de Pascal Thiébaux, coréalisé par Gil Pinheiro (Zeilt Productions). Un petit film qui, bien qu’il débute comme un film normal, bascule ensuite vers le fantastique et s’amuse à détruire le mythe de la gentille petite souris des dents. On aime ou pas son côté trash, mais le film est maîtrisé aussi bien au niveau du scénario, de la mise en scène, des effets spéciaux, de l’image, du son… Le film est d’ailleurs en lice, tout comme celui de Max Jacoby, pour le Lëtzebuerger Filmpräis du meilleur court métrage, qui sera remis samedi.
Pablo Chimienti