Surfer par un vent d’hiver glacial. Sur l’archipel norvégien des Lofoten, même latitude que le nord de la Sibérie, des amateurs du monde entier bravent le froid intense pour pratiquer leur passion dans une nature préservée et spectaculaire : eaux limpides, horizon immense et montagnes enneigées.
Loin des spots bondés du sud, ils goûtent ce plaisir particulier lié à l’effort, le sentiment de « partir en expédition » et les joies de se réchauffer après au coin du feu, comme après le ski. Ici, le surf est un art de vivre, une forme de méditation pour les uns, une fatigue saine et vivifiante pour les autres. Portraits de quelques-uns de ces surfeurs de l’extrême :
Ellen Holgersen, 32 ans vétérinaire. « J’ai déménagé plusieurs fois en fonction du surf, y compris dans le choix de mes lieux d’études. Je préfère le froid, c’est comme ça que j’ai atterri ici. J’ai vécu dans des endroits où tu peux sortir de chez toi et te mettre à l’eau mais c’était comme aller dans une salle de sports, trop simple, avec trop de monde. Ici on a l’impression de partir en expédition. J’adore sortir de l’océan dans le froid, tu dois te changer super vite et après tu mets tes pieds dans une bassine d’eau bouillante, devant le feu. En hiver, on de belles journées ensoleillées, pas de foule, un paysage à couper le souffle, la totale. »
Ole Kristian Fjelltun-Larsen, 34, patron d’un café et de chambres d’hôtes. « Le surf pour moi c’est du sport et de la détente. L’hiver c’est un défi, ça devient une forme extrême de méditation, un contact intense avec la nature. Physiquement c’est une épreuve, ton corps brûle beaucoup d’énergie pour maintenir ta température, c’est super fatiguant. Mais ton esprit se détend, t’oublies plein de choses, tu retrouves le calme, les gros problèmes deviennent moins encombrants. La sensation après est super bonne. C’est drôle, tu te dépêches toujours d’arriver à la plage en voiture. Mais quand tu repars, tu roules tout doux. »
Un peu givrés, ces surfeurs !
Nils Blom, Suédois de 38 ans, cuisinier à Hanningsvaer. « Moi, c’était un rêve de môme. J’ai vu Point break, film culte, quand j’avais une dizaine d’années. Pour moi, qui grandissait à la campagne, c’était totalement exotique. Je faisais du skate déjà et me suis juré qu’un jour je ferais du surf. Après l’école, j’ai voyagé et surfé un peu partout avant de me rendre compte qu’il y avait de bonnes vagues en Suède et en Norvège. Je suis devenu accro au surf en eaux froides et au style de vie qui va avec, décontracté et loin de toute foule. »
Hæge Cecilie Forfang, 28 ans, physiothérapeute à l’hôpital. « Pour moi c’est l’opportunité d’observer les changements de saisons, du soleil de minuit estival à l’hiver glacial et sombre. Je suis venue ici pour mon métier du sud de la Norvège, je devais rester trois mois, cela fait cinq ans maintenant. Je n’ai aucune intention de repartir. En hiver, cela peut paraître décourageant vu de l’extérieur, mais l’eau n’est pas si terrible, tu as seulement froid au moment où tu enlèves ta combi et que tu te changes. Seul ton visage exposé gèle mais ça reste une sensation agréable, on se sent en vie ! »
Lisa Blom, 38, gérante d’hôtel à Kabelvag. « C’est la vie même. Indispensable pour moi, comme respirer, manger, dormir, passer du temps en famille. Les vagues sont meilleures l’hiver, c’est plus costaud, plus régulier. Et quand tu ne surfes pas, il y a plein d’autres choses à faire ici, de la randonnée, du ski, du kayak, du paddle, de la pêche… Les Lofoten, c’est une grande cour de récré pour adultes.
Le Quotidien/AFP