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Alcool : un mois pour lever le pied au lieu de lever le coude


L'idée est notamment de résister au "verre automatique, quand on sort et qu'on nous dit : Pourquoi tu bois pas ce soir ? T'es malade ? T'es pas drôle". (illustration AFP)

Êtes-vous capable d’arrêter l’alcool, ou au moins de réduire votre consommation, pendant un mois ? C’est le « Défi de janvier » que propose à partir de mercredi une trentaine d’associations sur le modèle d’une opération anglaise, au grand dam du lobby du vin.

« C’est une campagne mobilisatrice, ludique, pour s’essayer individuellement et collectivement à une pause pendant un mois, après la période des fêtes », explique Nathalie Latour, déléguée générale de la Fédération addiction, l’une des associations organisatrices. « Étape après étape, arriver à l’interdiction de consommation, c’est ça qui est derrière », juge de son côté Bernard Farges, président de la CNAOC, confédération qui regroupe les 17 principales régions viticoles françaises à appellation, soit 70% des viticulteurs du pays.

Adaptation de l’opération « Dry january » (littéralement « Janvier sec ») lancée en 2013 en Angleterre, le « Défi de janvier » est depuis des mois dans le collimateur du secteur de l’alcool, et en particulier du monde du vin. Selon les associations organisatrices, le projet, inédit en France, aurait initialement dû être porté par l’État. Mais elles l’accusent d’avoir renoncé mi-novembre après une rencontre entre Emmanuel Macron et les producteurs de champagne.

Le 16 décembre, le conseil municipal d’Épernay, haut lieu du prestigieux vin pétillant, a même adopté un vœu pour marquer son opposition au « Défi de janvier », assimilé à de la « prohibition ».

« Pourquoi tu bois pas ce soir ? T’es malade « 

« Il n’y a aucune volonté de prohibition ni d’abstinence totale, ce n’est pas du tout une campagne moralisatrice ni hygiéniste », se défend Nathalie Latour. « Ces produits ont une place importante dans la culture française. Mais il faut équilibrer les enjeux économiques, sociaux et de santé », assure-t-elle. « Contrairement au Mois sans tabac (organisé par les pouvoirs publics en novembre), l’objectif n’est pas l’arrêt total : il s’agit de faire une pause, de regarder les moments où on ne consomme pas par plaisir mais par incitation », poursuit-elle. « C’est le verre automatique, quand on sort et qu’on nous dit : Pourquoi tu bois pas ce soir ? T’es malade ? T’es pas drôle. »

Le « Défi de janvier » s’appuie sur un site internet (dryjanuary.fr) où l’on peut s’inscrire et trouver des dépliants et des posters. « Les restaurants, les collectivités qui le souhaitent peuvent les imprimer et les afficher », selon Nathalie Latour. On peut également y télécharger une application en anglais baptisée Try Dry. Créée par l’association Alcohol Change, à l’origine du « Dry january » anglais, elle permet d’aider à atteindre ses objectifs lorsqu’on diminue ou arrête sa consommation d’alcool.

Pour cette première édition, Nathalie Latour espère « atteindre les mêmes chiffres qu’en Angleterre en 2013 », soit 4 000 inscrits sur le site (en sachant qu’on peut participer au défi même sans être inscrit). Selon elle, ce type de campagne existe dans 14 pays, dont la Belgique (où elle s’appelle « Tournée minérale »). « Les résultats sont intéressants, à court et moyen/long terme : les personnes qui ont participé arrivent ensuite à mieux réguler leur consommation d’alcool », assure Nathalie Latour.

Parmi les organisateurs du « Défi de janvier », on trouve des associations d’addictologues ou dédiées à la santé (comme la Ligue contre le cancer), mais aussi des mutuelles et des groupements de jeunesse. La consommation d’alcool est à l’origine de nombreuses maladies (cancers, maladies vasculaires, etc.) et est responsable de 41 000 morts par an, ce qui en fait la deuxième cause de mortalité évitable après le tabac (75 000), selon l’agence sanitaire Santé publique France.

LQ/AFP