Nu Genea, le duo composé des Italiens Massimo Di Lena et Lucio Aquilina, a sorti le 13 mai l’album Bar Mediterraneo (disco/funk, NG Records).
Il est réjouissant d’observer cette tendance tenace à se tourner vers le passé pour mieux inventer l’avenir. Et comment certaines musiques, jusque-là contenues dans les étroites sphères folkloriques, trouvent aujourd’hui un écho universel et des pistes d’expression multiples.
D’étonnantes renaissances qui doivent notamment leur sursaut aux «diggers», fouilleurs de bacs inlassables et dénicheurs de trésors qui ont pris la poussière depuis trop longtemps. Massimo Di Lena et Lucio Aquilina sont de cette trempe. Un duo curieux tout droit venu de Naples, mais qui a l’esprit bien plus large.
Également musicien et DJ, le tandem s’est vite trouvé une passion commune pour la scène locale, période 70-80, et pour toutes les sonorités de la Méditerranée. Sur ses platines se mélangent sans retenue sonorités maghrébines, turques, grecques et forcément napolitaines, pour un voyage sans frontières.
Un cocktail savant aux multiples couleurs
Quelques anciennes productions témoignent de cette envie d’horizon sans fin, comme Tony Allen Experiments (2015), autour du regretté batteur d’afrobeat, et Nueva Napoli (2018), un premier album déjà joliment métissé, estampillé Nu Guinea, leur premier nom.
Car en changeant d’appellation, Massimo Di Lena et Lucio Aquilina ouvrent grand les chakras et les possibilités (Nu Genea pourrait se traduire par «nouvelle origine»). L’intention est évidente : proposer un bouillon de culture plus foisonnant encore et développer un son intemporel dont l’épicentre serait Naples, port d’attache de ces archéologues futuristes.
Bar Mediterraneo ne s’en cache pas et délivre un cocktail savant aux multiples couleurs, fait de disco, de funk, de boogie, de jazz et d’électronique, enrichi de rythmes africains, caribéens et cubains. Alors que le premier disque du duo se chantait exclusivement dans le dialecte local, celui-ci prend des accents bigarrés, avec des paroles en français ou encore en tunisien.
Basse ronde, percussions légères
Bien sûr, Nu Genea ne pouvait pas se permettre de négliger ses origines et les célèbre avec de superbes morceaux pleins de soleil comme Tienaté (interprété par Fabiana Martone), Rire (avec le Sicilien Marco Castello) et le bien nommé Vesuvio, réadaptation pour la piste de danse d’une chanson d’un groupe ouvrier de Pomigliano D’Arco (E’ Zezi).
À son rythme, tantôt à la cool, tantôt ondoyant, le disque enchaîne les titres comme autant d’antipastis, avec des constantes toutefois : une basse ronde, des percussions légères, une rythmique élégante, des synthétiseurs défrisants, des guitares aguicheuses et d’autres artifices séducteurs (mandoline, flûte, chœurs d’enfants…).
Avec pour décor l’énorme étendue bleue filmée par Paolo Sorrentino depuis une barque glissant le long de la côte amalfitaine, ce Bar Mediterraneo pourrait se voir comme un lieu où il y a du plaisir, de la danse et beaucoup de soleil.
Un endroit à la cool
Un endroit à la cool, branché et élégant, fait sur mesure pour les rencontres d’un soir, les coups du destin et les amours fugaces, la joie, le mélange et le lâcher-prise. Là, le son du monde vous câline, le groove vous berce et le rythme vous rafraîchit.
Alors, on s’y installe, on s’évade et on s’y perd, les pieds calés sans certitude sous le bar, pour se délecter d’un Spritz glacé et regarder, un peu pompette et bercé par le bruit lointain des vagues, le monde qui s’agite dans une douceur estivale.
Avant de prolonger la nuit, on se dit que celui-ci est plutôt bien fait et que cette âme méditerranéenne (avec ses infinies facettes) a quelque chose de réconfortant. Au moins jusqu’au lendemain.