Retrouvez notre critique de Mydnight, le dernier album de Myd.
Plus il est habillé, plus il est d’humeur à la fête. C’est le monde à l’envers? Non, c’est Myd, qui après avoir posé les fesses à l’air sur la pochette de son premier EP (All Inclusive, 2017) puis en maillot de bain, assis dans une piscine à remous, sur son premier album (Born a Loser, 2021), apparaît cette fois entièrement vêtu – bien qu’on devine que, sous le t-shirt jaune moutarde, il doit transpirer. Et pour cause : Mydnight, c’est l’ode de cet oiseau de nuit aux clubs electro, qui ouvrent généralement quand la plupart des gens vont se coucher et qui ferment quand le matin est déjà bien entamé. Un faux changement de paradigme pour le Français, de son vrai nom Quentin Lepoutre, qui s’est certes fait connaître avec une electro-funk ensoleillée, mais qui a passé la majeure partie de son temps à mixer pour les foules nocturnes.
En fait, c’est dans cette dernière configuration qu’il s’est notamment illustré ces quatre dernières années, entre tournées accompagnant son premier album et DJ sets aux quatre coins du monde, le plus souvent au-delà de l’heure du crime. Chaque prestation comme un instantané de vie, dont le musicien a grappillé les ambiances, les humeurs, les échanges de petits mots (avec les fans, les organisateurs, les collègues artistes rencontrés au gré des voyages)… Résultat : de retour en France, Myd s’enferme dans son «home studio», libérant dans la musique ces émanations célestes qu’il avait gardées collées au corps et à l’esprit.
Puisque Mydnight est principalement un album taillé pour les clubs et les soirées «house», il se place naturellement sous le signe des «beats» tapants et soutenus, mais l’énergie intarissable délivrée par ces folles rythmiques n’y change rien : la patte de Myd est partout, si bien qu’on la reconnaît immédiatement. Ainsi, l’«opener» Our Home, l’une des nombreuses pépites remuantes du disque, joue avec les mots : son «home studio» est une ouverture sur le monde, qu’il a découvert avant de ramener, chez lui, un nouveau son en conséquence. L’humour et le second degré, une marque de fabrique du garçon, sont toujours là, mais si Myd en avait jadis fait une arme avec laquelle poser en gentil trublion, elles deviennent désormais un instrument subtil qui lui permet, non plus de jouer de son image de clubber «à la cool», mais de revenir à une forme d’honnêteté totale. Même dans les titres les plus délirants (un A.M.E.R.I.C.A. sous acide, deux «bangers» qui fleurent bon l’euphorie des années 1990, Make Me Feel Alive et le bien nommé Sweatin’, ou The Wizard, dernier titre du disque et de loin le plus furieux), on entend Myd, mais on devine Quentin.
Myd fait infuser dans sa musique des instantanés de vie grappillés autour du monde
De la même manière, le sample de disco kitsch, typiquement «French Touch», autour duquel est construit Song for You, est l’ingrédient magique qui donne à ce morceau purement house sa dimension romantique. Idem pour le joliment pop 9am, avec sa guitare électrique un brin mélancolique, que n’aurait pas renié un Mac DeMarco. Dans 9am (avec un couplet du chanteur italien Calcutta) comme dans les autres «featurings», Myd donne de la largesse à ses invités. Le meilleur exemple reste All That Glitters is Not Gold, avec le rappeur star argentin Trueno et le nouveau génie de la house, le Californien Channel Tres : une preuve de plus que l’univers de Myd, déjà bien défini, a faim d’interventions extérieures pour continuer à se nourrir.
Ce qui nous amène aux conditions de réalisation du disque : à un mois de sa sortie, Myd perd son disque dur et doit tout reprendre à partir de démos inachevées. Et a l’idée, folle mais brillante, de le faire en live, sur la plateforme Twitch, avec cinq caméras qui le filment dans son studio 24 h/24, siestes comprises, pendant une semaine, histoire de respecter sa «deadline». Certaines idées des quelque 100 000 abonnés ayant rejoint le «livestream» ont même fini dans l’album. On croit Pedro Winter, icône de la «French Touch», boss du label Ed Banger et mentor de Myd, quand il définit son poulain comme «un peu gauche», et disait qu’il avait été séduit par «son côté Peter Sellers». À voir sa faculté dingue à résoudre ses gaffes, cela nous fait l’aimer encore plus.
Myd. Mydnight. Sorti le 29 août. Label Ed Banger Records. Genre electro