Le robot Opportunity, qui roulait sur Mars depuis 2004 et a confirmé que de l’eau y coulait autrefois, devait être déclaré mort mercredi par la NASA, marquant la fin officielle d’une des missions les plus fructueuses de l’histoire de l’exploration du système solaire.
Le contact est perdu depuis le 10 juin 2018, quand une tempête de poussières a englobé la planète rouge, obscurci l’atmosphère pendant plusieurs mois et empêché le rover de recharger ses batteries. Après huit mois et des centaines de messages envoyés depuis la Terre restés sans réponse, la NASA a annoncé que l’ultime tentative avait eu lieu mardi soir.
La communauté de chercheurs et d’ingénieurs impliqués dans le programme semblait avoir fait son deuil du mythique rover. « Ai passé la soirée au JPL pour les tout derniers ordres envoyés au rover Opportunity sur Mars. C’était silencieux. On a pleuré. On s’est embrassés. On a partagé souvenirs et rires », a tweeté Tanya Harrison, directrice de recherche à l’Arizona State University et collaboratrice du programme, installé au Jet Propulsion Laboratory près de Los Angeles.
«Saluons la reine de Mars»
« Bon vent, Opportunity », a aussi écrit Keri Bean, qui a eu « le privilège » d’envoyer le message final au robot, dans la soirée de mardi. « Saluons la reine de Mars », a tweeté Mike Seibert, ancien pilote d’Opportunity. La fin de la mission devait être confirmée officiellement par le patron de la NASA, et par les responsables du programme d’exploration martienne, lors d’une conférence de presse à Pasadena (Californie).
45,16 km parcourus, 217594 images envoyées
C’est là que des générations de scientifiques se sont succédé pour commander le rover. Son bilan est extraordinaire dans l’histoire de l’exploration planétaire : 45,16 kilomètres parcourus, plus que le rover soviétique Lunokhod 2 sur la Lune dans les années 1970 et plus que le rover conduit par les astronautes américains de la mission Apollo 17 sur la Lune en 1972 (35 km). Opportunity a aussi envoyé sur Terre 217594 images, toutes mises à disposition sur internet.
«Comme un avatar de l’humanité»
« Pour le grand public, Mars est devenue cet endroit dynamique qu’on pouvait explorer tous les jours », dit Emily Lakdawalla, experte de l’exploration spatiale qui écrit pour la Planetary Society. « Le rover était si mobile qu’il semblait être une créature animée », continue-t-elle. « Il avait cette perspective quasi humaine sur la surface de Mars, ses yeux étaient écartés comme des yeux humains, à une hauteur d’environ 1,50 mètre du sol, comme des humains. C’était comme un avatar de l’humanité qui voyageait sur la surface ».
Opportunity avait atterri sur une grande plaine où il a passé la moitié de sa vie, traversant des kilomètres de plat et restant même bloqué quelques semaines dans une dune de sable. C’est là que le robot, avec ses instruments de géologie, a permis de confirmer que de l’eau liquide se trouvait un jour sur Mars. La seconde partie de sa vie, il a remonté les flancs du cratère Endeavour, prenant de spectaculaires clichés panoramiques… et découvrant des veines de gypse, nouvelle preuve que de l’eau coulait entre ces roches.
Une mission théorique de 90 jours
Son jumeau Spirit a atterri trois semaines avant lui, et s’est éteint en 2010. Les deux ont largement rempli les attentes de leurs concepteurs : leurs missions devaient théoriquement durer 90 jours, des durées souvent dépassées mais rarement d’autant… Seul un rover reste encore actif sur Mars, également américain : Curiosity, qui a atterri en 2012. Lui n’est pas dépendant du Soleil car son énergie vient d’un petit réacteur nucléaire. En 2021, il sera rejoint, sur un autre site de la planète, par le robot récemment baptisé Rosalind Franklin, dans le cadre de la mission européano-russe ExoMars.
AFP