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A la chasse au loup en Serbie


Un garçon se tient près d'une voiture où est exposé une louve abattue lors d'une battue, à Blace, dans le sud de la Serbie. (Photo: AFP)

Strictement interdit de chasse dans la plupart des pays d’Europe occidentale, le loup n’est pas une espèce menacée dans les Balkans.

Des tirs de carabine déchirent le silence des bois et des champs épars des versants du mont Jastrebac, dans le sud de la Serbie. Deux louves viennent de payer le prix d’une battue légale. Dans les forêts de Serbie, quelque 800 loups ont été recensés et la chasse y est en conséquence autorisée de juillet à avril. Dans ces régions montagneuses, sauvages, pauvres et dépeuplées du sud du pays, cet animal est souvent vécu comme un problème : il n’est pas rare qu’il s’attaque au bétail, surtout l’hiver. « L’année dernière, en cinq minutes ils m’ont égorgé quatre moutons. J’ai installé des projecteurs qui sont allumés toutes les nuits pour les dissuader », raconte Ivan Milenkovic, 57 ans, qui possède une soixantaine de moutons et d’agneaux dans le village de Dresnica, proche de Blace, mais ne participe pas aux battues.

A quelques kilomètres seulement de Blace, une bourgade de 5 000 habitants coincée entre les montagnes de Jastrebac et Kopaonik (sud), plus de 400 chasseurs se sont réunis dans le froid d’une aube d’hiver. Chaque région de chasse définit son quota de chasse au loup. Dans celle de Blace, six animaux peuvent être abattus.

« Bon regard et main calme »

Les chasseurs de loups se sont divisés en deux groupes, les traqueurs et les guetteurs. Ils s’échangent le salut traditionnel du chasseur de cette région: « Bon regard et main calme! » Silencieux, les guetteurs scrutent les traces laissées dans la neige, ratissant les bois à petits pas et à intervalles réguliers. Les traqueurs procèdent à une battue silencieuse, poussant leurs proies vers leurs compagnons.

« Tu attends toute ta vie de tuer un loup. C’est rarissime, beaucoup n’en voient jamais, cela fait 24 ans que je chasse et je n’en ai pas tué un », confie Dejan Pantelic, 42 ans. Le loup est intelligent, son ouïe et son odorat sont exceptionnels, explique-t-il. A part l’homme, peu d’animaux sont plus mobiles: il parcourt facilement entre 50 et 100 km par jour. « Un chasseur isolé n’a pratiquement aucune chance de tuer un loup. Seule une battue peut donner des résultats », ajoute Dejan Pantelic.

« La chance était avec moi »

A Blace, loin de toute route, cela fait 21 ans que cette battue est organisée. Elle est devenue un événement social, clos par un banquet réunissant chasseurs et villageois. Adultes et enfants, le regard curieux, accueillent les chasseurs à leur retour. Cette année, les 400 chasseurs mobilisés ont abattu deux louves et trois renards dont les cadavres sont encordés sur des capots de voiture.

Des habitants se prennent en photo avec les loups tués, photographient leurs enfants. Nikola Milincic, 24 ans, est radieux: il a tué l’une des louves, celle à la fourrure claire, six ans seulement après ses débuts de chasseur. « Je l’ai vue à une cinquantaine de pas, j’ai tiré et réussi. Je n’arrive pas à y croire, certains attendent toute leur vie de chasseur un moment pareil. La chance était avec moi. » L’autre chasseur couronné de succès, Borica Vukicevic, 63 ans, a patienté pendant 38 ans. Il se tient droit aux côtés de sa victime à la fourrure gris foncé, dont les crocs impressionnants sont restés découverts dans la mort.

La chasse au loup est autorisée au Monténégro, en Bosnie et en Macédoine. Elle en revanche interdite en Croatie, au Kosovo et en Albanie. Selon les estimations des associations de chasseurs, il y a 800 loups en Bosnie, 200 en Croatie, 300 en Albanie, 500 au Monténégro, 400 au Kosovo, entre 2 000 et 3 000 en Macédoine.

 

A 24 ans, NIkola Milincic, est heureux d'avoir abattu une louve là où d'autres patientent parfois toute une vie de chasseur. (Photo: AFP)

A 24 ans, NIkola Milincic est heureux d’avoir abattu une louve là où d’autres patientent parfois toute une vie de chasseur. (Photo: AFP)

Le Quotidien/AFP