Dans la nuit du 7 au 8 janvier 1952 se produisit, à Ranguevaux, rue de l’Église, une catastrophe qui jeta dans la consternation toute la vallée de la Fensch et l’ensemble du bassin sidérurgique.
La conduite souterraine de gaz Moyeuvre-Hayange céda suite à un tassement de terrain et provoqua la mort de sept personnes, en majorité des enfants issus pour cinq d’entre eux d’une même famille. Sept autres personnes furent plus ou moins gravement intoxiquées.
Cet accident mettait en cause directement la Société de Wendel, propriétaire de la conduite. Les quotidiens Le Républicain Lorrain et Le Lorrain se firent largement l’écho de ce fait divers tragique et navrant.
Mais voyons comment les événements se sont produits et déroulés. Paul Vagner, le gérant du café situé en face des deux maisons où le drame a eu lieu, sera notre témoin privilégié. Son témoignage a été publié dans Le Républicain Lorrain du mercredi 9 janvier 1952. « Vers 2 h 30, Mme Zdun, qui demeure avec ses parents rue de l’Église, vint chez moi téléphoner au docteur Leroux, de Rémelange, en lui demandant de venir rapidement, car sa fillette Lucette, âgée de 8 mois, était malade. Elle recommanda au praticien de passer également chez les Becker, ses voisins, où le plus jeune enfant était également très souffrant.
Ce sont des convulsions, dit-elle. Le Docteur Leroux répondit qu’il venait immédiatement. Pendant ce temps, Mme Becker elle-même téléphonait, de chez M. Krier, à son mari, lui annonçant la gravité du cas du petit enfant. M. Becker, portier à la Fenderie de Serémange cette nuit-là, était de service. Il quitta alors son travail. Sans perdre un instant, Mme Becker, remarquant que le bébé était au plus mal, revint chez moi téléphoner au Dr Leroux pour qu’il vienne immédiatement. »
« Quel spectacle atroce »
« Je me préparais à me coucher au premier étage lorsque soudain Mme Zdun resonna chez moi : « Venez vite, mon père et ma mère ne respirent plus ! » En haut au café nous sentions déjà le gaz. Dans la rue, on entendait le sifflement caractéristique. J’ai compris immédiatement ! J’ai fait téléphoner à Moyeuvre afin qu’ils ferment l’admission du gaz et au Dr Leroux pour l’informer qu’il s’agissait d’une asphyxie et non de convulsions. Dans les maisons, tout était ouvert. Le gaz mortel avait agi avant même que les malheureux puissent fermer les portes. Cela n’avait pas duré cinq minutes. Quel spectacle atroce. Madame Zdun était dans un fauteuil étendue la tête renversée, les yeux retournés la langue pendante. Elle râlait comme son mari étendu dans le couloir. Dans leur lit, inanimés, se trouvaient M. et Mme Kirsch. Avec les voisins, nous les avons sortis tous les quatre et frictionnés. M. et Mme Zdun furent assez vite ranimés. Il en fut de même pour M. Kirsch qui, souffrant d’une affection pulmonaire, ne respirait que difficilement et de ce fait n’avait absorbé qu’une faible quantité de gaz. Malheureusement, Madame Kirsch succomba. Chez les Becker, tout était allumé. J’ai appelé, mais en vain, et craignant le pire, nous avons pénétré dans le logement. Je me souviendrai toujours de ce que j’ai vu. Il y avait sept gosses. Tous étaient intoxiqués. Mme Becker était étendue en travers du lit sur ses enfants. Quant à la grand-mère, elle agonisait sur une chaise. Le docteur Leroux, avec un admirable dévouement comme tous les sauveteurs présents, s’empressa auprès de ces trois malheureuses victimes.
Trois des enfants furent ranimés et transportés à l’hôpital de Hayange où se trouvait déjà M. Kirsch. Hélas, les quatre autres enfants, la pauvre maman et la grand-mère ne purent être rappelés à la vie. »