56% des Français approuveraient l’instauration du vote obligatoire, une majorité qui passerait à 67% si cette réforme s’accompagnait de la reconnaissance du vote blanc au même titre que les votes exprimés, selon un sondage Harris interactive (*) publié ce mercredi 15 avril.
Ce sondage, réalisé pour la Fondation Jean Jaurès, a été rendu public lors d’une conférence de presse du président PS de l’Assemblée nationale Claude Bartolone, qui propose cette mesure dans son rapport sur « l’engagement citoyen et l’appartenance républicaine » remis à François Hollande, en réaction aux attentats de janvier à Paris.
Le président UMP du Sénat Gérard Larcher a estimé mercredi que le vote obligatoire proposé par son homologue PS de l’Assemblée ne pouvait être « un remède universel » à même de changer les résultats, tout en trouvant « pas inutile » un débat sur l’importance du vote. Tout en considérant que l’hypothèse d’instaurer un vote obligatoire en France « n’est pas à renvoyer d’un revers de main » même si « cela fait partie de ces modes répétitives », Gérard Larcher estime que « le vote obligatoire ne changera pas les valeurs portées » et « les résultats projetés sont les mêmes » aux élections. « Est-ce que vous croyez que le vote obligatoire en Belgique a supprimé la tentation du vote extrémiste? », a demandé le sénateur UMP des Yvelines, en évoquant la progression des nationalistes flamands.
La numéro deux de l’UMP, Nathalie Kosciusko-Morizet, est contre le vote obligatoire car « le civisme ne se règle pas à coup de décret », a-t-elle affirmé mercredi. « Je trouve que c’est une mauvaise réponse à un vrai problème », a ajouté la députée. « L’abstention, ce n’est pas la faute, le problème des gens, c’est d’abord le problème des politiques ».
Le débat agite toute la classe politique française. Au PS, Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État aux Relations avec le Parlement, est personnellement plutôt favorable au vote obligatoire, tandis que le maire de Lyon, Gérard Collomb, réservé, juge qu’il « faut aller beaucoup plus loin » pour lutter contre l’abstention.
Le vote obligatoire n’existe, en Europe, que dans trois pays
En Belgique
Le vote a été rendu obligatoire en 1893. Un électeur qui ne se rend pas aux urnes sans excuse valable risque des sanctions: une amende de 30 à 60 euros la première fois et de 60 à 150 euros en cas de récidive.
L’abstention est aussi sanctionnée par des mesures administratives. Ainsi, si la personne concernée s’est abstenue quatre fois en quinze ans, elle peut être rayée des listes électorales pour dix ans et ne peut recevoir pendant ce laps de temps ni nomination, ni promotion, ni distinction émanant d’une autorité publique.
Si les sanctions sont bien prévues dans le Code électoral, aucun électeur n’a cependant été sanctionné depuis plus de 10 ans.
Cette disposition du vote obligatoire amène nombre de citoyens belges à se rendre dans un commissariat de police lorsqu’ils se trouvent à l’étranger un jour d’élection, afin d’obtenir une attestation de leur présence à l’étranger leur permettant de justifier leur absence en cas de poursuites.
Au Luxembourg
Le vote obligatoire été instauré en 1924. En cas d’infraction, les amendes sont de 100 à 250 euros pour une première abstention non justifiée, de 500 à 1.000 euros en cas de récidive dans les cinq ans suivant la première faute.
En Grèce
Le vote est officiellement obligatoire mais les abstentionnistes n’encourent que des sanctions administratives qui sont tombées en désuétude. La participation électorale reste assez élevée (63,6% aux dernières élections législatives de janvier) malgré une tendance à la baisse ces dernières années.
Le vote est également obligatoire en Turquie mais les sanctions prévues (amendes) pour les abstentionnistes ne sont que très rarement appliquées. Le taux de participation dans ce pays oscille généralement autour de 80-85% aux législatives.
AFP
(*) Sondage réalisé en ligne du 3 au 7 avril auprès d’un échantillon de 1.322 personnes, représentatif de la population française âgée d’au moins 15 ans (méthode des quotas).