Les halles de Leudelange fournissent déjà toute la restauration du pays et même au-delà des frontières. Mais il lui manquait le vin… jusqu’à cette année !
Que La Provençale, ce géant de la distribution de produits alimentaires avec ses 35 400 références en stock, ne vende pas une bouteille de vin, cela restait une sorte d’incongruité. Une situation d’autant plus étonnante que toute la restauration est déjà cliente aux halles de Leudelange et que ce ne sont pas les compétences en logistique qui manquent. Georges Eischen, un des trois directeurs de l’endroit avec Jo Studer et Jeff Arendt, a souhaité remédier à cette situation.
Il y a un peu plus d’un an, il a recruté le meilleur sommelier de Luxembourg 2016, Tristan Duval, pour développer une toute nouvelle vinothèque ouverte il y a sept mois. «Nous avons désormais ici pratiquement tout pour faire un bon repas», sourit Georges Eischen. Pour autant, celui qui se qualifie toujours – non sans une pointe d’humour – en tant qu’épicier veut faire les choses dans l’ordre et voir croître cette nouvelle activité progressivement.
Modeste, mais du choix
La vinothèque de La Provençale n’a pas vocation à inonder le pays avec un catalogue façon grosse cavalerie, mais plutôt de sélectionner des vignerons pointus, susceptibles d’être les stars de demain. «C’est un long processus, soutient-il. Nous sommes en train de planter les graines et nous récolterons les fruits dans plusieurs années.» Il est modeste puisque, fort de son carnet d’adresses sans égal et d’un choix pertinent, pratiquement tous les restaurants qui comptent au Luxembourg sont déjà clients.
Pour le responsable de la vinothèque, tout juste trentenaire, le défi est en tout cas particulièrement intéressant. Composer toute la gamme est un challenge que Tristan Duval relève avec un plaisir évident. «Je cherche avant tout des vignerons qui soient des auteurs, explique-t-il. Les marques ne m’intéressent pas. Si un petit producteur fait mieux qu’une grande maison, pourquoi distribuer ce que tout le monde connaît déjà ?» Environ 90% des domaines présents ici le sont en exclusivité et le cœur de la gamme se situe entre 8 et 15 euros (avec des entrées de gamme à 4,50 euros).
Sur le créneau des champagnes, par exemple, vous ne trouverez pas les leaders du marché. Il préfère mettre en avant AR Lenoble, un producteur indépendant irréprochable de la côte des Bar, au rapport qualité-prix imbattable. «Je viens de recevoir un mail ce matin : lors d’une dégustation à l’aveugle, Jancis Robinson (NDLR : une très célèbre critique britannique) a placé son Blanc de blancs Chouilly en troisième position, derrière Cristal Roederer 2008 et le Dom Pérignon 2008 ! Et le champagne d’AR Lenoble coûte… 35 euros la bouteille !»
70% de bio
En Bourgogne, il aime également travailler avec des jeunes vignerons comme à La Maison Romane (Oronce de Beler) ou Philippe Pacalet (le neveu de Marcel Lapierre), des amoureux de leurs terroirs qui travaillent en respectant les vignes et le vin. De la Confédération helvétique, il sert les vins suisses de domaines Marie-Thérèse Chappaz et du Domaine de Beudon. «La production est tellement limitée que je limite l’achat à une bouteille par personne.»
Partout, la sélection est pointue. «Il se trouve que 70 à 75% des plus de 550 références qui sont ici sont en bio ou en biodynamie, souligne celui qui, avant de passer à la sommellerie, officiait en tant que cuisinier et pâtissier. Mais ce n’est pas un argument commercial, ils sont juste là parce qu’ils sont bons !»
Et, ce qui ne gâte rien, la nouvelle vinothèque a une belle allure avec son mobilier en bois et en acier et son plafond en briques belges vieillies. «Tous les meubles ont été fabriqués ici, dans les ateliers, détaille Tristan Duval. Le bois provient d’anciennes palettes et l’acier a été soudé sur place, selon nos plans.»
Erwan Nonet