Dix ans après, le procès de l’effondrement meurtrier de la scène devant accueillir Madonna au stade Vélodrome en 2009 devrait enfin avoir lieu à Marseille : sept personnes et quatre sociétés dont la branche française de Live Nation, seront jugées en correctionnelle.
Le procès pourrait se tenir à l’automne, devant le tribunal correctionnel de la cité phocéenne, selon l’ordonnance de renvoi signée le 29 janvier. Le 16 juillet 2009, trois jours avant le concert de la reine de la pop sur la pelouse de l’Olympique de Marseille, le toit de la scène s’effondre, en cours de montage : sous les 60 tonnes de la structure métallique, deux techniciens perdent la vie, Charles Criscenzo, un Français de 52 ans, et Charles Prow, un Britannique de 23 ans. Huit autres sont blessés et l’un d’entre eux se suicide deux ans plus tard. Selon ses proches, il ne s’était jamais remis de ce drame.
Les 11 prévenus – quatre personnes morales et sept personnes physiques – seront jugés pour homicides et blessures involontaires ainsi que pour de multiples infractions aux règles relatives à l’hygiène et à la sécurité prévues par le code du travail. « Leur nombre important montre l’imprévoyance, la négligence, l’incurie qui ont prévalu avant et pendant le chantier de montage » de la scène, assène le juge d’instruction Pierre Philipon dans son ordonnance.
S’appuyant sur les conclusions de plusieurs expertises et du rapport de l’inspecteur du travail, le magistrat instructeur estime que « l’organisation du concert s’est caractérisée par une totale improvisation en ce qui concerne la préparation et la réalisation des opérations de montage de la structure scénique ». Les experts qualifient notamment d’ « injustifiable » la présence de personnes sous le toit en cours de levage.
Les personnes renvoyées devant le tribunal correctionnel sont la société Live Nation France, la branche française du numéro 1 mondial de la production de concerts, chargée de l’organisation de cette tournée de Madonna en France, ainsi que sa dirigeante; la SARL Tour Concept France, chargée du montage, et dont les victimes étaient les techniciens, ainsi que son gérant; la SAS Mediaco, spécialiste du levage, et son directeur d’exploitation; la société anglaise Edwin Shirley Group, propriétaire de la scène, et trois de ses responsables. Un travailleur indépendant, le chef d’équipe en charge de « construire la scène », doit également être jugé.
Madonna forfait chez le juge
L’accident était intervenu alors qu’il était procédé à l’élévation du toit, à l’aide des treuils équipant les six tours métalliques sur lesquelles il devait être arrimé. La défaillance de deux de ces treuils avaient conduit les organisateurs du chantier à recourir à une grue de levage. Selon les derniers experts désignés par le juge d’instruction, la rupture d’une élingue positionnée sur le toit afin de le hisser avec la grue « est bien la cause de l’effondrement ». Initialement mis en examen, le grutier a cependant bénéficié d’un non lieu.
Madonna n’avait pas répondu à la convocation du juge d’instruction, auquel elle avait adressé un courrier soulignant qu’elle n’était pas impliquée dans le volet technique du montage de la scène et qu’elle n’avait demandé à personne de la monter plus rapidement pour permettre une journée supplémentaire de répétition. Dans ce même courrier elle avait présenté ses condoléances aux familles des victimes.
Privée de sa pelouse pendant un mois suite au drame, l’Olympique de Marseille avait tenté de se constituer partie civile dans ce dossier pénal, mais cette demande avait été rejetée. Sa demande de réparation de 1 million d’euros envers la ville a, elle, été définitivement été écartée par la cour administrative d’appel en mai 2018.
En raison de la durée de l’instruction, Me Philippe Vouland, avocat des proches d’une des deux victimes décédées, a fait part de son intention d’engager une procédure pour dysfonctionnement des services judiciaires.
LQ/AFP