La nouvelle loi encadrant l’organisation du marché des produits pétroliers est de nature à inquiéter les représentants du secteur : ils craignent que la non-prolongation des autorisations d’exploitation de différents dépôts pétroliers luxembourgeois crée une situation de quasi-monopole.
C’est à Bertrange que se trouve actuellement le plus important site de stockage d’hydrocarbures au Grand-Duché. (Photo : Isabella Finzi)
Les futures règles en matière de stockage incitent le Groupement pétrolier luxembourgeois (GPL) à se positionner sur la question et à adopter une posture privilégiant la « prudence ». Votée en janvier à la Chambre des députés, le nouveau cadre légal en question vise à transposer une directive européenne de 2009 en droit national.
Si les parlementaires ont déjà donné leur feu vert, les représentants du secteur pétrolier sont dans l’expectative. Et ils semblent s’impatienter. « Je vérifie quotidiennement si la loi est d’ores et déjà publiée au Mémorial et ce n’était pas encore le cas [jeudi] soir », souligne le secrétaire général du GPL, René Winkin.
Si l’entrée en vigueur de ce nouveau cadre légal est si scrutée, c’est parce qu’il inspire une certaine méfiance au GPL. Les enjeux sont en effet de taille pour le secteur, la loi imposant de nouvelles dispositions, en matière de stockage pétrolier notamment.
L’obligation de constituer et de maintenir de façon permanente des stocks pétroliers de sécurité, est l’une d’entre elles. Concrètement, cela signifie que le Luxembourg est tenu de disposer d’un stock permanent de pétrole brut ou de produits pétroliers correspondant à 93 jours d’importations journalières nettes. En chiffres, cela correspond à plus de 859 000 m3.
Une exigence de Bruxelles qui se justifie dans le sens où les États membres de l’UE devraient être aptes à affronter toute situation de crise impliquant, à terme, une pénurie.
> Vers un stockage à l’étranger
Or les capacités de stockage du Grand-Duché sont relativement limitées et largement en deçà des volumes annoncés. Pour couronner le tout, les dépôts, déjà peu nombreux, ont tendance à disparaître et donc à se raréfier.
Dans ce contexte, le GPL s’interroge quant à l’avenir incertain des différents dépôts. Les non-prolongations d’autorisations d’exploitation de ces dépôts, sont, par exemple, mises en cause. « Le permis d’exploitation du dépôt de Bertrange ne sera pas prolongé », souligne René Winkin pour illustrer cette grande inconnue.
Dans ce cadre, le GPL s’inquiète de la sauvegarde des règles de concurrence. « Une non-prolongation des autorisations d’exploitation de plusieurs dépôts pétroliers existants pourrait mener à une situation de quasi-monopole sur le marché très étroit du stockage au Luxembourg », précise le secrétaire général du GPL.
Pour répondre aux problèmes latents d’accessibilité et de concurrence, l’association estime qu’il faut « réserver les stocks nécessaires sur le territoire et les refacturer équitablement aux sociétés pétrolières concernées ».
Et le GPL est d’avis que cette tâche doit incomber à l’Agence nationale de stockage de produits pétroliers, qui constitue un établissement public créé spécifiquement par la nouvelle loi (lire ci-dessous).
Précisons que les inquiétudes du GPL concernent le stockage sur le territoire national. Pour atteindre les quotas de volumes de pétrole fixés par la Commission européenne, le Luxembourg pourra en effet stocker une partie de ses réserves à l’étranger, dans un rayon de 250 km, qui va donc jusqu’à la ville d’Anvers.
La loi prévoit également que les niveaux minima de provisions par territoire (au Luxembourg ou à l’étranger) seront fixés par le biais d’un règlement grand-ducal. L’objectif annoncé par les parlementaires de la commission de l’Économie était de disposer de quantités équivalentes à 33 jours de réserve, sur une distance allant jusqu’à Rotterdam.
De notre journaliste Claude Damiani