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Retour du 49-3 sur la loi Macron, l’exécutif pressé d’en finir


"L'enjeu, c'est que les mesures de cette loi se concrétisent le plus vite possible dans le quotidien des Français", répète-t-on dans l'entourage de Manuel Valls. (photo AFP)

Bis repetita à l’Assemblée : Manuel Valls va engager mardi après-midi la responsabilité du gouvernement pour permettre l’adoption sans vote en nouvelle lecture du projet de loi Macron, pressé d’en finir avec un texte qui continue de diviser à gauche.

Après une intervention d’Emmanuel Macron, le Premier ministre français annoncera, ce mardi vers 17 heures, aux députés qu’il recourt à l’article 49-3 de la Constitution, interrompant ainsi dès le premier jour des débats qui devaient durer jusqu’au 24 juin avec l’examen de plus de 1 000 amendements. Le texte sera considéré comme adopté en nouvelle lecture en fin de semaine, à moins que le gouvernement ne soit renversé par une motion de censure, ce qui est exclu. Le texte repartira ensuite au Sénat avant d’être définitivement adopté par l’Assemblée fin juillet.

L’exécutif avait déjà eu recours au 49-3 en février, lors de la première lecture, pour parer à l’opposition attendue de 30 ou 40 députés PS hostiles notamment à l’extension de l’ouverture des commerces le dimanche. Mais François Hollande et son Premier ministre avaient alors pris leur décision à la dernière minute, juste avant le vote solennel.

Cette fois-ci, l’exécutif a tranché pour la solution la plus rapide. « L’enjeu, c’est que les mesures de cette loi se concrétisent le plus vite possible dans le quotidien des Français », répète-t-on dans l’entourage de Manuel Valls. Le rapporteur général, Richard Ferrand (PS), a plaidé qu’il « n’y avait pas lieu de s’enliser dans des débats éternels » après 437 heures de discussions entre l’Assemblée, le Sénat et leurs commissions spéciales respectives; 2.024 amendements ont été adoptés au total, selon les chiffres du ministère de l’Economie.

Libéralisation du transport par autocar, réforme du permis de conduire, réforme des professions juridiques réglementées (notaires, etc.) pour autoriser une dose de liberté d’installation et tarifaire, etc., ses quelque 300 articles touchent quantité de secteurs.

Motion de censure

Surtout, le gouvernement voulait s’épargner une nouvelle semaine de débats houleux avec l’aile gauche de sa majorité; d’autant qu’il a fait ajouter la semaine dernière en commission plusieurs mesures en faveur des TPE-PME, dont le controversé plafonnement des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif.

L’ex-ministre Benoît Hamon, figure de l’aile gauche du PS, de même que le député Yann Galut (PS), avec 30 de ses collègues, avaient annoncé avoir déposé des amendements en vue de la suppression de cette mesure.

Plusieurs députés PS avaient redit ces derniers jours leur intention de voter contre. « Il n’y a plus de majorité pour cette politique économique et sociale » et pour cette loi Macron qui est une « commande de Bruxelles », a tranché mardi matin Benoît Hamon, tandis que, pour Christian Paul, Manuel Valls met « en danger la réélection de François Hollande en 2017 ».

« Une défaite collective »

Ce 49-3 reste une « défaite collective », reconnaît un responsable socialiste, et montre que le congrès de Poitiers, il y a moins de dix jours, « n’a servi à rien ». « Echec collectif et faute politique », a lancé Christian Paul à la réunion des députés PS, en présence de Manuel Valls. Pour protester contre une « gifle » à la démocratie », le « frondeur » Pouria Amirshahi comptait boycotter la séance de mardi, à la différence d’autres socialistes critiques.

Le nouveau recours au 49-3 suscitait des regrets, y compris chez certains rapporteurs du projet de loi, comme Stéphane Travert, qui s’est « rangé à l’avis du Premier ministre » non sans trouver « dommage » cette atteinte à « l’un des droits fondamentaux du Parlement ». A l’inverse, le président du Medef, Pierre Gattaz, a salué un « bon choix » du gouvernement.

Valls, « une caricature de lui-même »

Sans surprise, le chef de file des députés « Les Républicains », Christian Jacob, a d’ores et déjà annoncé que son groupe déposerait une motion de censure, qui devrait être débattue jeudi à partir de 16 heures. « Manuel Valls « restera comme le fossoyeur de sa propre majorité » et « devient la caricature de lui-même par ses excès d’autorité et son arrogance », a dénoncé le député de Seine-et-Marne. Les dix députés Front de gauche vont tenter, comme ils l’avaient fait sans succès en février, de déposer leur propre motion de gauche. Mais des frondeurs PS ont refusé de s’y associer, au motif que leur but n’était « pas de faire chuter le gouvernement ».

En utilisant le 49-3, le gouvernement pourra cependant accepter certains amendements lui paraissant importants et en déposer lui-même sur le texte issu de la commission, notamment un amendement de « clarification » à l’assouplissement controversé de la publicité sur l’alcool et de la loi Evin voté par le Sénat puis en commission à l’Assemblée.

AFP