Une jeune fille de 18 ans infectée par le virus du sida (VIH) pendant la grossesse de sa mère est en rémission, après avoir été sous traitement antirétroviral jusqu’à l’âge de 6 ans, un traitement stoppé par la suite, selon une étude publiée lundi.
Ce premier cas mondial montre « qu’une rémission prolongée après un traitement précoce peut être obtenue chez un enfant infecté par le VIH depuis la naissance », selon l’étude française présentée par le Dr Asier Sáez-Cirión de l’Institut Pasteur, à la 8e conférence sur la pathogenèse du VIH qui se tient jusqu’à mercredi à Vancouver.
Le concept de rémission à long terme après la prise d’antirétroviraux, soulignant l’importance d’un traitement précoce pour contrôler l’infection par le VIH, avait déjà été mis en évidence par l’étude ANRS Visconti publiée en 2013.
L’observation présentée lundi a été réalisée sur une enfant née en 1996 « infectée en fin de grossesse ou à l’accouchement alors que sa mère avait une charge virale (quantité de virus présents dans le sang) non contrôlée ».
L’enfant a été immédiatement traité par l’antirétroviral zidovudine pendant six semaines et diagnostiquée porteuse du VIH « un mois après sa naissance », selon les travaux menés par l’Institut Pasteur, l’Inserm et l’Assistance publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP).
« Deux mois plus tard, et suite à l’arrêt programmé du traitement prophylactique, elle présentait une charge virale très élevée, conduisant à la mise en route d’un traitement associant quatre antirétroviraux » pendant les six premières années de sa vie, a mentionné le Dr Sáez-Cirión.
L’enfant a ensuite « été perdue de vue » par le corps médical et « sa famille a décidé d’interrompre la prise des antirétroviraux ».
« Revue un an plus tard » par l’équipe médicale, la petite fille « avait une charge virale indétectable (moins de 50 copies d’ARN-VIH par ml de sang) » et il a été alors décidé de « ne pas reprendre le traitement », a noté l’étude.
Toujours infectée par le VIH
Maintenant âgée d’un peu plus de 18 ans, cette jeune femme « présente toujours une charge virale indétectable (…) sans avoir jamais repris d’antirétroviraux ». « Son nombre de lymphocytes (cellules responsables de la mémoire immunitaire contre les maladies, NDLR) CD4 est resté stable tout au long de ces années », ont relevé les scientifiques.
La jeune femme « ne présente aucun des facteurs génétiques connus pour être associés à un contrôle naturel de l’infection », a relevé le Dr Asier Sáez-Cirión en assurant que « c’est le fait d’avoir reçu très tôt après sa contamination une combinaison d’antirétroviraux qui lui permet d’être en rémission virologique depuis aussi longtemps ».
L’étude apporte « la preuve du concept qu’une rémission à long terme est, comme chez l’adulte, possible chez l’enfant ». Le Dr Sáez-Cirión recommande toutefois de ne pas stopper un traitement antirétroviral en dehors d’essais cliniques, que ce soit chez l’enfant ou chez l’adulte.
Il se base pour cette recommandation sur le cas d’un nourrisson infecté par le VIH aux Etats-Unis et traité précocement « dont la rémission n’avait été que de 27 mois après l’arrêt du traitement antirétroviral ».
Si le cas de la jeune femme « est un fait clinique majeur qui ouvre de nouvelles perspectives de recherche », il est cependant à souligner que « cette rémission ne doit toutefois pas être assimilée à une guérison », a estimé le professeur Jean-François Delfraissy, directeur de l’ANRS, groupement de chercheurs de toutes disciplines sur le sida et les hépatites virales.
« Cette jeune femme reste infectée par le VIH et il est impossible de prédire l’évolution de son état de santé », a-t-il ajouté. Toutefois, ce cas permet de plaider « en faveur d’une mise sous traitement antirétroviral de tous les enfants nés de mères séropositives le plus tôt possible après la naissance ».
AFP