Le directeur général de Société Générale, Frédéric Oudéa, a dénoncé mercredi « les amalgames et les inexactitudes » concernant la mise en cause de la banque française et de sa filiale luxembourgeoise dans la vaste enquête sur les « Panama Papers ».
Son groupe a notamment été épinglé dans ce dossier par le journal Le Monde pour avoir ouvert 979 sociétés offshore entre 1977 et 2015, dont les deux tiers par sa filiale luxembourgeoise SG Bank and Trust Luxembourg, via le cabinet d’avocats panaméen Mossack Fonseca.
« La Société Générale n’a plus aucune implantation dans les paradis fiscaux. Il ne faut pas confondre une implantation détenue et opérée par une banque, et les sociétés et structures qui sont détenues par nos clients », affirme M. Oudéa dans un entretien au Figaro. Il souligne que son établissement ne travaille en offshore qu’avec des clients « dont les motifs sont clairs » et que le fait d’avoir recours à une entité offshore « peut avoir bien d’autres motifs que fiscaux », citant par exemple des « situations familiales complexes ».
Mardi, Société Générale s’était déjà défendue, en indiquant que quelques dizaines de sociétés offshore créées pour ses clients via Mossack Fonseca étaient encore en activité et qu’elles étaient gérées de façon « totalement transparente ». « Nous connaissons systématiquement les ayant-droits de ces structures. Cela fait partie du code de conduite fiscale que nous avons déployé à la Société Générale en 2010 et dont la mise en œuvre a encore été intensifiée depuis 2012″, insiste M. Oudéa dans son entretien publié mercredi.
« Tout doit être mis sur la table »
Le ministre des Finances Michel Sapin s’est entretenu mardi soir à Bercy avec le PDG de la Société Générale, pour un premier tête-à-tête d’explication. « Je lui ai dit que je souhaitais que tout soit mis sur la table. J’ai exigé de connaître l’état actuel total de la situation, l’évolution de 2012 à 2015 et les raisons de l’ouverture éventuelle de nouveaux comptes offshore », a expliqué M. Sapin. « M. Oudéa s’est engagé à donner toutes les informations sur ces sociétés, à moi-même mais surtout à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), seul habilitée à prendre les décisions adéquates.»
La banque a affirmé dans un communiqué que « quelques dizaines » de ces entités créées pour ses clients étaient encore actives et qu’elles étaient gérées de façon « totalement transparente ». Ces entités ont été immatriculées au Panama, dans les îles Vierges britanniques et aux Seychelles, pour des clients fortunés entre 2000 et 2010, depuis ses filiales au Luxembourg, en Suisse et aux Bahamas. Elles placent la Société Générale dans le top 5 des banques clientes de la firme panaméenne.
La Société Générale s’était engagée à ne plus travailler avec les paradis fiscaux dès 2010, et à nouveau en 2012. Pour sa défense, la banque explique que moins d’une centaine des sociétés créées avec Mossack sont encore actives, soit entre 50 et 80. Toutes auraient été passées au « scanner fiscal », c’est-à-dire dûment contrôlées, comptes bancaires compris.
La banque va cependant devoir s’expliquer sur ces pratiques et indiquer si elle travaille avec d’autres prestataires que Mossack Fonseca. Elle a déjà été sanctionnée Le 24 octobre 2012 pour des carences de son dispositif de lutte contre le blanchiment de sa filiale aux Bahamas. Elle avait écopé d’un avertissement et d’une amende de 500 000 euros.
Le Quotidien / AFP
« La Société générale avait clairement dit qu’elle allait mettre fin à un certain nombre de pratiques opaques »
Interrogé par le journal Le Monde, Michel Sapin, le ministre français des Finances répond :
« La banque est responsable des décisions prises en son sein, y compris par ses filiales situées à l’étranger. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) [le gendarme des banques françaises] est en mesure de mener un certain nombre d’enquêtes, aussi bien en France qu’au Luxembourg : la banque a un devoir de vigilance. Si des faits répréhensibles étaient constatés, l’ACPR en tirera les conclusions.
Je serai particulièrement attentif à ce qui aura été décidé entre 2012 et 2015, date à laquelle la banque avait décidé de ne plus ouvrir de sociétés offshore. La Société générale avait clairement dit qu’elle allait mettre fin à un certain nombre de pratiques opaques.
Il n’est pas admissible que des sociétés soient créées dans le seul de but de dissimuler du blanchiment et de l’évasion fiscale. »