Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a réclamé mardi de l’UE qu’elle accélère les livraisons de munitions, lève les restrictions « inacceptables » sur les exportations céréalières et lance les négociations d’adhésion, en recevant à Kiev la présidente de la Commission européenne.
Ursula von der Leyen est arrivée dans la capitale ukrainienne par le train dans la matinée pour y marquer la Journée de l’Europe et afficher une nouvelle fois le soutien de l’UE face à l’invasion russe. Elle est reçue à Kiev le jour où la Russie célèbre en grande pompe la victoire sur l’Allemagne nazie.
« Le moment est venu depuis longtemps de lever cette incertitude politique artificielle dans les relations entre l’Ukraine et l’UE », a lancé Volodymyr Zelensky lors d’une conférence de presse conjointe. « Le moment est venu de prendre une décision positive concernant l’ouverture des négociations sur l’adhésion » de l’Ukraine à l’Union européenne, a-t-il ajouté.
L’Ukraine réclame depuis des années une adhésion à l’UE et à l’Otan et a multiplié les demandes auprès de Bruxelles depuis l’invasion russe, y voyant la seule réelle garantie de sa sécurité face à Moscou. L’UE a accordé à Kiev le statut de candidat officiel en juin 2022 mais réclame la poursuite des réformes, notamment anticorruption. L’ouverture de négociations d’adhésion doit être décidée par les Etats membres à l’unanimité après proposition de la Commission.
« L’Ukraine se bat pour les idéaux de l’Europe que nous célébrons aujourd’hui. En Russie, Poutine et son régime ont détruit ces valeurs. Et maintenant, ils tentent de les détruire ici en Ukraine », a déclaré Ursula von der Leyen aux côtés de M. Zelensky. « L’agresseur a déjà dramatiquement échoué. L’Ukraine a résisté à l’attaque et riposté avec succès », s’est-elle félicitée, alors que Kiev prépare une nouvelle contre-offensive.
« Mesures cruelles »
Dans le contexte de cette contre-offensive, dont les premiers actes pourraient être déjà en cours, M. Zelensky a remercié Mme Von der Leyen pour la décision européenne de fournir « un million d’obus » à l’Ukraine, mais a insisté sur la nécessité de les livrer plus vite. « On en a déjà besoin sur le champ de bataille », a-t-il insisté avant de remettre sur la table le sujet des restrictions européennes sur les exportations agricoles ukrainiennes, qui a suscité des tensions entre l’Ukraine et ses voisins.
« Toute restriction sur nos exportations est absolument inacceptable maintenant parce qu’elle renforce les capacités de l’agresseur » russe, a fustigé M. Zelensky face aux journalistes. Dénonçant des « mesures protectionnistes strictes, voire cruelles », le président ukrainien s’est dit « déçu » et a réclamé la « suppression de toutes les restrictions le plus vite possible ».
Cinq pays — Pologne, Slovaquie, Hongrie, Bulgarie, Roumanie — ont adopté des mesures pour protéger leurs propres marchés face à l’afflux de grain ukrainien, qui a provoqué une chute des prix qui menace les agriculteurs locaux. Bruxelles, qui avait suspendu en mai 2022, pour un an, les droits de douane sur les denrées ukrainiennes, a jugé ces restrictions « inacceptables » en pleine guerre.
Des années de négociation
Malgré ces tensions, la Commission européenne est parvenue fin avril à un accord entre les parties concernées pour garantir le transit des céréales ukrainiennes, notamment à destination des pays tiers, un point crucial pour Kiev. Aux côtés de M. Zelensky, Ursula Von der Leyen a jugé mardi la situation « difficile ». « La priorité immédiate est aujourd’hui que le transit des céréales se déroule de manière transparente et au prix le plus bas possible », a-t-elle déclaré.
« Cela nécessite une coopération très étroite des différentes parties », a poursuivi Mme Von der Leyen, annonçant la mise en place d’une « plateforme de coordination ». Dans les semaines à venir, la Commission européenne doit rendre un avis provisoire sur les progrès de Kiev en vue de l’ouverture des négociations d’adhésion, avant un rapport officiel en octobre.
Si les Occidentaux promettent à l’Ukraine l’adhésion à terme à l’UE comme à l’Otan, Bruxelles estime que les pourparlers prendront six à dix ans après leur ouverture, alors que Kiev souhaite une intégration beaucoup plus rapide.