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Nucléaire : le gouvernement promet une feuille de route d’ici juillet


Vue du chantier de l'EPR à Flamanville, le 6 novembre 2014. (Photo : AFP)

Le gouvernement a promis jeudi de publier d’ici juillet sa feuille de route sur la réduction du nucléaire, un engagement inscrit dans la loi de transition énergétique qu’il peine à concrétiser, soucieux de ménager la filière de l’atome.

«Nous avons donné notre stratégie pour la montée en puissance des (énergies) renouvelables» il y a une dizaine de jours mais «pour le nucléaire, c’est plus compliqué», a reconnu Ségolène Royal, qui s’est engagée à dévoiler ses plans «au plus tard le 1er juillet». «Je veux concilier protection de l’emploi, application de la loi sur la transition énergétique et sécurité de l’approvisionnement», a expliqué la ministre de l’Environnement et de l’Énergie.

L’ambition de cette loi a été largement saluée et la France ne s’est pas privée de la brandir avant la COP21: consommation d’énergie divisée par 2 en 2050, baisse de 40% des gaz à effet de serre et de 30% des énergies fossiles d’ici 2030, réduction du nucléaire de 75 à 50% dans la production d’électricité en 2025. Au-delà de ces objectifs de moyen et long terme, le gouvernement doit détailler l’évolution des différentes sources d’énergie jusqu’en 2023, dans un document appelé «programmation pluriannuelle de l’énergie» ou «PPE».

Sa publication était prévue initialement pour fin 2015. Elle a été ensuite repoussée en février, mais finalement seule la partie concernant les énergies renouvelables a été dévoilée le 6 avril. D’où un mécontentement grandissant parmi les plus fervents partisans de la transition énergétique (secteur des énergies renouvelables, ONG, syndicat comme la CFDT, écologistes etc.). «Repoussée et désormais amputée, cette PPE n’a plus rien d’opérationnel et en dit long sur la volonté du gouvernement d’engager la transition énergétique», persiflait cette semaine l’ONG France Nature Environnement. «Nouveau recul du gouvernement», dénonçait EELV.

«Il faut arrêter de faire semblant, de repousser, repousser le dossier de la PPE, car le risque, c’est de sortir du quinquennat sans décision structurante sur le nucléaire», avait aussi estimé Pascal Canfin, directeur général de WWF France et ancien ministre écologiste du gouvernement.

« Blocage d’EDF »

Face à ces mises en cause, Ségolène Royal a finalement fixé jeudi une nouvelle échéance au début de l’été pour la publication d’une «PPE globale, avec le volet nucléaire». En «fonction de différents scénarios» – consommation d’électricité, développement des énergies renouvelables et offre sur le marché européen -, cette feuille de route donnera «une fourchette du nombre de réacteurs à fermer», a assuré la ministre. Deux scénarios sur la consommation électrique ont été retenus: une stagnation et une baisse.

France Nature Environnement (FNE) a salué cette annonce, mais attend de voir si elle se concrétise. «EDF ne veut pas qu’on lui dise combien elle doit fermer de réacteurs, c’est le point de blocage absolu», assure Maryse Arditi, sa porte-parole. «Je ne demande pas qu’on nous dise aujourd’hui quels réacteurs vont fermer, mais une PPE doit au moins dire le nombre de réacteurs à fermer jusqu’en 2023… en espérant que la fourchette ne commence pas à zéro.»

Dans un rapport publié en février, la Cour des comptes, en misant sur une croissance modérée de la consommation de courant, estimait que 17 à 20 réacteurs devraient être fermés pour respecter l’objectif de 50% de production d’électricité d’origine nucléaire en 2025. Car la montée en puissance des énergies renouvelables (éolien, photovoltaïque, etc.) va impliquer mécaniquement une réduction du parc nucléaire (58 réacteurs).

Une perspective que EDF refuse d’envisager. L’entreprise veut lancer un lourd programme de maintenance en espérant prolonger la durée de vie des réacteurs de 40 à 50 ans. L’Autorité de sûreté nucléaire se prononcera à partir de 2018 et aura le dernier mot. Ce qui repousse à au moins 2019 toute fermeture, hormis celle de Fessenheim (Bas-Rhin) prévue en 2018. Alors que l’Etat est le principal actionnaire d’EDF, «on se questionne sur la capacité du gouvernement à assumer cette mutation nécessaire», lance Anne Bringault, porte-parole de l’ONG CLER. «Le modèle électrique français de production d’électricité est à un carrefour, c’est l’heure des choix», résume Pascal Canfin.

Le Quotidien/AFP