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Neuf ans de batailles autour du maintien en vie de Vincent Lambert


Le Conseil d’État a jugé mercredi "illégale" la suspension de la procédure d'examen de l'interruption des traitements de Vincent Lambert. (photo AFP)

Le Conseil d’État a jugé mercredi « illégale » la suspension de la procédure d’examen de l’interruption des traitements de Vincent Lambert, hospitalisé dans un état végétatif depuis 2008, qui avait été annoncée en juillet 2015 par le CHU de Reims. Sa famille se déchire depuis près de neuf ans ans au sujet de son maintien en vie.

« Il en résulte que le médecin actuellement en charge de M. Lambert devra à nouveau se prononcer sur l’engagement d’une procédure d’examen de l’arrêt des traitements de l’intéressé », précise la plus haute autorité administrative dans un communiqué. « Le médecin en charge de Vincent Lambert en 2015 avait engagé une procédure d’examen d’un arrêt des traitements » avant de décider « de la suspendre, sans donner de terme à cette suspension, au motif que les conditions de sérénité et de sécurité nécessaires à sa poursuite, tant pour le patient que pour l’équipe soignante, n’étaient pas réunies », rappelle le Conseil d’État. Or, pour les juges, « le médecin ne pouvait se fonder sur un tel motif pour prendre la décision de suspendre la procédure pour une période indéterminée ».

Vincent Lambert est hospitalisé à Reims depuis qu’un accident de la route, en septembre 2008, l’a plongé dans un état végétatif, sans espoir d’amélioration, disent les médecins en 2011. Le 10 avril 2013, le CHU engage un protocole de fin de vie avec son épouse Rachel. Vincent Lambert, selon sa sœur Marie et son épouse, avait « clairement » indiqué avant son accident qu’il ne souhaitait pas d’acharnement thérapeutique, mais il n’a laissé aucune consigne écrite. Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, saisi par les parents opposés à l’euthanasie passive, ordonne le rétablissement de l’alimentation. Il reproche aux médecins un manque d’information de la famille.

Cependant, le 11 janvier 2014, le CHU informe la famille qu’il va arrêter nutrition et hydratation artificielles, conformément à la loi Leonetti qui interdit l’acharnement thérapeutique. Sur quatre experts, un seul a plaidé pour le maintien en vie. Une nouvelle fois, le 13 janvier, le tribunal saisi par les parents, une sœur et un demi-frère, ordonne la poursuite du traitement, « ni inutile, ni disproportionnée ». Rachel Lambert et le CHU en appellent au Conseil d’État.

Allers-retours devant les tribunaux

Après une nouvelle expertise, qui confirme l’incurabilité et une « dégradation » de l’état général, le Conseil d’État se prononce le 24 juin 2014 pour l’arrêt des soins. Aussitôt saisie par les parents, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) juge le 5 juin 2015 que cet arrêt ne viole pas le droit à la vie de Vincent Lambert. Le 10 juillet, le CHU annonce une nouvelle procédure d’arrêt du traitement et convoque la famille. Mais le 23 juillet, contre toute attente, les médecins annoncent qu’ils ne se prononcent pas concernant l’arrêt des soins arguant que les conditions de « sérénité et de sécurité nécessaires » ne sont pas réunies. Ils demandent la nomination d’un représentant légal pour le patient.

Le 9 octobre, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejette la demande d’arrêt des soins réclamé par son neveu. Les médecins sont en droit, dit-il, « en vertu de leur indépendance professionnelle et morale », de suspendre le processus d’arrêt des traitements malgré les décisions de justice précédentes. Le 10 mars 2016, le juge des tutelles choisit Rachel Lambert comme tutrice. Les parents Lambert contestent vainement en appel et en cassation.

La cour administrative d’appel de Nancy, saisie du jugement du 9 octobre 2015, décide le 16 juin 2016 que les consultations d’experts pouvant mener à un arrêt des soins doivent reprendre. Les parents forment un nouveau recours auprès du Conseil d’État. Le 11 janvier 2017, les parents de Vincent Lambert, qui réclament son transfert dans un établissement spécialisé, déclarent avoir porté plainte contre le CHU de Reims pour « délaissement de personne hors d’état de se protéger ». Le 24 mars, la cour d’appel de Reims rejette leur demande de transfert et les parents se pourvoient en cassation.

Le Quotidien/AFP