Les familles affluent en cet été torride à Marineland, plus grand parc marin d’Europe, pour y observer les pirouettes synchronisées des dauphins et orques. Malgré son succès populaire, le parc est sur la défensive face aux militants «anti-delphinariums».
Quelque 500 défenseurs des animaux venus de toute la France ont manifesté à la mi-juillet aux abords du parc d’Antibes (Alpes-Maritimes), prônant le boycott. «C’est bien un zoo marin dans lequel les orques et les dauphins n’ont pas plus de place pour se mouvoir qu’un poisson rouge dans un lavabo!», assenait un collectif animalier local, dénonçant des «dresseurs avec carottes et bâtons».
Samedi, au pic de l’affluence aoûtienne, un nouveau rassemblement est prévu. Depuis plus d’un an, les réseaux sociaux se déchaînent aussi contre la vingtaine de delphinariums de la planète.
La diffusion en 2013 aux États-Unis du documentaire «Blackfish» avait lancé un vif débat sur la captivité des orques. La célèbre entreprise américaine de parcs aquatiques SeaWorld, dont les revenus avaient diminué l’année suivante, a depuis entamé des travaux d’agrandissement de ses bassins.
Dans ce contexte, c’est l’émoi à Marineland, où travaillent notamment 50 «soigneurs», amoureux de leurs animaux. «La captivité est un fait, il faut faire en sorte que ça se passe bien», rétorque le directeur animalier du parc, Jon Kershaw. «Nés en captivité et habitués à être nourris, nos animaux marins ne survivraient pas s’ils étaient lâchés en mer».
La direction distribue désormais un long document répondant aux critiques récurrentes. Elle souligne que la capture de cétacés en milieu naturel est bannie en Europe et que 90% des mammifères marins de Marineland sont nés en parcs, elle affirme que l’espérance de vie moyenne des orques (entre 25 et 30 ans) est semblable en milieu artificiel et naturel.
La plus vieille orque de Marineland, Freya, est morte d’une maladie en juin, après 32 ans dans le parc. Les analyses des experts seront publiques. «On a pas envie de laisser les gens dire n’importe quoi, on fait les choses avec passion», insiste Delphine Dutoit, chargée de la communication.
«Les animaux ont besoin de défis»
Jon Kershaw, qui a commencé sa carrière de soigneur dans les années 70 en Grande-Bretagne, explique que les pratiques ont beaucoup évolué. «J’ai fait toutes les conneries qu’on nous reproche aujourd’hui!»
«Au début, on utilisait la nourriture pour motiver les cétacés, ça marchait le matin, l’après-midi plus du tout. L’animal regardait le seau à nourriture et pas le soigneur. Les animaux ont besoin de défis intellectuels, ils sont heureux si on leur donne une raison de vivre et ils doivent évoluer en permanence», dit-il.
Leur motivation pour participer aux spectacles? «Leur besoin de réussir, de devenir dominants pour se reproduire». «Ils sont nourris toute la journée en fonction de leurs besoins définis par un vétérinaire, la nourriture n’est jamais utilisée comme une arme», précise-t-il.
Marineland met en avant son travail pédagogique annuel auprès de 30.000 enfants scolarisés, sensibilisés à la protection des cétacés.
Fondé il y a 45 ans, désormais propriété du géant espagnol Parques Reunidos, le parc accueille 1,2 million de visiteurs venus admirer une quarantaine d’espèces, dont des ours polaires.
Un nouvel espace de luxe inauguré en juillet, le «Lagoon», permet de nager dans une piscine avec une paroi de verre en regardant les dauphins évoluer sous l’eau dans leur bassin attenant. Le parc propose en outre des rencontres encadrées avec les dauphins, permettant de les caresser.
L’observation de cétacés en mer, avec des bateaux envahissant des sanctuaires guidés par un appui aérien, est critiquable, selon Jon Kershaw. «C’est mieux d’avoir une structure équipée qui ne change pas la vie quotidienne de l’animal, ça évite les abus», juge-t-il, en affirmant que «le bonheur d’un orque ne se mesure pas en mètres carrés» (leur bassin à Marineland mesure 80 mètres de long pour 11 mètres de profondeur).
Des arguments qui ne convaincront jamais les puristes de l’association SOS Grand Bleu, qui organisent des sorties pédagogiques en Méditerranée, sans garantir de croiser un cétacé «libre et heureux». Car un grand dauphin a un habitat de 300 kilomètres et peut parcourir 1.000 kilomètres en 20 jours. Les orques plongent à 60 mètres de profondeur et parcourent jusqu’à 160 km par jour.
AFP