L’entrée en jeu de Miralem Pjanic, presque simultanée avec celle de Vincent Thill, a fait pencher la balance en faveur de la Bosnie (3-0).
Les consignes d’un coach, qui sont toujours plus importantes quand elles s’adressent à un gamin de tout juste 16 ans, ont empêché d’écrire l’histoire avec une lettre capitale vendredi soir. On jouait un peu plus que l’heure de jeu quand Luc Holtz et Mécha Bazdarevic ont appelé en même temps Vincent Thill et Miralem Pjanic.
L’espoir de tout le Luxembourg et le rêve passé ont rejoint leurs bancs en même temps mais le milieu romain, lui, n’a plus ni besoin qu’on lui dise quoi faire ni qu’on le rassure. Thill, si. Dommage. On voyait déjà «Mire» se retrouver aux côtés de son successeur et entrer au même moment que lui dans cette rencontre passage de témoin. Il a fallu attendre deux minutes que Holtz lâche son nouveau crack et le lance dans l’arène. Trop tard pour le symbole mais bien assez tôt pour le petit meneur de jeu messin, enfin né au football international.
Il n’en gardera pas le souvenir impérissable qu’en avait son frangin, Sébastien, buteur pour sa grande première contre la Macédoine (1-0), il y a quelques mois. Mais il faut dire que sous les impulsions de Dzeko et Pjanic, cette Bosnie a su appuyer quand il fallait pour mettre de l’ordre dans cet amical qui aurait fait désordre s’il s’était terminé sur le 0-0 qui prévalait encore à la 70e minute.
Tout juste éliminée de l’Euro fin 2015, la Bosnie n’avait sûrement pas envie de s’autoriser ce genre de péripétie gênante. Et au fil d’une deuxième mi-temps mieux maîtrisée, durant laquelle le Grand-Duché a reculé et beaucoup moins bien tenu le ballon qu’en première, il a suffi d’un oubli de Da Mota dans son dos (73e) pour que Chanot score contre son camp, puis d’un coup franc vite joué de Pjanic (75e) pour que Dzeko enfonce le clou, avant un bijou sur coup franc direct du maestro romain, pleine lucarne (90e) pour sceller un succès très logique, mais loin d’avoir été une énorme démonstration de force.
Moris et Jans, sacrés numéros
Les longues pauses hivernales des sélections nationales, celles dont bizarrement personne ne se plaint, ont quand même du bon. Quand on retrouve les Roud Léiwen et qu’on ne les a plus vus depuis quatre mois, on se rend toujours un peu mieux compte de ce qui a pu germer dans le cerveau de Luc Holtz quand il est en hibernation et dont il n’avait pas encore jugé utile de parler dans ses conférences de presse.
Comme cette nouvelle tendance à passer à trois défenseurs quand le Grand-Duché a le ballon et qui dessine une nouvelle étape symbolique dans sa volonté de faire du jeu. Sa nouvelle petite pierre à l’édifice national posée par un vendredi soir glacial contre une équipe bosnienne bis, en tout cas pas mal remaniée par un Mécha Bazdarevic qui se souciait peu des « origines » luxembourgeoises de Pjanic et de la volonté du public de voir ce qu’était devenu l’enfant du pays.
Il y a aussi une partie qui n’est pas du ressort du sélectionneur. La stature dingue qu’a pris Laurent Jans avec Beveren dans la quête de maintien du club waaslandien, par exemple, lui échappe encore mais lui fait beaucoup de bien pour bâtir son projet. Tout comme l’autorité dans les duels et à la baguette qui s’est affirmée chez Chris Philipps (celui de la première période, malgré une perte de balle agaçante devant sa surface), redevenu titulaire et installé dans l’entrejeu à Preussen Münster.
Et puis même sans jouer, Anthony Moris a prouvé que le sélectionneur a raison de penser qu’il tient la solution d’avenir et qu’il faut en prendre soin en lui offrant du temps de jeu.
On a toujours tendance à oublier, en effet, que les progrès de cette sélection nationale se mesurent aussi à l’aune de ceux réalisés par ses individualités, en dépit de tous les discours un peu lénifiants sur la nécessité de penser une équipe et uniquement en équipe. En ce Vendredi saint, au stade Josy-Barthel, on a vu, dans le collectif luxembourgeois, que certains ont encore grandi dans leurs coins et que c’est l’ensemble qui en profite.
On ne crachera cependant pas contre l’Albanie, mardi, sur une deuxième mi-temps un peu moins relâchée.
Julien Mollereau