Bloqué à Hesperange depuis janvier à cause d’un règlement de l’UEFA, l’international Luca Duriatti (17 ans, 1 sélection), ne pourra rejoindre Sarrebruck et l’Allemagne que cet été. Et s’il était né onze jours plus tôt, il aurait pu partir cet hiver.
Le petit milieu de terrain (1,66m, 60kg) a inscrit son premier but enseniors, dimanche avec le Swift face au RFCU (défaite 2-3 a.p.). Mais si ses pieds sont encore au Luxembourg,sa tête est en Allemagne depuisbientôt un an.
Quand Luc Holtz parle de ses jeunes talents, le nom de Luca Duriatti revient souvent sur la table. Pour tout dire, le sélectionneur national a largement dépassé ce stade où il parle simplement de ce n° 8 gaucher comme d’un joueur d’avenir. Pour preuve, il lui a offert une sélection, face à la Moldavie, en juin
(0-0). Il fallait le faire puisque, à l’époque, Luca Duriatti n’avait pas vraiment de club. Il s’entraînait au CFN de Mondercange et le Swift ne le faisait pas jouer pour une raison assez folle : le club de la capitale ne savait même pas que son joyau avait encore une licence… «On était persuadés qu’il avait signé à Sarrebruck» , rappelle Serge Wolf, alors entraîneur du Swift.
En réalité, Sarrebruck, désireux dès l’hiver de le faire jouer en 1 re Bundesliga dans la catégorie U19 (où évoluent également les Luxembourgeois Florian Bohnert, Tim Hall, Edvin Muratovic et Eric Brandenburger) se heurte au règlement de l’UEFA qui dit qu’un joueur mineur qui aspire à jouer dans un pays étranger doit résider à moins de 100 kilomètres du centre d’entraînement de son club.
Or Viamichelin et Mappy sont formels : il y a 113,7 kilomètres entre Kehlen et Sarrebruck. À une dizaine de bornes près, Duriatti aurait donc pu rejoindre l’Allemagne dès l’hiver dernier. «De janvier à mai, on aurait pu le faire jouer. C’est dommage car, on sait ce qu’il aurait pu apporter» , regrette aussi Wolf.
Si le joueur a été un peu perturbé par l’échec de son transfert à Sarrebruck, il ne faut pas voir en son détachement du Swift de l’époque un côté bad boy. «C’est un gamin gentil et très timide, considère Manou Cardoni, son coach en sélection U19 et U21. Il me disait : « Je m’entraîne toute la semaine à Mondercange, je ne vais pas prendre la place à un adulte qui fait tous les entraînements à Hesperange. » On l’a un peu poussé, car il fallait qu’il s’affirme. Cela fait du bien au Swift et aussi à lui-même, car il a besoin de faire des matches.»
Aujourd’hui, les apparitions de Duriatti avec l’équipe première du Swift se comptent encore sur les doigts de la main, mais il a rappelé son potentiel dimanche par une action splendide : un dribble sur le Racingman Kevin Lacroix enchaîné d’un tir hors de portée de Michaël Ménétrier. «C’était un beau but, oui. Ça me fait du bien de jouer des vrais matches avec un enjeu, c’est ça qui me manquait» , raconte le garçon.
Il a fait un essai à Hambourg
Luca Duriatti est un adolescent comme un autre, mais qui a plus de raisons que n’importe qui de considérer ses 18 ans comme une perspective de liberté. Majeur, il pourra partir où bon lui semble. Mais revoilà la poisse : il aura 18 ans le 11 février prochain, autrement dit onze jours après la fermeture du mercato hivernal. «Moi, je ne m’en plains pas, indique Carlo Tutucci, le nouveau coach du Swift. C’est un joueur qui nous rend meilleur.» «Jouer en Promotion, c’est mieux que de ne pas jouer du tout , synthétise Cardoni. Et puis, il n’est pas en train de perdre son temps. La formation qu’on fait au CFN est équivalente à celle de Sarrebruck. C’est juste que les matches qu’il pourrait jouer en Allemagne auraient été plus intéressants…»
Du bout des lèvres, Duriatti reconnaît qu’il s’apprête à «perdre six mois» en PH, une façon de dire que sa progression est un peu ralentie tant qu’il reste au Luxembourg.
Ce contretemps pourrait aussi avoir une vertu : le temps a passé et Sarrebruck n’est plus le seul club allemand sur les rangs. D’autres, d’une plus grande envergure, l’auraient aussi dans le viseur. Il a d’ailleurs effectué un essai avec les U21 de Hambourg cet été. Et si finalement, ce passage en salle d’attente était un mal pour un bien?
Matthieu Pécot