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Loi du travail : Valls recule sur les points sensibles


Le Premier ministre Manuel Valls reçoit le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez (R) lundi à Matignon sur le projet contesté de réforme du Code du travail, le 14 mars 2016. (Photo : AFP)

Manuel Valls a reculé lundi sur les articles les plus contestés du projet de loi travail, dont le barème des indemnités prud’homales, une initiative saluée par les syndicats dits «réformistes» mais décriée par le patronat, tandis que CGT, FO et Unef ont maintenu leurs appels à manifester.

Signe que le gouvernement veut faire vite, ce texte modifié et qualifié par le Premier ministre de réforme «intelligente, audacieuse et nécessaire», sera transmis dès mardi au Conseil d’Etat, avant d’être présenté en conseil des ministres le 24. A l’approche d’une nouvelle journée d’action à l’appel du syndicat étudiant Unef jeudi, et d’une journée de grève et de mobilisation maintenue à l’appel de sept syndicats dont la CGT le 31 mars, le gouvernement a reculé sur plusieurs points sensibles.

«Les réactions» que ce projet «a suscitées, les questionnements, les inquiétudes qu’il a soulevées (…) ont rendu nécessaire une nouvelle phase de concertation. C’est donc à un nouveau départ de ce texte que j’appelle», a dit Manuel Valls. Dans la soirée, invité à dire sur France 2 si le projet de loi pourrait encore évoluer, il n’a pas répondu explicitement, mais a défendu «les grands équilibres» trouvés sur le texte, soulignant que «le Parlement va faire son travail» et se disant confiant sur la possibilité de «convaincre».

De son côté, la ministre du Travail Myriam El Khomri a insisté sur TF1 sur le fait que «trouver un point d’équilibre n’est pas un recul». L’une des mesures-phare les plus décriées du texte a été modifiée: le barème plafonnant les indemnités prud’homales sera seulement «indicatif». Il devait atteindre un maximum de 15 mois de salaire, mais Matignon «ne ferme pas la porte» à des évolutions.

La CFDT, pour qui le retrait de cette mesure était une «condition sine qua non», s’en est réjouie et son secrétaire général Laurent Berger a jugé le texte porteur de «progrès pour les jeunes et les salariés». Mais Pierre Gattaz, président du Medef, s’est dit «déçu» par ce recul, et François Asselin, dirigeant de la CGPME, a dit craindre une «réforme à l’envers». Sur le licenciement économique, autre article décrié, la copie a également été revue, la CFTC se félicitant notamment d’avoir «été entendue»: le juge pourra vérifier que les multinationales n’organisent pas artificiellement leurs difficultés économiques sur le territoire français pour licencier.

En outre, les dirigeants de petites et moyennes entreprises (PME) ne pourront pas appliquer le forfait-jours ou moduler les astreintes sans passer par un accord collectif, mais ils pourront négocier avec un salarié mandaté par un syndicat s’ils n’ont pas de représentation syndicale. A défaut d’accord, le droit actuel s’appliquera. L’avant-projet fixait jusque-là des droits moins favorables aux salariés.

Mobilisation « plus que jamais d’actualité »

Des droits nouveaux sont annoncés: la garantie jeunes, dispositif d’accompagnement vers l’emploi, va devenir un droit pour tous les jeunes sans emploi ni formation. Son coût est estimé à environ 420 millions d’euros en 2017, selon une source gouvernementale. Et le plafond du compte personnel de formation sera relevé de 150 à 400 heures pour les salariés sans diplôme. Après ces annonces, le secrétaire général de Force ouvrière (FO) Jean-Claude Mailly a réitéré sa demande de retrait du projet. Pour son homologue de la CGT, Philippe Martinez, la mobilisation contre ce texte est «plus que jamais d’actualité», tout comme pour l’Unef.

Lors de la conférence de presse, le Premier ministre a dit «assumer les désaccords» avec la CGT et FO, qui aux côtés de l’Unef ont maintenu l’appel à manifestations et grèves le 31 mars. Contrairement à l’Unef, qui planifie une journée d’action le 17 mars, la Fage a jugé que la nouvelle version permettait «la poursuite du dialogue» et n’appellera pas à la mobilisation. Enfin, la CFE-CGC décidera le 21 mars si le projet «a suffisamment bougé». Du côté de la majorité, qui était très critique ces dernières semaines, un nouveau séminaire réunissant certains députés PS avec Manuel Valls s’est tenu lundi soir.

Dans une atmosphère plus calme que la semaine précédente, la majorité des participants se sont dits «plutôt satisfaits des évolutions», à l’image du rapporteur pressenti, Christophe Sirugue, qui avait posé ses conditions pour accepter cette fonctions. «Ca va mieux», «il y a de vrais bouger», a-t-on pu entendre. Le chef de file des frondeurs Christian Paul a cependant jugé qu’il n’y avait «rien de supplémentaire, ni de surprenant».

Se voulant confiant, Bruno Le Roux, chef de file des députés PS, a assuré qu’il y aurait une «majorité de progrès» à l’Assemblée pour voter ce texte. A droite, plusieurs voix ont regretté l’évolution du texte, à l’instar de François Fillon (Les Républicains), qui y a vu «des reculs considérables». La presse quant à elle voit mardi dans cette version +corrigée+, une «nouvelle volte-face» du gouvernement qui «ne contente personne au final» et qui ne devrait pas «désamorcer la contestation» de la rue.

Le Quotidien/AFP