Les polices française et belge multiplient les opérations contre le réseau jihadiste à l’origine des attentats de Bruxelles et de Paris, quasiment « anéanti » selon les autorités françaises.
Sous la pluie, des Belges en deuil se sont rassemblés vendredi soir place de la Bourse à Bruxelles, une chandelle ou une fleur à la main, pour rendre hommage aux 31 morts et 300 blessés du carnage de mardi, sur fond de colère montante contre leur gouvernement qui a laissé passer des jihadistes à travers les mailles du filet.
Neuf interpellations
Attestant encore un peu plus de l’étroitesse des liens entre les jihadistes ayant ensanglanté les deux capitales, trois nouvelles interpellations et deux perquisitions ont eu lieu vendredi à Bruxelles, en lien avec l’arrestation, la veille près de Paris, d’un homme soupçonné de projeter un attentat.
Lors de l’opération menée trois jours après des attaques-suicides à l’aéroport et dans le métro de Bruxelles, la police belge a tiré dans la jambe d’un des suspects en pleine rue. Cela porte à neuf les interpellations depuis jeudi soir en région bruxelloise, la justice belge ne faisant à ce stade aucun recoupement avec les deux suspects encore en fuite des attentats de mardi.
Abdeslam minimise son rôle à Paris
Le parquet fédéral belge a aussi indiqué vendredi que Salah Abdeslam, suspect-clé des attentats parisiens du 13 novembre incarcéré depuis une semaine, avait opéré un revirement de stratégie et refusait désormais de coopérer.
« Entendu immédiatement » après les attentats de mardi, « il a refusé de faire la moindre déclaration », a dit le parquet. Selon des procès-verbaux de son audition du 19 mars publiés dans des médias français, il a minimisé son rôle le 13 novembre, chargeant son frère Brahim et Abdelhamid Abaaoud, son ami d’enfance qu’il dit à peine connaître.
En France, le président François Hollande a affirmé que le réseau responsable des attentats de Paris et Bruxelles était « en voie d’être anéanti », même si d’ « autres réseaux » constituent encore « une menace ».
Les autorités françaises avaient annoncé jeudi la mise « en échec » d’un projet d’attentat « à un stade avancé » grâce à l’arrestation de Reda Kriket, un ancien braqueur de 34 ans, qui a conduit à la découverte de fusils d’assaut et d’explosifs dans un appartement d’Argenteuil (banlieue nord de Paris).
Lors d’un procès en Belgique d’une filière jihadiste vers la Syrie, il avait été condamné par contumace en 2015 pour « participation aux activités d’un groupe terroriste ». Un de ses coprévenus était Abdelhamid Abaaoud, qui a eu un rôle clé le 13 novembre.
Les frères El Bakraoui sur une liste anti-terroriste américaine
Les liens apparaissent de plus en plus étroits entre les commandos du 13 novembre et ceux du 22 mars. L’homme soupçonné d’avoir été l’artificier des attaques de Paris, le Bruxellois d’origine marocaine Najim Laachraoui, est avec Ibrahim El Bakraoui un des deux kamikazes de l’aéroport de Zaventem, selon le parquet fédéral.
Des traces de son ADN ont été retrouvées dans plusieurs planques belges des membres des commandos parisiens, mais aussi « sur un gilet explosif et un morceau de tissu utilisés au Bataclan, et sur un engin explosif du Stade de France » à Paris, a énuméré le parquet.
Selon la chaîne américaine CNN, Ibrahim El Bakraoui figurait sur une des listes antiterroristes des États-Unis « avant les attentats de Paris », et son frère Khalid, qui s’est fait exploser dans le métro de Bruxelles, y a été ajouté « peu après ».
La « gaffe » d’un policier belge
Vendredi, devant une commission parlementaire, trois ministres belges, Didier Reynders (Affaires étrangères), Koen Geens (Justice) et Jan Jambon (Intérieur), ont dû s’expliquer pendant plusieurs heures sur le cas d’Ibrahim El Bakraoui, ancien condamné ayant échappé à la justice belge après sa libération conditionnelle en 2014.
La Turquie, qui l’avait arrêté à l’été 2015 près de la Syrie, puis expulsé dans un avion vers les Pays-Bas, a reproché aux autorités belges d’avoir ignoré son « profil terroriste » et raté son arrestation à son retour.
En réponse, les ministres belges ont mis en cause le flou des informations transmises par Ankara, mais ont aussi dénoncé la manière « inacceptable » dont celles-ci avaient été traitées par un policier belge en poste à Istanbul. « Une personne issue de l’appareil policier a gaffé », a admis Jan Jambon.