Avec Thibaut Pinot, Romain Bardet et Jean-Christophe Péraud, le cyclisme français joue – presque – d’égal à égal avec ses rivaux dans le Tour de France.
Le podium de l’an passé avec Péraud (2e) et Pinot (3e) encadrant le vainqueur italien Vincenzo Nibali a marqué les esprits. Depuis près de trente ans et la victoire de Bernard Hinault (1985), les supporters français attendaient pareille performance.
Le cyclisme bleu-blanc-rouge est-il sorti de la longue période de disette qui a suivi le Tour 1998, l’affaire Festina, l’époque du dopage sanguin à grande échelle? Pinot et Bardet, tous deux nés en 1990, symbolisent cette renaissance dans les grandes courses par étapes, qui se double de l’affirmation de Nacer Bouhanni (24 ans) et du potentiel d’Arnaud Démare (23 ans).
À 38 ans, Péraud est évidemment le doyen d’âge. Mais l’ingénieur de l’équipe AG2R La Mondiale affiche un parcours comparable à celui de ses cadets. Longtemps cantonné au VTT, il est passé professionnel la même année que Pinot à la FDJ (2010) pour mener une carrière sur route qui l’a propulsé à la deuxième place du Tour.
L’éclat du trio enthousiasmant de l’été dernier a éclipsé Pierre Rolland (28 ans), pourtant quatrième du Giro quelques semaines plus tôt. Mais l’Orléanais, dont le palmarès comporte deux étapes de haute montagne dans le Tour, reste dans le jeu trois fois dans les 11 premiers tout comme Tony Gallopin (27 ans), vainqueur d’une étape et maillot jaune durant une journée en 2014.
«Ecore un peu de boulot»
«Nous avons une génération en train d’arriver au plus haut niveau mondial, estime Vincent Lavenu, le responsable de l’équipe de Bardet et Péraud. Je ne sais pas si l’écart est complètement gommé, mais sur ce qu’on a vu cette année au Dauphiné et au Tour de Suisse, c’est encourageant.»
Sera-t-elle capable de viser la victoire dès cette année? «Peut-être pas encore, répond Lavenu. Mais les Français ont franchi ces dernières années des paliers importants. Je suis assez confiant pour l’avenir. Dans les trois, quatre ans, on doit avoir un coureur capable de remporter le Tour.» «Le podium est de nouveau envisageable, assure Philippe Mauduit, qui assiste à l’éclosion de cette superbe génération de son poste de directeur sportif d’une équipe étrangère (Lampre). Pour arriver au niveau de Froome, Quintana, Contador, il y a encore un peu de boulot à faire. Mais les jeunes Français n’ont pas peur d’attaquer et, comme ils ont des qualités physiques de très haut niveau, ça leur permet d’aller gagner de belles étapes.»
«C’est encore un peu tôt pour nous», confirme Thibaut Pinot, qui demande de la patience : «J’ai encore des choses à apprendre. Ce qui manque, c’est encore un peu d’expérience.»
Pour Lavenu, l’écart par rapport aux sommets de la hiérarchie existe, sans être pour autant rédhibitoire : «Physiquement, ils sont 2 ou 3 % derrière, mais cette différence peut être comblée avec les éléments extérieurs, l’enjeu du Tour, l’approche collective et tactique de la course. Il faut aussi des circonstances favorables, tenir compte des aléas et de la réussite.»
«Pinot, Bardet, et je n’oublie pas Péraud, sont tout proches des tout meilleurs, avance-t-il. Il ne manque plus grand-chose. Mais ces 2 ou 3 %, c’est à la fois peu et beaucoup à combler.»
LQ/AFP