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Les enseignants en grève face à la réforme du collège


La ministre Najat Vallaud-Belkacem l'a dit à plusieurs reprises: la réforme du collège entrera en vigueur, comme prévu, à la rentrée 2016. (photo AFP)

Personnalités politiques et intellectuels ont multiplié les prises de positions ces derniers jours sur la réforme du collège. C’est au tour des enseignants opposés au projet du ministère français de l’Education de faire entendre leur voix, avec un appel à la grève ce mardi.

Une intersyndicale, composée d’organisations habituellement opposées, appellent les professeurs à descendre dans la rue. A Paris, le défilé devrait partir du Luxembourg en début d’après-midi. Se retrouveront côte à côte le Snes-FSU, majoritaire dans l’enseignement secondaire, le Snep-FSU, le Snalc (classé à droite), FO, la CGT et Sud. Ils représentent ensemble 80% des votes des enseignants du collège lors des élections professionnelles de décembre dernier, auxquelles avaient pris part quelque 40% des professeurs.

Tous n’ont pas le même mot d’ordre. Si le Snalc, FO, la CGT et Sud réclament le retrait pur et simple de la réforme présentée par la ministre Najat Vallaud-Belkacem, le Snes souhaite une reprise des discussions. Mais la ministre l’a dit à plusieurs reprises: la réforme du collège a été approuvée à 51 voix pour (et 23 contre) par le conseil supérieur de l’éducation début avril et entrera donc en vigueur, comme prévu, à la rentrée 2016.

Elle a toutefois demandé à une autre instance, le conseil supérieur des programmes, de rendre plus lisibles les articulations des cours de français avec les langues et cultures de l’Antiquité, afin d’apaiser les professeurs de lettres classiques, mécontents de la suppression des options latin et grec.

La réforme est impérative, selon Mme Vallaud-Belkacem, en raison de la dégradation des résultats moyens en fin du collège, soulignée par les études internationales. Les écarts entre les bons élèves et les moins bons se creusent sur cette période, et l’origine sociale pèse sur le destin scolaire des petits Français bien plus que dans les autres pays de l’OCDE.

« Pas de tsunami »

Le projet prévoit la suppression des options latin/grec et des classes bilangues (deux langues étrangères en sixième, pour 16% des élèves). Il inscrit à la place une initiation aux langues et cultures de l’Antiquité et deux langues étrangères dès la cinquième pour tous les collégiens.

Le débat des politiques et intellectuels s’est surtout focalisé sur ces deux points, synonymes pour les opposants d' »un nivellement par le bas ». Mais pour les syndicats pro ou anti-réformes, les mesures clé, bien que moins médiatiques, sont l’autonomie accrue des établissements et les enseignements interdisciplinaires.

Chaque établissement décidera de 20% de son emploi du temps pour du travail en petits groupes, de l’accompagnement personnalisé pour tous et de nouveaux enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI). « Une autonomie non pas pour les enseignants, mais pour le chef d’établissement », assure Frédérique Rolet, co-secrétaire général du Snes.

Les enseignements interdisciplinaires, qui associent plusieurs matières au sein d’une même leçon, font tiquer une partie des syndicats, dans un pays où le corps professoral se distingue par un attachement très fort à un professeur/une discipline, même si ce type d’enseignement est pratiqué (de manière ponctuelle) dans nombre d’établissements. Les syndicats anti-réforme craignent que les EPI grignotent les horaires de chaque discipline, n’introduisent de la concurrence entre professeurs et profitent surtout aux bons élèves.

Plusieurs organisations soutiennent le projet de la rue de Grenelle: les deux syndicats dits réformateurs, le SE-Unsa et le Sgen-CFDT (20% des enseignants du collège) et les fédérations de parents d’élèves (FCPE), de lycéens (UNL) et des étudiants (Unef), classées à gauche.

La Peep, autre fédération des parents d’élèves, plutôt classée à droite, ne soutient pas ouvertement la réforme mais n’appelle pas à la grève. L’Apel, la fédération des parents du privé – auquel la réforme des collège s’applique aussi – indique par la voix de sa présidente Caroline Saliou voir plusieurs points positifs dans les mesures énumérées.

Frédérique Rolet, du Snes, parie sur « une mobilisation importante ». Christian Chevalier, son homologue du SE-Unsa (pro-réforme), s’attend à ce que le mouvement soit très suivi par les professeurs de langues anciennes et d’allemand. Mais « on n’aura pas un tsunami », avance-t-il en s’appuyant sur des remontées du terrain. « Pour le moment, les profs ne sont pas dans le registre de la colère ».

AFP