L’économiste français Thomas Piketty, engagé au côté du candidat socialiste à l’élection présidentielle Benoît Hamon, a soutenu dimanche la création d’une assemblée de la zone euro, un « mécanisme de prise de décision démocratique ».
Critiquant l’inertie du Conseil des ministres des Finances de la zone euro dans la prise de décisions, notamment sur la dette grecque ou sur un impôt commun visant les multinationales, M. Piketty a proposé sur France inter de « remplacer » cette instance par une « assemblée de la zone euro ».
Cette chambre parlementaire comprendrait « 100 à 150 membres », représentant chaque pays « en proportion de la population et des groupes politiques », a détaillé le chercheur, chargé des questions européennes dans l’équipe de campagne de M. Hamon.
Elle intégrerait ainsi « 30 députés allemands, 25 français », a-t-il ajouté.
Ce changement de mécanisme de prise de décision, non plus à huis clos mais avec délibération parlementaire, « suppose un nouveau traité », dont la base du projet ne nécessiterait pas l’unanimité des pays de la zone euro mais l’accord des quatre pays représentent 77% de la population européenne, soit l’Allemagne, la France, l’Italie et l’Espagne.
« Si la France met sur la table une telle proposition, l’Allemagne sera obligée de faire un compromis » et ne pourra « pas dire non à toute forme d’union politique parlementaire » au sein de la zone euro, a assuré M. Piketty.
« L’Europe a très très mal géré la crise financière de 2008 » car « on n’arrive pas à prendre des décisions collectivement », notamment sur la réduction de la dette grecque depuis cinq ans, a observé l’économiste, très critique à l’égard de François Hollande et qui a refusé en 2015 sa nomination pour la Légion d’honneur au rang de chevalier.
Selon lui, ce nouveau mécanisme permettrait d’avancer sur le problème de la dette et d’aller « au bout de la monnaie unique », en mettant par exemple la dette supplémentaire accumulée depuis la crise financière « dans un fond commun » européen et en « mutualisant le taux d’intérêt ».
« L’Europe s’est construite dans les années 1950 sur des annulations de dettes autrement plus massives que la dette grecque », notamment la dette extérieure allemande, a rappelé l’expert, relevant une « amnésie historique » de la part de certains dirigeants européens.
Le Quotidien / AFP