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Le président argentin dans la tempête des « Panama Papers »


Le président de l'Argentine Mauricio Macri lors d'une interview au palais présidentiel à Buenos Aires, le 22 février 2016. (Photo : AFP)

La tempête des «Panama Papers» qui balaye la planète a frappé de plein fouet jeudi l’Argentine avec l’ouverture d’une enquête sur le président Mauricio Macri, dont le nom figure sur les registres de sociétés offshore.

Cette annonce spectaculaire apparaît comme un revers de taille pour ce président qui prônait pourtant une lutte sans merci contre la corruption.

L’enquête devra notamment déterminer si Mauricio Macri, élu en novembre dernier, a «omis» de compléter sa déclaration de patrimoine, qui était obligatoire, selon un document du parquet. Mercredi, un député argentin de l’opposition avait déposé plainte pour évasion fiscale contre lui.

Le nom du président de centre-droit apparaît dans deux sociétés offshore: Fleg Trading Ltd, des Bahamas, qui a existé de 1998 à 2008, et Kagemusha SA, du Panama, créée en 1981. Depuis le début, le chef de l’Etat argentin affirme qu’il n’a commis aucune irrégularité et n’a détenu aucune participation dans ces entreprises du groupe Macri, propriété de son père Franco, riche homme d’affaires italien qui a fait fortune en Argentine.

A l’autre bout de la planète, en Russie, son homologue russe, le président Vladimir Poutine, a balayé jeudi les accusations contre son entourage après les révélations des «Panama Papers». «Quel élément de corruption? Il n’y en a aucun», a déclaré le chef de l’Etat, accusant les États-Unis d’être derrière cette vaste enquête qui met en lumière d’importantes pratiques financières et fiscales opaques de personnalités, chefs d’Etat, entrepreneurs, sportifs, etc.

Les journalistes d’investigation membres du consortium international ICIJ, basé à Washington, «ont passé au peigne fin ces paradis fiscaux, mais votre humble serviteur n’y figurait pas», a-t-il ironisé. «Alors qu’est-ce qu’ils ont fait?», a demandé M. Poutine, qui s’exprimait publiquement pour la première fois sur le sujet. «Ils ont trouvé certaines de mes connaissances et certains de mes amis» et suggéré que leurs activités «avaient un élément de corruption», a-t-il poursuivi, défendant son ami violoncelliste Sergueï Roldouguine, ciblé par la presse.

Foot et banques

Pour l’instant, le dirigeant le plus notable renversé par le scandale est le Premier ministre islandais, qui a quitté son poste sous la pression d’une rue outrée par le fait qu’il ait contrôlé une société basée dans les îles Vierges britanniques. Créer ou posséder une société offshore n’est pas illicite en soi, mais cela avive les soupçons d’évasion fiscale, voire de corruption.

Le Premier ministre britannique David Cameron est lui à la manoeuvre pour ne pas se laisser embourber dans ce dossier où apparaît le nom de son défunt père. La presse soulignait jeudi que M. Cameron avait écrit en 2013 une lettre au président du Conseil européen pour suggérer un moindre contrôle sur les fonds fiduciaires, ce que l’opposition trouve contradictoire avec les promesses du gouvernement de faire le maximum pour boucher les failles du système fiscal international.

Des médias du monde entier participant aux révélations continuaient eux de dévider la pelote de noms des clients du cabinet d’avocat panaméen Mossack Fonseca, dont 11,5 millions de documents ont atterri entre leurs mains. Après la Fifa et son nouveau président Gianni Infantino, le président (suspendu) de l’UEFA Michel Platini, et quelques joueurs en activité, comme la superstar Lionel Messi, les «Panama Papers» pointent les dirigeants du football français, relève le journal Le Monde.

Le président du FC Nantes, Waldemar Kita, et celui de l’AS Monaco, Dmitri Ryobolev, sont actionnaires de sociétés offshore, d’après le journal français. Le secteur bancaire est aussi éclaboussé par ce scandale. Deux dirigeants sont ainsi tombés jeudi: le patron de la banque régionale autrichienne Hypo Vorarlberg, Michael Grahammer, et un membre du conseil de surveillance de la banque néerlandaise ABN Amro, Bert Meerstadt.

Au Royaume-Uni, le gendarme financier a donné jusqu’au 15 avril aux banques pour préparer leurs explications sur leurs relations avec Mossack Fonseca. Le président français François Hollande a lui prévenu que les sociétés prises en fraude «seront poursuivies».

Panama veut négocier

La pression des derniers jours a poussé le président panaméen à afficher sa volonté de négocier. «Je lance un appel aux pays de l’OCDE pour qu’ils reviennent à la table des négociations, que nous cherchions un accord, et qu’on n’utilise pas le contexte actuel pour écorner l’image du Panama», a déclaré le président panaméen Juan Carlos Varela.

Depuis les premières révélations des médias membres du consortium d’investigation ICIJ, le Panama est cloué au pilori à cause de sa législation accommodante pour les montages fiscaux offshore et son attitude à contre-courant de la tendance mondiale vers la transparence fiscale. Le Panama est critiqué pour son refus d’appliquer un nouveau standard quasi-mondial: l’échange automatique d’informations fiscales entre pays, mis récemment en place sous l’impulsion de l’OCDE, l’institution qui pilote ce dossier.

«S’il y a des améliorations dans la manière dont ces mécanismes sont appliqués, je suis prêt à les appliquer», a ainsi déclaré le président du Panama.

Le Quotidien/AFP