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Le portrait du jeudi – Marc Sales, catégorie poids lourd


Gérant associé de la société familiale, président du club de handball de Käerjeng, MARC SALES aime relever des défis mais, surtout, les réussir !

Handball. Marc Sales. 09/03/2015. ( Photo Julien Garroy )

Lundi après-midi, Marc Sales a bravé les consignes de sécurité… (Photo : Julien Garroy)

Tous dans le Discobus ! Vous devriez venir, vous aurez rarement l’occasion de faire une interview dans de telles conditions!» Samedi soir, on décline poliment l’invitation de Marc Sales – tout en le regrettant presque aussitôt – se contentant de regarder le président de Käerjeng et ses joueurs, vainqueurs quelques instants plus tôt de la Coupe de Luxembourg aux dépens de Dudelange (34-28), s’engouffrer puis partir à bord d’un drôle d’engin siglé CULT où cohabitent banquettes en cuir, écran géant et miroirs. Le tout balayé par des spots multicolores au rythme de sons d’une musique de boîte de nuit.

Lundi, 16 h. Rue Laangwiss, zone industrielle de Bascharage. Siège de Sales-Lentz. Avant de se confier durant près de deux heures, Marc Sales se prête de bonne grâce à la multiplication des prises de vues avec le photographe au milieu des entrepôts et en profite pour nous présenter quelques spécimens. Comme ce Cool Bus américain datant de 1975 à l’intérieur revisité en bar où le fût sert de la Battin. « On en a un autre, rigole-t-il, mais celui-là, c’est pour les femmes : on y sert du crémant et, surtout, il y a des WC… » Un peu plus loin, le patron s’arrête : « En mai, on aura un nouveau modèle réservé à la business class. On pourra y dîner. Ce sera la plus grande limousine d’Europe… »

Des idées, Marc Sales en a à revendre. Au propre comme au figuré. Un « talent » qu’il doit tenir de Jos Lentz, son grand-père maternel, qui effectua dès 1948 une sorte d’étude de marché avant de voir sa fille Agnès reprendre l’affaire avec son mari, Henri Sales, en 1961. « La semaine, il était marchand de charbon, explique le petit fils. Le week-end, il nettoyait le camion et installait des bancs. Il emmenait les gens voir des matches du Progrès ou de la Jeunesse. » Moyennant finance évidemment.

En 1993, avec son frère Jos, il reprend la destinée d’une société familiale qui, depuis, a septuplé le nombre de ses salariés. « Nous sommes passés de 180 à 1 200 collaborateurs toutes filiales confondues (NDLR : ce qui lui permet de figurer dans le top 3, derrière les CFL et Luxair, des entreprises spécialisées dans le transport de voyageurs, et de se situer aux alentours de la 25e place toutes sociétés confondues au Grand-Duché) », affirme celui qui, en 2004, s’inspira des compagnies d’avion à bas coûts et lança Flibco. « Quand je vois quelque chose qui m’intéresse, je me pose toujours la même question : comment je peux l’adapter à la société ? » Résultat : la compagnie a véhiculé quelque 1,2 million de voyageurs en 2014 – soit près de quatre fois plus qu’en 2012 (324 510) – en direction de 54 destinations au travers de cinq pays (Allemagne, Belgique, France, Luxembourg et Portugal) dont quelques plages et des stations d’hiver.

> Diplomatie, écologie, Zorro et marathon de New York

Le bureau du gérant associé de Sales-Lentz se trouve au 2e étage. De l’autre côté du mince couloir se trouve celui de son frère, Jos. Les deux travaillent ensemble, mais les tâches sont toutefois bien réparties. « On s’est très vite rendu compte qu’on était diamétralement différents. Lui s’occupe de l’administration et des collaborateurs; moi je m’occupe de la création du produit. Pour faire simple, lui c’est le ministre de l’intérieur et moi celui de l’extérieur… »

Des deux frangins, Marc jouit de la plus grande visibilité. Ce dont ne prend pas ombrage Jos, qui a d’autres casquettes telles que celles de représentant de la Fédération luxembourgeoise des exploitants d’autobus et d’autocars (FLEAA), vice-président de la Confédération luxembourgeoise du commerce (clc), président de l’ASBL Study-Help (association venant en aide aux étudiants en Roumanie) et membre du conseil d’administration de l’International Road Union (IRU), l’association internationale des exploitants d’autobus, de taxis et de camions. Entre les deux, rien ne peut venir s’interférer. « Jamais quelqu’un de l’entreprise n’a assisté à une discussion agitée entre nous, confie Jos. Si lors d’une réunion on sent qu’il y a un désaccord entre nous, on dit aux autres membres : « Vous aurez notre réponse demain. » Et on en discute entre nous. La porte fermée ! »

Le « ministre de l’extérieur » se garde de révéler sa sensibilité politique. Histoire de ne froisser personne. Si elle est compréhensible, cette prudence détonne chez cet homme à la voix rauque et caverneuse qu’on se plaît à imaginer partir dans de fulgurants coups de gueule. Une impression confirmée par Chris Auger, gardien de Käerjeng et employé au sein de l’entreprise. « Il devient tout rouge et crie très fort ! », s’amuse l’international luxembourgeois. « Parfois, je peux réagir sous le coup de l’émotion», reconnaît Marc tout en précisant que «la plupart du temps, (ses) décisions sont bien réfléchies ». Comme celle de ne pas parler de politique donc. Un domaine qu’il ne s’imagine pas embrasser. « Je n’en ferai jamais ! » Jadis, son nom est apparu quand il s’est agi de trouver un successeur à Camille Gira à la présidence de la fédération de handball. Il dément : « Je pense que je ne suis pas assez diplomate… »

Marc Sales est donc de la race des fonceurs. Des lève-tôt, même s’il ne se réveille plus comme autrefois à 4 h pour aider Henri, son père décédé en avril 2014, à « nettoyer les bus à la brosse ou changer la housse des têtières ». Le soir venu, du haut de ses 15 ans, Marc prend le volant de ces poids lourds et s’amuse à les ranger dans le hangar, placé à l’arrière de la maison familiale située rue de la Résistance à Bascharage, selon un « plan bien défini en fonction du programme du lendemain ». Durant ces séances, il travaille une aisance et un coup d’œil qui lui permettra, en 1990, de décrocher à Zadar le surprenant titre de « champion d’Europe d’agility ». Le trophée se trouve encore dans son bureau.

De son bureau, Marc Sales domine une partie d’un groupe comptant 500 véhicules qui consomment à l’année quelque 7,5 millions de litres de gazole. Une consommation qui pourrait baisser à l’avenir, puisque le groupe, qui fut l’un des tout premiers au Grand-Duché à équiper ses hangars de panneaux photovoltaïques (« on produit désormais plus d’électricité qu’on n’en consomme »), planche sur des projets de bus tout-électriques. « Pour 2018 ou 2019 », promet le patron qui ne se considère pas comme un ayatollah de l’écologie mais comme « quelqu’un qui souhaite agir à (son) échelle » et qui roule en BMWi3. « Pour préserver notre planète. »

La planète, il la sillonne depuis longtemps. Enfant, il se souvient de ses vacances à la montagne en décembre. Le seul et unique voyage annuel que la famille Sales effectuait au complet. C’est-à-dire avec les parents (Henri et Agnès) et les enfants (Jos, Danielle et Marc). « À l’époque, il fallait être joignable constamment pour les clients. Donc rester près du téléphone. Et où se trouvait le téléphone ? À la maison… »

S’il estime que le portable a révolutionné son existence, il le débranche dès qu’il le peut. En août 2013, il s’en est allé en Suède disputer la Fjällraven Classic, épreuve qui consiste à parcourir les 110 kilomètres séparant Nikkaluokta d’Abisko en cinq jours en suivant le sentier de Kungsleden (« Le Sentier du Roi »). « Après deux heures de marche, je ne captais plus. C’est une récupération mentale énorme ! » Dans quelques mois, il remettra ça en compagnie de sa femme et de son fils. Et ce après s’être astreint à une petite préparation physique entamée le 1er mars. « Je ne fais des choses que si j’ai un objectif précis à atteindre ! »

Comme en 2009, quand il décide de disputer son premier marathon de New York. Six mois plus tard, il coupera la ligne d’arrivée. Pour immortaliser l’instant, son épouse lui offrira une toile représentant l’épreuve au passage du pont de Brooklyn et sur laquelle figurent les empreintes de ses baskets. En 2012, après un pari perdu, il décide de rejoindre Paris à vélo. Et ce pour encourager son ami depuis 30 ans Jos Steffen, au départ du marathon. Pour ce dernier, « Marc sait ce qu’il veut et met tout en œuvre pour l’obtenir ». Dans le jargon moderne du sportif, lui, l’ancien champion national junior d’escrime (épée), serait un « compétiteur ». Un sport qu’il pratiqua car « maman trouvait ça gracieux et Zorro passait encore à la télé »… avant de se tourner à 19 ans vers une carrière de gardien de handball. Après des débuts à Echternach, il rejoint Bascharage qu’il ne quittera plus. Samedi, lors de la seconde mi-temps de la finale de la Coupe, il a conseillé à Chris Auger de choisir le côté gauche sur un penalty. Bon choix, puisque le portier stoppera le tir. « Il est charismatique et a une énergie folle. C’est vraiment un sacré personnage ! »

Un personnage qui sait aussi décompresser. « Si on sait travailler, il faut aussi savoir faire la fête ! », dit le quinquagénaire tout en confiant « mettre cinq jours à récupérer d’une soirée ».

Un personnage toujours en mouvement, malgré un genou foutu. D’ailleurs, à voir son imposante silhouette, on lui demande son gabarit. Réponse amusée : « On va dire que je ne suis pas assez grand au vu de mon poids… »

De notre journaliste Charles Michel

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