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Le FMI sonne l’alarme contre la « menace » protectionniste


"Tourner le dos au commerce ne peut qu'aggraver et prolonger le marasme actuel de l'économie mondiale", affirme le chef économiste du FMI, Maurice Obstfeld. (photo AFP)

De l’ascension de Donald Trump au Brexit, le protectionnisme a la cote sur le globe et donne des sueurs froides au FMI, qui y voit un péril majeur pour une économie planétaire en berne.

« Les pressions croissantes vers des mesures de repli constituent une menace exceptionnelle pour la croissance mondiale », résume le Fonds monétaire international dans ses nouvelles projections économiques publiées mardi. En l’absence de cataclysme imminent à l’horizon, le Fonds a certes laissé inchangées ses prévisions de croissance mondiale pour cette année (3,1%) comme pour 2017 (3,4%), réaffirmant son diagnostic dressé en juillet.

Mais, note le FMI, huit ans après la crise financière, l’économie mondiale donne encore des signes de grande « fragilité » et semble bien loin de renouer avec la rapide expansion des années 2000 (5,6% en 2007).

Cette croissance morose, qui s’accompagne d’un chômage persistant, de salaires stagnants et d’inégalités croissantes, a désormais un coût, selon le FMI: elle nourrit un discours « accusant la mondialisation de tous les maux » et prônant le repli sur soi économique. « Tourner le dos au commerce ne peut qu’aggraver et prolonger le marasme actuel de l’économie mondiale », affirme le chef économiste du FMI, Maurice Obstfeld.

La directrice générale de l’institution, Christine Lagarde, est allée plus loin la semaine dernière en affirmant que le protectionnisme constituait « une faute économique flagrante ».

Aux Etats-Unis, le candidat républicain à la Maison Blanche, Donald Trump, veut pourtant rétablir des droits de douane et tire à vue sur le libre-échange. Poussée sur sa gauche, sa rivale démocrate Hillary Clinton, a, elle, fini par prendre position contre le traité de libre-échange TPP signé par les Etats-Unis et 11 pays d’Asie-Pacifique. « La rhétorique anti-immigrants et anti-commerce a été centrale depuis le début de la campagne présidentielle », déplore le FMI, sans toutefois directement nommer M. Trump.

Le vote britannique de la fin juin en faveur d’une sortie de l’Union européenne a, lui, « nourri le nationalisme en Europe » et risque de freiner l’intégration dans la région, redoute le FMI. Le Brexit et l’état futur des relations économiques entre la Grande-Bretagne et les Etats membres de l’UE continuent par ailleurs d’alimenter une forte « incertitude », déplore le Fonds.

Les récentes déclarations de la Première ministre britannique Theresa May ont ainsi ravivé les craintes d’un divorce « sans compromis » sur le plan économique entre les anciens partenaires.

Morosité

Naviguant à contre-courant, le FMI appelle les Etats à renforcer leur coopération au moment où pays riches comme émergents peinent à trouver un second souffle. Les Etats-Unis ont ainsi « perdu de leur élan » sur fond d’investissements des entreprises en berne et d’appréciation du dollar. Sanction: le FMI sabre la prévision de croissance du pays de 0,6 point, à 1,6% cette année.

L’économie chinoise devrait certes bondir de 6,6% cette année mais le FMI déplore « l’absence de progrès » du pays pour freiner l’explosion de la dette des entreprises. L’Afrique sub-saharienne, touchée de plein fouet par la chute des cours des matières premières, ne devrait, elle, plus croître que de 1,4% cette année, soit le rythme le plus lent depuis 24 ans.

Enfin, l’Amérique du Sud devrait elle s’enfoncer dans la récession cette année, plombée notamment par la grave crise économique traversée par le géant brésilien dont le PIB devrait se contracter de 3,3%. « Le nombre de pays en développement en récession n’a jamais été aussi important depuis 2009 », s’était inquiété lundi le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim.

Ce tableau morose de l’économie mondiale pourrait encore être assombri par des tensions géopolitiques, assure le FMI. « Les actes récurrents de terrorisme, les guerres civiles prolongées qui s’étendent aux régions voisines et de graves crises de santé publique liées au virus Zika pourraient avoir un lourd impact sur la confiance des marchés avec des répercussions négatives sur la demande et l’activité », détaille le FMI.

Seuls motifs d’optimisme, la zone euro semble se redresser (1,7% attendu cette année) malgré les craintes liées à son secteur bancaire et notamment au sort de la Deutsche Bank, tandis que la récession en Russie devrait être moins sévère que prévu cette année.

Le Quotidien / AFP