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Le budget 2016 en débat à l’Assemblée


Le ministre des Finances Michel Sapin le 30 septembre 2015 à l'Assemblée nationale à Paris. (Photo : AFP)

Le projet de budget 2016 démarre mardi une course de fond à l’Assemblée, où des frictions à gauche peuvent ressurgir autour d’une initiative de Jean-Marc Ayrault en vue d’une réforme fiscale, tandis que la droite va contester la réalité d’une baisse d’impôts.

Si les débats vont se concentrer jusqu’à vendredi sur les recettes du projet de loi de finances, nul doute que les discussions à l’intérieur et à l’extérieur du Palais-Bourbon vont déborder sur des éléments relevant des dépenses.

Construit sur l’hypothèse d’une croissance de 1,5% et l’objectif d’un déficit public ramené à 3,3% du produit intérieur brut, ce quatrième budget du quinquennat de François Hollande mais le dernier en année pleine avant la présidentielle prévoit la poursuite d’économies massives (16 milliards d’euros en 2016, sécurité sociale incluse) ou une nouvelle diminution des prélèvements pour les entreprises.

Pour les ménages, la mesure phare est la nouvelle baisse d’impôt sur le revenu – de deux milliards d’euros – en faveur de 8 millions de foyers fiscaux.

«Tout ce qui viendrait parasiter ce message de baisse des impôts en direction notamment des classes moyennes et des plus humbles doit être proscrit», a jugé mercredi le président de l’Assemblée Claude Bartolone, réagissant à l’amendement de Razzy Hammadi (PS) sur un impôt sur le revenu minimum obligatoire.

Ce projet de loi de finances marque aussi la première étape vers la mise en place du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

Pas convaincu, l’ancien ministre du Budget Eric Woerth (Les Républicains) a critiqué lundi un budget «extraordinairement vide», sans «réponse aux vraies questions qui se posent pour les dix-huit prochains mois». Et «il n’y a pas de baisse d’impôt» globalement, mais une concentration «sur de moins en moins de contribuables».

La droite épingle aussi des «économies en trompe-l’oeil» sur les 16 milliards annoncés. Une partie des économies apparaît «non documentée» dans le rapport de la rapporteure générale Valérie Rabault (PS).

A gauche, si les socialistes «frondeurs» veulent encore infléchir le projet gouvernemental en faveur notamment des collectivités locales, certains élus jugent qu’il n’y a pas «la volonté de trop en découdre», car «les députés sont un peu désabusés et en période préélectorale».

Les socialistes «incorrigibles»

«Quand on est sur les mêmes listes aux régionales, on a intérêt à ne pas semer le doute dans l’esprit de nos électeurs», a lancé vendredi le président du groupe PS Bruno Le Roux.

Mais le rôle de poil à gratter semble inhabituellement revenir à l’ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault, à l’origine, avec Pierre-Alain Muet (PS), d’un amendement pour construire la première marche d’une grande réforme fiscale.

Plus de 130 députés socialistes ont cosigné cet amendement visant à amorcer une «réunification» de l’impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée et à remplacer une partie de la prime d’activité par une baisse correspondante de la CSG pour les salariés gagnant jusqu’à 1,3 Smic.

Le gouvernement, pas opposé à un débat sur «une perspective» de long terme selon le terme du ministre des Finances Michel Sapin, exclut une application rapide et table sur un retrait de l’amendement par ses auteurs dans l’hémicycle.

L’initiative de Jean-Marc Ayrault a agacé certains socialistes, pour lesquels il aurait dû mener cette réforme en son temps, à Matignon. Les socialistes sont «incorrigibles sur le budget» car ils ont «toujours une envie de débat (…) et ne se posent que très rarement la question de la façon dont ça va être reçu dans l’opinion», s’est désolé un ténor PS du Parlement.

La droite n’a pas manqué d’ironiser sur «la cacophonie qui vient de la fronde menée par un député, et pas des moindres, Jean-Marc Ayrault», selon la formule d’un des porte-parole du parti LR, Sébastien Huyghe. Aller vers une fusion CSG-impôt sur le revenu, «c’est une très grosse bêtise», a lancé lundi l’ancien ministre Hervé Gaymard.

Déchirés entre pro et anti-gouvernement, les écologistes tenteront, eux, de se réunir autour de l’alourdissement de la taxation du diesel, souhaitée aussi par certains socialistes, mais le gouvernement veut repousser ce débat au budget rectificatif de fin d’année.

Dans tous les cas, l’exécutif n’imagine pas ressortir l’arme constitutionnelle du 49-3, utilisée pour faire passer la loi Macron sans vote, pour ce budget «de continuité» et «sans surprise».

AFP/M.R.