Vieille dame généreuse mais toujours à découvert, la Sécurité sociale française, « l’un des plus grands progrès qui soient » selon la ministre de la Santé, Marisol Touraine, fête mardi ses 70 ans, en se projetant vers l’avenir.
« Si la Sécurité sociale nous est aujourd’hui éminemment familière, si bénéficier de sa protection paraît naturel, il s’agit de l’un des plus grands progrès qui soient », a déclaré la ministre en ouverture des rencontres organisées à la Mutualité à Paris pour cet anniversaire, devant un parterre de personnalités.
L’événement est célébré en grande pompe par le président François Hollande, avec pour invités des ministres étrangers, personnalités politiques, syndicats, patronat ou encore historiens. « Dans les périodes de tension, de pression, voire d’agression, ce lien indéfectible est un lien qui change tout », a-t-elle ajouté, jugeant que « ceux qui se jouent de la solidarité fissurent notre pacte commun ».
Huit Français sur dix se disent inquiets quant à la pérennité de la Sécurité sociale et les trois quarts estiment urgent de la réformer en profondeur, selon un sondage Odoxa pour Le Parisien-Aujourd’hui en France et France Info, publié mardi.
« Les Français affichent un pessimisme collectif (…), mais dans leurs comportements individuels, ils manifestent leur confiance dans l’avenir », a commenté la ministre
Les fondements de cette protection sociale, posés par l’ordonnance du 4 octobre 1945 et nés juste après la guerre, n’ont pas changé. Il s’agissait alors, comme aujourd’hui, de garantir « les travailleurs et leurs familles » contre les aléas de la vie, en permettant à chacun de cotiser selon ses moyens et de recevoir selon ses besoins.
Le système solidaire inspiré du Conseil national de Résistance (CNR) et mis sur pied par Pierre Laroque, haut fonctionnaire, et Ambroize Croizat, ministre du travail, n’a pas cessé d’évoluer. Vieillissement de la population, augmentation de l’espérance de vie, croissance du chômage ont nécessité de nombreuses réformes, la solidarité dépassant désormais largement le champ des salariés.
Si pour beaucoup, la « Sécu » rime avec maladie, elle gère aussi les prestations destinées aux familles, la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, les retraites et la solidarité en faveur des personnes âgées.
Difficile pour l’État de maintenir tous ces postes de dépenses à l’équilibre, d’autant plus que les cotisations s’amoindrissent avec la crise. Résultat, la Sécu est constamment déficitaire depuis 2002.
« Défendre notre système social, c’est faire mentir les fatalistes, les déclinistes, qui brandissent l’épouvantail d’un gouffre prétendument sans fond et la menace de l’assistanat pour effrayer », a dit Marisol Touraine. La ministre a estimé qu’il fallait avoir confiance alors que le gouvernement s’est fixé l’objectif de passer le déficit sous la barre des 10 milliards d’euros en 2016.
La ministre a tenu à rejeter tout « fatalisme » et estimé qu’il fallait « avoir confiance ».
Ella a ainsi rappelé que le régime des retraites devrait revenir à l’équilibre dès 2016, se retrouvant en léger excédent (500 millions d’euros), grâce au recul de l’âge de départ à 62 ans voté en 2010 et à l’allongement de la durée de cotisation adoptée en 2014.
Eternel point noir, le déficit de l’assurance maladie s’aggravera en 2015, à moins 7,5 milliards d’euros. Refusant de piocher dans la poche des assurés via des franchises ou des déremboursements, le gouvernement préfère faire la chasse aux actes inutiles et développer l’ambulatoire, mais le retour à l’équilibre n’est pas prévu avant au moins 2020.
Pour redonner tout son sens au principe d’universalité sur lequel repose la Sécu et finaliser sa transformation, la ministre a rappelé la mise en oeuvre, dès 2016, d’une protection universelle maladie, consacrant la « résidence stable et régulière » comme unique critère d’ouverture des droits.
Objectif: éviter les trous de couverture en simplifiant l’affiliation des assurés soumis à des démarches compliquées lors d’un changement de situation professionnelle, familiale ou résidentielle.
Autre étape vers « l’universalisation réelle », la mise en place du tiers-payant généralisé en 2017, contesté par les médecins en grève contre le Projet de loi santé voté mardi au sénat.
AFP / S.A.