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La mue de François Hollande au fil d’un quinquennat guerrier


Le président François Hollande lors d'une minute de silence le 16 novembre 2015 à La Sorbonne à Paris. (Photo : AFP)

Il était arrivé à l’Elysée avec la volonté d’incarner une «présidence normale». Au fil de trois ans et demi d’exercice du pouvoir, François Hollande s’est mué en un chef d’Etat martial lançant des interventions armées sur deux continents et déterminé à riposter aux pires attentats commis en France.

Visage tendu, voix affectée et une expression pour résumer le drame en cours: «C’est une horreur». Vendredi peu avant minuit, alors que des jihadistes continuent d’abattre des spectateurs au Bataclan, le président laisse transparaître une émotion extrême pour la première fois depuis son élection en 2012.

Le bilan des attentats s’annonce déjà sans précédent et le président a lui-même vécu la première attaque aux abords du Stade de France en entendant distinctement des explosions, provoquées par trois jihadistes kamikazes.

Lorsqu’il apprend que le nombre de victimes au Bataclan et dans des cafés de la capitale a dépassé le seuil de 100 morts, il est «plongé dans un état d’abattement», rapporte un témoin à ses côtés.

«François Hollande n’a pas prononcé un mot pendant trois, quatre minutes. Cela m’a rappelé le moment où George W. Bush, hébété, apprend les attentats le 11 septembre 2001», ajoute cette source.

Selon un membre de son entourage, le président est confronté «à un moment exceptionnel par son intensité et sa gravité». «Le président doit prendre sur ses épaules, avec l’exécutif, la souffrance des Français. Ce qu’il est profondément, c’est-à-dire proche des gens, il le reste», ajoute-t-il.

Selon un proche, si François Hollande entendait incarner une présidence «normale» en contraste avec son prédécesseur Nicolas Sarkozy, jugé clivant et excessif, il était conscient que «l’exercice du mandat présidentiel ne l’était pas et qu’il serait confronté à des drames».

«La mort habite la fonction présidentielle»

Mais son quinquennat est particulièrement marqué par la guerre et le terrorisme. «Voilà ce qui vous change, la mort habite la fonction présidentielle», confiait d’ailleurs en mars le président.

Dès janvier 2013, il annonce l’envoi des forces françaises au Mali, pour traquer les groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda occupant le nord du pays. Cette «opération Serval» est suivie à la fin de la même année de l »opération Sangaris» en Centrafrique, où l’armée française tente d’enrayer les tueries entre communautés chrétienne et musulmane.

En août 2014, l’armée se redéploie dans tout le Sahel au sein de l«opération Barkhane» qui vise à étendre la lutte contre les groupes jihadistes dans la région.

Parallèlement, François Hollande est confronté à des enlèvements de citoyens français dans plusieurs points du globe. De son propre aveu, l’événement le plus marquant est l’exécution en septembre 2014 d’Hervé Gourdel en Algérie, un guide de montagne décapité par un groupe jihadiste, dont il découvre la vidéo alors qu’il est à l’Assemblée générale de l’ONU.

Ce sont les attentats de janvier à Paris, contre le journal Charlie Hebdo, une épicerie casher et une policière municipale, qui pour la première fois font surgir dans son mandat le terrorisme sur le territoire français.

Dans la foulée de ces attaques jihadistes et d’une marche historique ayant rassemblé une cinquantaine de dirigeants étrangers et plus de trois millions de Français, il réussit avec l’exécutif à rassembler quasiment tous les partis autour d’une unité nationale.

Mais les attaques de vendredi sont une épreuve d’une toute autre ampleur avec l’irruption d’équipes kamikazes coordonnées depuis la Syrie, où la France est engagée militairement, comme en Irak, au sein d’une coalition internationale. Pour la première fois de son mandat, il décrète l’état d’urgence et doit annoncer lundi la prolongation de cette mesure exceptionnelle en allant s’exprimer devant le Congrès à Versailles, encore une première du quinquennat.

«La France sera impitoyable à l’égard des barbares de Daesh (…) sur tous les terrains, intérieur comme extérieur», a-t-il prévenu samedi. La réponse n’a pas tardé : Paris a bombardé massivement dimanche un fief en Syrie du groupe État islamique (EI), qui a revendiqué les attentats de vendredi.

AFP/M.R.