La fermeture d’équipements publics et privés dans les petites communes, symptôme d’un mal-être croissant, figure parmi les causes majeures de déclenchement du mouvement des « gilets jaunes », selon une étude publiée mardi.
Baptisée « Territoires, bien-être et politiques publiques », cette note du Conseil d’analyse économique (CAE), groupe de réflexion rattaché à Matignon, a étudié à un niveau très local les causes du mécontentement qui a débuté fin 2018. Les auteurs ont recensé l’ensemble des communes ayant connu un événement lié aux « gilets jaunes » en novembre et décembre 2018 en les croisant avec cinq facteurs: le déclin de l’emploi, la fermeture des équipements publics et privés, le poids de la fiscalité locale, le recul de la vie associative ou la sclérose du marché immobilier. Si les raisons économiques, comme le niveau d’emploi ou de revenus, sont évidemment importantes, cette étude montre l’impact majeur des facteurs liés à l’environnement local des communes concernées.
« Le mouvement n’est pas un mouvement de pauvres, mais un mouvement de gens qui subissent le déclassement de l’endroit où ils vivent », explique Claudia Sénik, économiste et un des auteurs de l’étude. Ainsi, « il y a une probabilité plus forte d’événements « gilets jaunes » quand la distance d’accès aux équipements a augmenté » entre 2012 et 2015, du fait de la fermeture de commerces, d’écoles, d’un cabinet médical, etc., explique-t-elle.
L’exemple de la supérette
Exemple parlant : quand 8% des communes françaises ont été touchées par un événement « gilets jaunes », 30% des communes qui ont subi la fermeture de leur supérette ont connu un tel événement. Ces résultats doivent faire réfléchir le pouvoir politique sur l’impact des politiques territoriales qui ont jusqu’ici surtout favorisé les effets strictement économiques, avec une tendance à la concentration des activités et des équipements dans les métropoles, estiment les auteurs. « Il est urgent que les politiques publiques territoriales changent d’objectif pour viser plus le bien-être et la qualité de vie » des citoyens, avance Yann Algan, autre auteur de la note. Celle-ci relève notamment l’inefficacité de certaines aides aux territoires, comme les exonérations de charges pour les zones de revitalisation rurale (ZRR), et préconise leur suppression. Les moyens dégagés (environ 300 millions d’euros par an) pourraient être réutilisés pour financer des projets locaux à l’initiative des communes. Par ailleurs, le futur réseau France Services visant à faciliter les démarches administratives devrait aussi être élargi à tous les services de proximité, y compris privés, estime la note, afin de privilégier le lien social contre la stratégie du « tout numérique ».
AFP
Etude à prendre avec une tonne de pincettes vu la politisation du CAE.