Véritable légende de l’AS Rome et du football italien, Francesco Totti a été prié de rentrer chez lui dimanche par son entraîneur Luciano Spalletti après une interview dans laquelle il réclamait plus de respect. Après presque 25 ans d’amour, l’histoire pourrait mal finir.
A 39 ans, un âge où les champions de sa trempe ont normalement abandonné les crampons pour devenir consultants TV, Totti veut encore jouer avec « sa » Roma, son club de toujours. Mais il ne le fait presque plus et cela lui pèse. « Je me sens encore footballeur et je veux jouer. Ma blessure est terminée, je vais bien, et si je ne joue pas, c’est uniquement lié au choix de l’entraîneur », a lâché Totti dans une interview à la RAI, dont un extrait a été diffusé samedi.
« Mes rapports avec Spalletti ? Je dirais bonjour-bonsoir. Mais j’ai de l’estime pour lui en tant que personne et en tant qu’entraîneur. Mais c’est vrai que j’aurais préféré qu’il me dise en face des choses que j’ai lues dans les journaux », a-t-il ajouté.
« Comment me gérer ? Mieux que ça, ça serait bien pour tout le monde. Pour que je reçoive le respect normal compte tenu de ce que j’ai donné à ce club et à cette équipe », a encore estimé le capitaine.
Roi de Rome
Spalletti manifestement n’a pas apprécié et a renvoyé son joueur de la mise au vert, alors que pour une fois, Totti pouvait espérer être titulaire en soirée (20h45) contre Palerme.
Les deux hommes semblent avoir atteint le point de rupture et le moment que tous les tifosi de la Roma redoutent est donc arrivé: après presqu’un quart de siècle en giallorosso, la question de l’avenir de Totti, il « Re di Roma » (le roi de Rome), il « capitano eterno » (le capitaine éternel), se pose et elle se pose vraiment.
« Mon contrat se termine en juin et je verrai alors ce qui peut se passer, parce que je ne peux pas rester comme ça. Je me sens mal, ainsi que les gens qui m’entourent », a dit Totti samedi.
Totti a débuté en Serie A avec la Roma en 1993, à 16 ans. Depuis, il a porté ce maillot 750 fois et a marqué 300 buts pour ce club. Il est une légende de la Roma et de la ville, depuis longtemps. Mais cette saison, la légende s’est assise et sur le banc elle a moins d’allure.
La saison dernière encore, pourtant, son apport n’avait pas été négligeable. Bien sûr, il fallait déjà ménager ses genoux et aménager ses apparitions, mais avec neuf buts et huit passes décisives en 36 matches toutes compétitions confondues, le N.10 avait montré qu’il tenait la route.
L’âge du capitaine
Mais cette saison, rien n’a fonctionné. Le club a recruté des attaquants, Mohamed Salah et Edin Dzeko, et le champion du monde 2006 a peu joué, puis plus du tout à cause d’une longue blessure.
Rudi Garcia limogé, c’est Spalletti qui a repris l’équipe. Mais le rapport entre les deux hommes a d’emblée paru difficile, alors que le technicien avait installé Totti au poste d’avant-centre, inventant au passage le concept de « faux 9 », lors de son premier passage à Rome de 2005 à 2009.
Mercredi face au Real Madrid (défaite 2-0), Totti n’a ainsi eu droit qu’aux trois dernières minutes, ce que beaucoup d’observateurs ont considéré comme un manque de respect pour son immense carrière. Le même reproche avait été adressé en début de saison à Garcia quand il avait glissé à Totti un papier sur lequel étaient inscrites ses consignes.
Après le match face au Real, Luka Modric, milieu de terrain madrilène avait lui posté sur les réseaux sociaux un selfie avec Totti, légendé: « Mon idole ». Modric n’est pas spécialement jeune (30 ans) mais quand Totti a débuté en Serie A, le Croate avait sept ans.
Ces trois épisodes posent la question du statut actuel de Totti et de l’âge du capitaine. Est-il encore un joueur à part entière, qui ne devrait pas étaler ses états d’âme en public ? Ou bien un morceau d’histoire à qui il n’est pas digne de demander de jouer trois minutes, ni de respecter des consignes ?
AFP/M.R.