Le retour présumé de la Grèce à la croissance en 2016 a été démenti lundi par des données révisées à la baisse, qui tombent au plus mal alors qu’Athènes tente de finaliser un accord avec l’UE et le FMI pour sa sortie de crise.
Au terme de cette révision de premières estimations faites en février par l’Office grec des statistiques, Elstat, l’année 2016 se conclurait sur un recul de 0,05% du PIB, contre une croissance de 0,3% annoncée auparavant. Le pays, dont le PIB a chuté de 1,2% au quatrième trimestre, contre un recul d’abord estimé à 0,4%, resterait donc en récession pour la huitième année consécutive, à l’exception d’un bref retour à la croissance en 2014.
L’annonce de cette contre-performance intervient alors qu’Athènes tente de finaliser avec ses créanciers un accord en souffrance depuis des mois pour rester sous perfusion financière jusqu’en 2018 et préparer son retour, prévu à cette date, sur les marchés financiers. Depuis 2010, la Grèce vit des prêts octroyés par la zone euro et le FMI qui, au fil de trois plans d’aide successifs, lui ont imposé en échange de très difficiles réformes, aux forts effets récessifs, avec une chute cumulée de 25% de son PIB.
Les négociations entre Athènes et ses bailleurs de fonds s’étaient enlisées depuis l’automne dans les divergences d’estimations sur la marche de l’économie grecque entre le FMI et la zone euro. Le premier juge trop optimistes les projections européennes, réclamant en conséquence plus d’efforts à Athènes et un allègement substantiel de la dette grecque, rejeté dans l’immédiat par Berlin. Un compromis complexe, qualifié d’«honorable» par Athènes, a toutefois été atteint fin février à Bruxelles, permettant la reprise des discussions à Athènes. Mais le Fonds fait de nouveau de la résistance, selon les médias grecs. Ils imputent le nouveau bras de fer en cours aux exigences réitérées du FMI pour plus de dérégulation du marché du travail et un ajustement budgétaire plus centré sur la croissance.
« Même rengaine »
Alexis Tsipras a implicitement confirmé cet accès de tension lundi, évoquant devant ses ministres l’insistance de «certains» créanciers «impénitents» à «entonner la même rengaine discordante». Ouvrant un conseil des ministres, il s’est toutefois prévalu de coudées plus franches pour desserrer la tutelle des créanciers. Mais c’était en invoquant justement le retour à la croissance, moins d’une heure avant l’annonce d’Elstat.
Créditée par les sondages d’une avance sur la gauche au pouvoir de plus de 10 points, l’opposition de droite a sauté sur l’occasion pour se gausser du Premier ministre. La Commission européenne a de son côté fait contre mauvaise fortune bon cœur, évoquant un «haut niveau de volatilité» des statistiques en jeu. Mais «nous continuons de tabler sur une croissance pour cette année», a ajouté sa porte-parole en charge des Affaires économiques, Annika Breidthardt, lors d’un point de presse à Bruxelles. La Commission avait, elle aussi, avancé en février l’estimation d’une croissance de 0,3% pour 2016. Elle pronostique pour 2017 et 2019 des sauts respectifs du PIB de 2,7% et de 3,1%.
Faute de telles performances, la trajectoire de la dette empirerait encore alors que son niveau, à près de 180% du PIB, est déjà jugé par beaucoup insoutenable. Un défaut de croissance pèserait aussi sur l’ajustement budgétaire assigné au pays, alors que tout nouveau tour de vis s’annonce à haut risque politique et économique. Une nouvelle épreuve de vérité statistique attend par ailleurs Athènes le 21 avril, quand Eurostat devra avaliser ses résultats budgétaires. Ils sont pour le moment estimés très positifs avec un excédent primaire (hors service de la dette) donné à plus de 2,5% du PIB, bien au-delà des objectifs assignés au pays.
Le Quotidien/AFP